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30/06/2016 | FRANCE | N°381125

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 30 juin 2016, 381125


Vu la procédure suivante :

La société Genefim a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des droits supplémentaires de cotisation minimale de taxe professionnelle et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre des années 2006 et 2007 par avis de mise en recouvrement du 22 juillet 2010. Par un jugement n° 1012340 du 20 avril 2012, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE02257 du 10 avril 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Genefim contre ce juge

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Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en répliq...

Vu la procédure suivante :

La société Genefim a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des droits supplémentaires de cotisation minimale de taxe professionnelle et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre des années 2006 et 2007 par avis de mise en recouvrement du 22 juillet 2010. Par un jugement n° 1012340 du 20 avril 2012, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE02257 du 10 avril 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Genefim contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 10 juin et 3 septembre 2014, le 26 octobre 2015 et les 15 janvier, 21 janvier et 15 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Genefim demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le règlement n° 91-01 du 16 janvier 1991 du comité de la réglementation bancaire ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Anfruns, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la société Genefim ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2016, présentée par la société Genefim ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Genefim, qui exerce l'activité de crédit-bailleur, a refacturé aux crédits-preneurs des immeubles concernés le montant des taxes foncières qu'elle avait acquittées au titre de ces immeubles ; qu'elle a comptabilisé ce montant en tant que charge d'exploitation bancaire et l'a, en conséquence, considéré comme déductible de son produit net bancaire et, donc, de sa valeur ajoutée pour le calcul de la cotisation minimale de taxe professionnelle en application de l'article 1647 B sexies du code général des impôts ; que l'administration a remis en cause cette déduction et rehaussé les cotisations minimales de la société requérante au titre des années 2006 et 2007 ; que le tribunal administratif de Montreuil a, par un jugement du 20 avril 2012, rejeté la demande de la société Genefim tendant à la décharge de ces suppléments d'imposition ; que cette dernière se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 10 avril 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel dirigé contre ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie (...). La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II. / (...) II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers (...) / 3. La production des établissements de crédit (...) est égale à la différence entre : / D'une part, les produits d'exploitation bancaires et produits accessoires ; / Et, d'autre part, les charges d'exploitation bancaires. (...) " ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation minimale de taxe professionnelle ; qu'il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, de se reporter aux normes comptables, dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée, dont l'application est obligatoire pour les entreprises dont il s'agit ; que la norme applicable est, en l'espèce, le règlement du comité de la réglementation bancaire du 16 janvier 1991 relatif à l'établissement et à la publication des comptes des établissements de crédit ;

3. Considérant que ce règlement prévoit que les produits sur opérations de crédit-bail et assimilées et les charges sur opérations de crédit-bail et assimilées sont des produits et charges d'exploitation bancaire du compte de résultat des établissements exerçant une activité de crédit-bail à titre principal ou de manière significative ; que le commentaire du poste 4 " charges sur opérations de crédit-bail et assimilées " prévoit que ce poste recouvre les charges provenant d'éléments figurant au poste 9 " crédit-bail et location avec option d'achat " de l'actif du bilan, lequel comprend les biens meubles ou immeubles effectivement loués en crédit-bail, et que ces charges sont " notamment les dotations aux amortissements et les moins-values de cession relatives à des immobilisations données en crédit-bail " ; que, par ailleurs, le commentaire du poste 15 " charges générales d'exploitation " précise que ce poste comprend " les impôts relatifs aux frais de personnel, et (...) les autres impôts et taxes " ; qu'enfin, le troisième alinéa de l'article 3.5 du même règlement dispose que " les charges refacturées et les produits rétrocédés au franc le franc peuvent être présentés en déduction des produits et charges auxquels ils se rapportent " ;

4. Considérant, en premier lieu, que la cour administrative d'appel de Versailles n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'il résultait des termes mêmes de ces dispositions que la taxe foncière sur les propriétés bâties doit être imputée au poste 15 " charges générales d'exploitation ", lequel n'est pas déductible pour le calcul du produit net bancaire et ne constitue pas non plus une consommation de bien ou service en provenance de tiers susceptible d'être soustraite de ce produit net pour le calcul de la valeur ajoutée ; qu'au demeurant, le paiement d'un impôt, sauf lorsqu'il grève le prix du bien ou du service vendu, constitue un emploi de cette même valeur ajoutée et non une charge déductible pour le calcul de son montant ; que si la société requérante fait valoir la présence de l'adverbe " notamment " dans la description du contenu du poste 4 " charges d'exploitation sur opérations de crédit-bail ", pour en déduire que la liste des opérations qui y figure ne serait pas limitative, et se prévaut d'un principe de comptabilisation au sein du produit net bancaire de l'ensemble des produits et des charges afférents aux opérations de crédit-bail en fonction de la seule destination de ces produits et charges, ces arguments ne sauraient prévaloir sur les termes exprès du règlement du 16 janvier 1991 ; qu'au demeurant, s'agissant des opérations de location simple, ce même règlement, qui prévoit également le principe de la comptabilisation des produits et des charges selon la destination des opérations, n'inclut pas non plus les impôts et taxes au sein de la liste des charges imputables au poste 5, qui concerne ces opérations ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la cour n'a pas davantage commis d'erreur de droit en écartant l'application des dispositions de l'article 3.5 du règlement du 16 janvier 1991 qui, si elles prévoient, de manière générale, la possibilité de déduire les charges refacturées des produits auxquels elles s'appliquent, ne sauraient avoir pour effet de rendre déductible fiscalement, pour le calcul de la valeur ajoutée, une charge telle que la taxe foncière, qui incombe par nature au propriétaire du bien et dont la refacturation au crédit-preneur doit être regardée comme un complément de loyer demandé à celui-ci ; que, contrairement à ce qui est soutenu, la réponse faite par le président de l'Autorité des normes comptables le 24 janvier 2013 à la présidente de l'association française des sociétés financières ne prend pas position sur l'imputation au poste 4 de la taxe foncière afférente à un bien donné en crédit-bail et se borne à évoquer l'option prévue par l'article 3.5 sans, en tout état de cause, qu'aucune conséquence puisse en être tirée pour l'application des dispositions citées ci-dessus de l'article 1647 B sexies du code général des impôts ;

6. Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que le produit de la refacturation de la taxe foncière à un crédit-preneur ne constituerait pas un produit d'exploitation bancaire concourant à la production de l'exercice au sens du 2 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts est nouveau en cassation et, par suite, inopérant ; qu'il ne peut donc qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Genefim n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Genefim est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Genefim et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 381125
Date de la décision : 30/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-05 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES. TAXE PROFESSIONNELLE. QUESTIONS RELATIVES AU PLAFONNEMENT. - CALCUL DE LA VALEUR-AJOUTÉE D'UN CRÉDIT-BAILLEUR - DÉDUCTIBILITÉ DE LA TAXE FONCIÈRE PAYÉE PAR LE CRÉDIT-BAILLEUR ET REFACTURÉE AU CRÉDIT PRENEUR - ABSENCE.

19-03-04-05 Société exerçant l'activité de crédit-bailleur et ayant refacturé aux crédits-preneurs des immeubles concernés le montant des taxes foncières qu'elle avait acquittées au titre de ces immeubles.,,,Il résulte des termes mêmes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts et du règlement n° 91-01 du 16 janvier 1991 du comité de la réglementation bancaire que la taxe foncière sur les propriétés bâties doit être imputée au poste 15 charges générales d'exploitation, lequel n'est pas déductible pour le calcul du produit net bancaire et ne constitue pas non plus une consommation de bien ou service en provenance de tiers susceptible d'être soustraite de ce produit net pour le calcul de la valeur ajoutée. Au demeurant, le paiement d'un impôt, sauf lorsqu'il grève le prix du bien ou du service vendu, constitue un emploi de cette même valeur ajoutée et non une charge déductible pour le calcul de son montant.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2016, n° 381125
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Julien Anfruns
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:381125.20160630
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