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27/06/2016 | FRANCE | N°388984

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 27 juin 2016, 388984


Vu les procédures suivantes :

1. La société anonyme (SA) Faurecia a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution de crédits d'impôts d'origine étrangère dont elle disposait, en sa qualité société mère d'un groupe fiscal intégré, au titre des années 2006, 2007 et 2008. Par un jugement n° 1006165 du 27 avril 2012, le tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 12VE02293 du 26 janvier 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel de la SA Faurecia dirigé contre ce jugement.

Sous le n° 388984, par

un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés ...

Vu les procédures suivantes :

1. La société anonyme (SA) Faurecia a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution de crédits d'impôts d'origine étrangère dont elle disposait, en sa qualité société mère d'un groupe fiscal intégré, au titre des années 2006, 2007 et 2008. Par un jugement n° 1006165 du 27 avril 2012, le tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 12VE02293 du 26 janvier 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel de la SA Faurecia dirigé contre ce jugement.

Sous le n° 388984, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 26 mars et 26 juin 2015 et le 24 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SA Faurecia demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. La société anonyme (SA) Faurecia a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution de crédits d'impôts d'origine étrangère dont elle disposait, en sa qualité société mère d'un groupe fiscal intégré, au titre des années 2009 et 2010. Par un jugement n° 1308038 du 22 septembre 2014, le tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 14VE03224 du 9 juin 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel de la SA Faurecia dirigé contre ce jugement.

Sous le n° 392534, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 août et 10 novembre 2015 et le 24 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SA Faurecia demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention du 29 mai 1970 entre la France et le Royaume du Maroc tendant à éliminer les doubles impositions et à établir des règles d'assistance mutuelle administrative en matière fiscale, notamment son article 25 ;

- la convention du 14 janvier 1971 entre la France et le Portugal tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu, notamment son article 24 ;

- la convention du 10 septembre 1971 entre la France et le Brésil tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, notamment son article 22 ;

- la convention du 28 mai 1973 entre la France et la Tunisie tendant à éliminer les doubles impositions et à établir des règles d'assistance mutuelle administrative en matière fiscale, notamment son article 29 ;

- la convention du 1er juin 1973 entre la France et la Tchécoslovaquie tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur les revenus et sur la fortune, notamment son article 25, ainsi que l'accord sous forme d'échange de lettres entre la France et la Slovaquie des 24 juin et 7 août 1996 relatif à la succession en matière de traités ;

- la convention du 27 septembre 1974 entre la France et la Roumanie tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, notamment son article 24 ;

- la convention du 27 décembre 1974 entre la France et le Royaume de Thaïlande tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur les revenus, notamment son article 23 ;

- la convention du 2 mai 1975 entre la France et le Canada tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, notamment son article 23 ;

- la convention du 20 juin 1975 entre la France et la Pologne tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, notamment son article 23 ;

- la convention du 19 juin 1979 entre la France et la République de Corée tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale internationale en matière d'impôts sur le revenu, notamment son article 23 ;

- l'accord du 30 mai 1984 entre la France et la République populaire de Chine en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, notamment son article 22 ;

- la convention du 18 février 1987 entre la France et la Turquie en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu, notamment son article 23 ;

- la convention du 7 novembre 1991 entre la France et les Etats-Unis du Mexique en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, notamment son article 21 ;

- la convention du 29 septembre 1992 entre la France et l'Inde en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune, notamment son article 25 ;

- la convention du 3 mars 1995 entre la France et le Japon en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu, notamment son article 23 ;

- la convention du 10 octobre 1995 entre la France et le Royaume d'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, notamment son article 24 ;

- la convention du 28 avril 2003 entre la France et la République tchèque en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, notamment son article 23 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Timothée Paris, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, avocat de la société Faurecia ;

1. Considérant que les pourvois n° 388984 et 392534 présentent à juger des questions communes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que plusieurs des filiales de la SA Faurecia appartenant au groupe fiscal intégré dont elle est la société mère ont perçu, au titres de chacune des années 2006 à 2010, divers revenus de source étrangère, en particulier des intérêts et des redevances ; qu'estimant que ces sociétés, résidentes de France, étaient bénéficiaires de crédits d'impôts correspondant à l'impôt perçu dans les Etats dont provenaient ces revenus, en application des stipulations des conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et ces mêmes Etats, la SA Faurecia, substituée à ses filiales en application du a de l'article 223 O du code général des impôts, a demandé à l'administration fiscale la restitution de ces crédits d'impôts, qui n'avaient pu faire l'objet d'une imputation sur l'impôt dû sur l'ensemble du résultats du groupe, du fait du caractère déficitaire de ce dernier ; qu'à la suite du rejet de ses demandes, elle a saisi le tribunal administratif de Montreuil de demandes tendant à la restitution du montant total de ces crédits d'impôts ; que par des jugements des 27 avril 2012 et 22 septembre 2014, le tribunal a rejeté ces demandes ; que la SA Faurecia se pourvoit en cassation contre les arrêts du 26 janvier et du 9 juin 2015 par lesquels la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté ses appels dirigés contre ces jugements ;

3. Considérant que les stipulations des articles relatifs à l'élimination des doubles impositions des conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée du sud, l'Espagne, les Etats-Unis d'Amérique, l'Inde, le Japon, la Pologne, la République Tchèque, le Portugal, la Slovaquie ainsi que la Thaïlande, prévoient que, lorsqu'un résident de France perçoit des revenus en provenance de ces Etats revêtant la nature, notamment, d'intérêts et de redevances, et que ces revenus y ont supporté l'impôt, ils sont pris en compte pour le calcul de l'impôt français ; que ces stipulations prévoient que le bénéficiaire de ces revenus a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français, égal au montant de l'impôt payé ou supporté dans l'Etat d'origine, qui ne peut toutefois excéder le montant de l'impôt français correspondant à ces revenus ;

4. Considérant qu'il ne résulte pas de ces stipulations, ni d'aucune disposition ou d'aucun principe de droit national, que le crédit d'impôt n'ayant pu faire l'objet d'une imputation soit restitué par la France au résident bénéficiaire de ces revenus ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient la SA Faurecia, la cour administrative d'appel de Versailles, en jugeant, pour ce motif, que la SA Faurecia n'était pas fondée à demander la restitution des crédits d'impôts litigieux, n'a pas entaché ses arrêts, qui sont suffisamment motivés, d'erreur de droit ;

5. Considérant qu'en jugeant que, dès lors que la SA Faurecia ne disposait d'aucun droit à obtenir la restitution du montant des crédits d'impôts d'origine étrangère dont ses filiales étaient bénéficiaires, elle ne disposait d'aucune créance restituable pouvant être regardée comme un bien au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour administrative d'appel de Versailles n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;

6. Considérant, en revanche, que les stipulations des articles 25 de la convention fiscale du 29 mai 1970 entre la France et le Maroc, 29 de la convention fiscale entre la France et la Tunisie et 23 de la convention fiscale du 18 février 1987 entre la France et la Turquie, qui prévoient, que, pour les revenus tels que ceux rappelés au point 2, la France accorde au bénéficiaire, résident de France, une " réduction " ou une " déduction " de l'impôt dû en France, égale au montant des impôts payés dans l'autre Etat, ont pour effet d'accorder à ce résident un crédit d'impôt dans les mêmes conditions que celles rappelées au point 3 ; qu'ainsi, en jugeant que la SA Faurecia ne pouvait utilement se prévaloir de ces stipulations au motif qu'elles ne prévoyaient aucun mécanisme de crédit d'impôt, la cour administrative d'appel de Versailles s'est méprise sur leur portée et a entaché, ce faisant, son arrêt d'erreur de droit ;

7. Considérant, toutefois, qu'il est constant, ainsi qu'il a été dit, que le résultat d'ensemble du groupe présentait, au titre des années en litige, un caractère déficitaire ; qu'il en résulte, ainsi qu'il a été dit au point 4, que les crédits d'impôts résultant de l'application des stipulations de ces conventions ne pouvaient faire l'objet d'une restitution ; qu'il y a lieu de substituer ce motif, qui n'appelle aucune appréciation de circonstances de fait, à celui retenu par la cour dans son arrêt, dont il justifie légalement le dispositif sur ce point ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA Faurecia n'est pas fondée à demander l'annulation des arrêts qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les pourvois de la SA Faurecia sont rejetés.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SA Faurecia et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 388984
Date de la décision : 27/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-01-05 CONTRIBUTIONS ET TAXES. GÉNÉRALITÉS. TEXTES FISCAUX. CONVENTIONS INTERNATIONALES. - STIPULATIONS ACCORDANT AU BÉNÉFICIAIRE DE REVENUS UN CRÉDIT D'IMPÔT ÉGAL AU MONTANT DE L'IMPÔT PAYÉ OU SUPPORTÉ DANS L'ETAT D'ORIGINE DE CES REVENUS - DROIT À RESTITUTION DE CE CRÉDIT D'IMPÔT LORSQU'IL N'A PU FAIRE L'OBJET D'UNE IMPUTATION SUR L'IMPÔT FRANÇAIS - ABSENCE.

19-01-01-05 Les stipulations des articles relatifs à l'élimination des doubles impositions des conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée du sud, l'Espagne, les Etats-Unis d'Amérique, l'Inde, le Japon, la Pologne, la République Tchèque, le Portugal, la Slovaquie ainsi que la Thaïlande prévoient que, lorsqu'un résident de France perçoit des revenus en provenance de ces Etats revêtant la nature, notamment, d'intérêts et de redevances, et que ces revenus y ont supporté l'impôt, ils sont pris en compte pour le calcul de l'impôt français. Ces stipulations prévoient que le bénéficiaire de ces revenus a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français, égal au montant de l'impôt payé ou supporté dans l'Etat d'origine, qui ne peut toutefois excéder le montant de l'impôt français correspondant à ces revenus.,,,Il ne résulte pas de ces stipulations, ni d'aucune disposition ou d'aucun principe de droit national, que le crédit d'impôt n'ayant pu faire l'objet d'une imputation soit restitué par la France au résident bénéficiaire de ces revenus.


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2016, n° 388984
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Timothée Paris
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:388984.20160627
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