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15/06/2016 | FRANCE | N°393312

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 15 juin 2016, 393312


Vu la procédure suivante :

M. C... A...B..., a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 21 février 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul et plusieurs décisions de retrait de points antérieures à cette décision. Par un jugement n° 1404161 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif a fait constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision du 21 février 2014 et la décision de retrait de points consécutive à une

infraction du 17 juilet 2013, annulé les décisions de retrait de points ...

Vu la procédure suivante :

M. C... A...B..., a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 21 février 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul et plusieurs décisions de retrait de points antérieures à cette décision. Par un jugement n° 1404161 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif a fait constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision du 21 février 2014 et la décision de retrait de points consécutive à une infraction du 17 juilet 2013, annulé les décisions de retrait de points consécutives à des infractions 26 novembre 2010 et 30 janvier 2012, enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir les points correspondants et rejeté le surplus des conclusions de M.B....

Par un pourvoi, enregistré le 9 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 2 à 4 de ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Bobo, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par une décision du 21 février 2014, le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité du permis de conduire de M. B...pour solde de points nuls ; que l'intéressé a contesté cette décision et plusieurs décisions antérieures retirant des points de son permis de conduire devant le tribunal administratif de Melun qui, par le jugement du 2 juillet 2015 contre lequel le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation, a prononcé l'annulation de deux décisions de retrait de points, consécutives à des infractions commises les 26 novembre 2010 et 30 janvier 2012, au motif qu'il n'était pas établi que les informations légalement requises avaient été données au conducteur lors de la constatation de ces infractions ;

2. Considérant que la délivrance, au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et éventuellement d'en contester la réalité devant le juge pénal ; qu'elle revêt le caractère d'une formalité substantielle et conditionne la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé ;

Sur le retrait de points consécutif à l'infraction commise le 26 novembre 2010 :

3. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 429 et 537 du code de procédure pénale que les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire pour constater des infractions au code de la route font foi jusqu'à preuve contraire en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions ; que la mention portée sur ces procès-verbaux selon laquelle le contrevenant a reçu l'information prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route n'est pas revêtue de la même force probante ; que, néanmoins, même contredite par le contrevenant, cette indication peut emporter la conviction du juge si elle est corroborée par d'autres éléments ; que tel est notamment le cas s'il ressort des pièces du dossier que le contrevenant a contresigné le procès-verbal ou qu'il a pris connaissance, sans élever d'objection, de son contenu ;

4. Considérant, en ce qui concerne l'infraction commise le 26 novembre 2010, que l'administration avait versé au dossier un procès-verbal conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale qui mentionnait que l'infraction entraînait un retrait de points et que l'intéressée s'était vu remettre une carte de paiement et un avis de contravention ; que l'agent verbalisateur avait indiqué sur ce procès-verbal que l'intéressé avait refusé d'y apposer sa signature ; qu'en estimant que M. B...n'avait pas eu communication des informations requises par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui figuraient sur l'avis de contravention, alors que cette indication établissait qu'il avait été mis en mesure de prendre connaissance du contenu de l'avis de contravention et, en l'absence de toute réserve de sa part, qu'il avait eu connaissance de ces informations, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ;

Sur le retrait de points consécutif à l'infraction commise le 30 janvier 2012 :

5. Considérant que les dispositions portant application des articles 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale en vigueur à la date de l'infraction du 30 janvier 2012, notamment celles des articles A. 37 et A. 37-4 de ce code, issues de l'arrêté du 5 octobre 1999 relatif aux formulaires utilisés pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire, prévoient que lorsqu'une contravention soumise à cette procédure est relevée avec interception du véhicule mais sans que l'amende soit payée immédiatement entre les mains de l'agent verbalisateur, ce dernier utilise un formulaire réunissant, en une même liasse autocopiante, le procès-verbal conservé par le service verbalisateur, une carte de paiement matériellement indispensable pour procéder au règlement de l'amende et l'avis de contravention, également remis au contrevenant pour servir de justificatif du paiement ultérieur, qui comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que, dès lors, le titulaire d'un permis de conduire à l'encontre duquel une infraction au code de la route est relevée au moyen d'un formulaire conforme à ce modèle et dont il est établi, notamment par la mention qui en est faite au système national des permis de conduire, qu'il a payé l'amende forfaitaire correspondant à cette infraction a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis est réputé être revêtu, l'administration doit alors être regardée comme s'étant acquittée envers le titulaire du permis de son obligation de lui délivrer les information requises préalablement au paiement de l'amende, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet ;

6. Considérant que le tribunal administratif a jugé que la circonstance que M. B... avait acquitté le 2 février 2012 l'amende forfaitaire correspondant à l'infraction relevée à son encontre, avec interception du véhicule, le 30 janvier 2012, n'était pas de nature à établir qu'il avait été destinataire d'un avis de contravention comportant l'information requise par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; qu'en statuant ainsi, alors que le paiement de l'amende établissait que M. B...s'était vu remettre l'avis de contravention, que cet avis était réputé comporter les informations requises et que l'intéressé ne démontrait pas s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet, le tribunal administratif a entaché son jugement d'une erreur de droit ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation des articles 2 à 4 du jugement attaqué ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement du 2 juillet 2015 du tribunal administratif de Melun sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure au tribunal administratif de Melun.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. A...B....


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 393312
Date de la décision : 15/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 jui. 2016, n° 393312
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Bobo
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:393312.20160615
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