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20/06/2016 | FRANCE | N°386146

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 20 juin 2016, 386146


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 386146 :

La SA Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2006 à 2010. Par un jugement n° 1102806 du 5 juillet 2012, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE03249 du 16 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la SA Société Générale contre ce jugement.

Par un pourvoi sommair

e, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er décembre 2014, 2...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 386146 :

La SA Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2006 à 2010. Par un jugement n° 1102806 du 5 juillet 2012, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE03249 du 16 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la SA Société Générale contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er décembre 2014, 2 mars 2015 et 18 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SA Société Générale demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 386149 :

La société Sogara France a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2007 à 2009. Par un jugement n° 1012375 du 20 juin 2012, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE02615 du 16 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Sogara France contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er décembre 2014, 2 mars 2015 et 23 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Carrefour Hypermarchés, venant aux droits et obligations de la société Sogara France, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

3° Sous le n° 386152 :

La société Carma a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2007 à 2009. Par un jugement n° 1012378 du 20 juin 2012, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE02612 du 16 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Carma contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er décembre 2014, 2 mars 2015 et 23 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Carma demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

4° Sous le n° 386153 :

La société Carrefour Banque a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2007 à 2009. Par un jugement n° 1012377 du 20 juin 2012, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE02613 du 16 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Carrefour Banque contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er décembre 2014, 2 mars 2015 et 23 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Carrefour Banque demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

5° Sous le n° 386154 :

La société Carrefour Hypermarchés a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2007 à 2010. Par un jugement n° 1012376 du 20 juin 2012, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12VE02614 du 16 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Carrefour Hypermarchés contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er décembre 2014, 2 mars 2015 et 23 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Carrefour Hypermarchés demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts ;

- la décision n° 2010-28 QPC du 17 septembre 2010 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie-Gabrielle Merloz, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, avocat de la SA société Générale et autres ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 26 mai 2016, présentées par la SA Société Générale et les sociétés Sogara France, Carma, Carrefour Banque et Carrefour Hypermarchés ;

1. Considérant que les pourvois visés ci-dessus présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant (...) à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations (...)./ 3 a. Les conditions et modalités d'application du 1 sont fixées par décret. Il peut être prévu par ce décret des règles spéciales pour le calcul de la taxe sur les salaires en ce qui concerne certaines professions, notamment celles qui relèvent du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale./ (... " ; que l'absence de texte réglementaire précisant les conditions et modalités d'application de ces dernières dispositions aux salaires versés par les employeurs relevant du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale, cette taxe doit être regardée comme n'étant pas applicable aux salaires versés par ces employeurs lorsqu'ils ne relèvent pas des dispositions de l'article 231 du code général des impôts et de celles, prises pour son application, des articles 53 bis et 53 ter de l'annexe III au même code ;

3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions du a du 3 de l'article 231 du code général des impôts se bornent à ouvrir au pouvoir réglementaire la faculté de déterminer des règles spécifiques de calcul de taxe sur les salaires pour certaines professions, notamment celles qui relèvent du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale, et que l'absence d'assujettissement invoquée par les sociétés requérantes résulte uniquement des conséquences tirées par la jurisprudence de l'absence de texte réglementaire précisant les conditions et modalités d'application de la taxe aux rémunérations versées par certains employeurs relevant du régime agricole ; que, par suite, la cour n'a pas entaché ses arrêts d'une insuffisance de motivation en jugeant que les dispositions du a du 3 de l'article 231 du code général des impôts ne prévoient, par elles-mêmes, aucune exonération de taxe au profit des professions relevant du régime agricole ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette même convention : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens (...) " ; qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ;

5. Considérant qu'en réponse au moyen tiré de ce que les dispositions du a du 3 de l'article 231 du code général des impôts méconnaîtraient ces stipulations combinées en ce qu'à défaut d'édiction des décrets d'application nécessaires, certains employeurs agricoles ne sont pas soumis à la taxe sur les salaires, la cour a relevé, d'une part, que ces dispositions législatives ne prévoient, par elles-mêmes, aucune exonération au profit des professions relevant du régime agricole et, d'autre part, que le caractère discriminatoire d'une disposition de nature législative ne saurait résulter de l'absence de prise des mesures règlementaires nécessaires à son application ; qu'en statuant ainsi, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'au surplus, les sociétés requérantes relèvent d'un secteur d'activité distinct des professions qui relèvent du régime agricole et se trouvent dès lors dans une situation différente au regard de la taxe sur les salaires ;

6. Considérant, en dernier lieu, que pour juger que les dispositions de l'article 231 du code général des impôts ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de leur complexité, la cour a relevé qu'elles ne sont pas d'une complexité telle qu'elles seraient contraires aux exigences de clarté et d'accessibilité de la norme invoquées par les sociétés requérantes sur le fondement de la convention ; qu'elle s'est fondée sur ce que les conditions de mise en oeuvre de ces dispositions ont été notamment précisées et clarifiées, s'agissant de la taxe sur les salaires due par les personnes partiellement soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, par l'avis du Conseil d'Etat n° 197839, Société d'exploitation de la clinique de Ker-Lena, rendu le 23 novembre 1998 et publié au Journal officiel de la République Française ; qu'en statuant ainsi, la cour n'a, en tout état de cause, pas commis d'erreur de droit, dès lors que la clarté et l'accessibilité de la loi s'apprécient tant au regard de la loi elle-même que de la jurisprudence qui l'interprète, laquelle comprend, eu égard à leur portée, les avis contentieux rendus par le Conseil d'Etat ; qu'au demeurant, le contenu de cet avis a été repris dans une décision n° 288453 du 6 août 2008 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, Organisme de gestion de l'établissement catholique d'enseignement Notre-Dame-de Saint-Mandé ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pourvois des sociétés requérantes doivent être rejetés, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les pourvois de la SA Société Générale, de la société Sogara France, de la société Carma, de la société Carrefour Banque et de la société Carrefour Hypermarchés sont rejetés.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SA Société Générale, de la société Sogara France, à la société Carma, à la société Carrefour Banque, à la société Carrefour Hypermarchés et au ministre des finances et des comptes publics.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 20 jui. 2016, n° 386146
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD

Origine de la décision
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Date de la décision : 20/06/2016
Date de l'import : 20/02/2018

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 386146
Numéro NOR : CETATEXT000032739891 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2016-06-20;386146 ?
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