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13/07/2016 | FRANCE | N°382019

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 13 juillet 2016, 382019


Vu la procédure suivante :

Le président du conseil régional d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires a porté plainte contre M. B...A...devant la chambre régionale de discipline d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires. Par une décision du 14 septembre 2007, la chambre régionale de discipline a infligé à M. A...la sanction d'interdiction d'exercer la profession de vétérinaire pendant dix-huit mois assortie en intégralité du sursis.

Par une décision du 28 janvier 2009, la chambre supérieure de discipline de l'ordre national des vétérinaires, statuant sur l'appel du

président du conseil régional d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires, a réformé...

Vu la procédure suivante :

Le président du conseil régional d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires a porté plainte contre M. B...A...devant la chambre régionale de discipline d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires. Par une décision du 14 septembre 2007, la chambre régionale de discipline a infligé à M. A...la sanction d'interdiction d'exercer la profession de vétérinaire pendant dix-huit mois assortie en intégralité du sursis.

Par une décision du 28 janvier 2009, la chambre supérieure de discipline de l'ordre national des vétérinaires, statuant sur l'appel du président du conseil régional d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires, a réformé cette décision et interdit à M. A...d'exercer la profession de vétérinaire pendant dix-huit mois dont douze mois avec sursis.

Par un arrêt n° 326718 du 3 décembre 2010, le Conseil d'Etat a annulé cette décision et renvoyé l'affaire devant la chambre supérieure de discipline de l'ordre national des vétérinaires.

Par une décision du 30 avril 2014, la chambre supérieure de discipline de l'ordre national des vétérinaires a de nouveau réformé la décision de la chambre régionale de discipline d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires du 14 septembre 2007 et prononcé à l'encontre de M. A...la sanction d'interdiction d'exercer la profession de vétérinaire pendant dix-huit mois dont douze mois avec sursis.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juin et 30 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du président du conseil régional de l'ordre des vétérinaires d'Auvergne ;

3°) de mettre à la charge du conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment son protocole additionnel n° 7 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benjamin de Maillard, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de M. A...et à la SCP Rousseau, Tapie, avocat du conseil régional de l'ordre des vétérinaires d'Auvergne et du Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires ;

1. Considérant que M. A...se pourvoit en cassation contre la décision du 30 avril 2014 par laquelle la chambre supérieure de discipline de l'ordre national des vétérinaires a réformé la décision de la chambre régionale de discipline d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires du 14 septembre 2007 et prononcé à son encontre la sanction d'interdiction d'exercer la profession de vétérinaire pendant 18 mois, dont 12 mois avec sursis ;

Sur la régularité de la décision attaquée :

2. Considérant, en premier lieu, que, d'une part, la seule circonstance que des courriers entre le Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires et son avocat devant le juge d'appel auraient été joints par erreur au dossier des juges du fond n'est pas, par elle-même, de nature à établir un manque d'impartialité de la chambre supérieure de discipline des vétérinaires ; que, d'autre part, il résulte des termes mêmes de la décision attaquée que celle-ci s'est fondée sur les seules pièces produites par les parties et soumises au contradictoire et non sur des éléments de fait ou de droit nouveaux qui auraient figuré dans ces courriers ; qu'ainsi, en tout état de cause, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la présence de ces courriers au dossier entacherait d'irrégularité la décision attaquée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le rapporteur du dossier devant la chambre disciplinaire de première instance soit devenu, après avoir été nommé président du conseil régional d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires, le représentant de l'appelant devant la chambre supérieure de discipline, est sans incidence sur l'impartialité de cette dernière ;

4. Considérant, en troisième lieu, que le requérant ne peut soutenir que le principe d'impartialité rappelé par les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aurait été méconnu au seul motif que deux membres de la formation de jugement appartenaient au syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral, qui est intervenu en qualité de partie civile dans la procédure engagée contre lui par le procureur de la République auprès du tribunal correctionnel de Moulins et de la cour d'appel de Riom, dès lors, en tout état de cause, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis au Conseil d'Etat, ni même allégué, que les intéressés auraient pris part à l'engagement de cette action ou représenté leur syndicat à cette occasion ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 242-104, applicables à la chambre supérieure de discipline en vertu de l'article R. 242-113 : " Les sanctions disciplinaires prévues à l'article L. 242-7 sont adoptées à la majorité des voix. Les membres de la chambre régionale de discipline ne peuvent s'abstenir. Le partage égal des voix emporte la décision la plus favorable à la personne poursuivie " ; qu'il résulte de ces dispositions que la chambre supérieure peut être composée de membres siégeant en nombre pair ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la chambre supérieure aurait été irrégulièrement composée au motif qu'elle a siégé alors que ses membres étaient en nombre pair doit être écarté ;

6. Considérant, en cinquième lieu, que si le moyen de la requête d'appel du conseil régional d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires tiré du caractère excessif du sursis accordé par la décision de première instance n'a pas été analysé dans les visas de la décision attaquée, il résulte des termes mêmes de cette décision, et à supposer que le requérant puisse se prévaloir d'un tel moyen, que la chambre supérieure a répondu à ce moyen, auquel elle a d'ailleurs fait droit ; qu'ainsi, ce défaut de visa n'entacherait pas d'irrégularité la décision attaquée ;

7. Considérant, en dernier lieu, d'une part, que pour juger que les faits commis par M. A...étaient constitutifs d'une faute disciplinaire, la chambre supérieure de discipline a adopté, comme elle pouvait régulièrement le faire, les motifs retenus sur ce point par la chambre disciplinaire de première instance, après avoir relevé qu'ils n'étaient pas critiqués devant elle ; que, d'autre part, si le juge disciplinaire d'appel est tenu d'expliciter les motifs de fait et de droit venant au soutien de la sanction qu'il prononce, il n'est pas tenu d'expliciter spécifiquement les motifs pour lesquels, le cas échéant, cette sanction aggrave ou allège la sanction infligée en première instance ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté ;

Sur le bien-fondé de la décision attaquée :

8. Considérant que les poursuites qui peuvent être engagées par les instances ordinales contre un vétérinaire en raison de manquements aux obligations définies par le code rural et de la pêche maritime se rattachent à l'exercice de droits et obligations à caractère civil et non à des accusations en matière pénale au sens de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, M. A...ne peut utilement invoquer le bénéfice des stipulations de l'article 4 du protocole additionnel n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives à la règle de " non bis in idem " applicable aux poursuites en matière pénale ;

9. Considérant que si le choix de la sanction relève de l'appréciation des juges du fond au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il appartient au juge de cassation de vérifier que la sanction retenue n'est pas hors de proportion avec la faute commise et qu'elle a pu dès lors être légalement prise ; qu'en se fondant, ainsi qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis, sur le fait que M. A...avait prescrit des médicaments vétérinaires contenant des substances vénéneuses sans examen préalable des animaux, délivré sans ordonnance des médicaments vétérinaires contenant des substances vénéneuses à des doses non exonérées et omis d'apposer les timbres et mentions obligatoires sur les ordonnances ou bons de commande concernant des médicaments ou produits assimilés contenant des substances vénéneuses, la chambre supérieure de discipline a pu légalement estimer que de tels manquements aux exigences déontologiques justifiaient, eu égard à leur gravité, la sanction d'interdiction d'exercer la profession de vétérinaire pendant une durée de dix-huit mois dont douze avec sursis ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. A...doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. A...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au conseil régional d'Auvergne de l'ordre des vétérinaires.

Copie en sera adressée au Conseil supérieur de l'ordre des vétérinaires.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 13 jui. 2016, n° 382019
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Benjamin de Maillard
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU ; SCP ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Date de la décision : 13/07/2016
Date de l'import : 27/12/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 382019
Numéro NOR : CETATEXT000032892406 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2016-07-13;382019 ?
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