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15/06/2016 | FRANCE | N°384633

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 15 juin 2016, 384633


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire en réplique et deux nouveaux mémoires, enregistrés le 19 septembre 2014, les 27 janvier et 1er décembre 2015 et le 23 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Tekimmo demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur sa demande du 20 juin 2014 tendant à ce qu'elle prenne un arrêté reprenant le contenu de la " fiche

d'application de diagnostic de performance énergétique " du 7 octobre 2013 ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire en réplique et deux nouveaux mémoires, enregistrés le 19 septembre 2014, les 27 janvier et 1er décembre 2015 et le 23 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Tekimmo demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur sa demande du 20 juin 2014 tendant à ce qu'elle prenne un arrêté reprenant le contenu de la " fiche d'application de diagnostic de performance énergétique " du 7 octobre 2013 ;

2°) d'annuler la " fiche d'application de diagnostic de performance énergétique " du 7 octobre 2013 ;

3°) d'enjoindre à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité de prendre un arrêté reprenant le contenu de la " fiche d'application de diagnostic de performance énergétique " du 7 octobre 2013 et de le publier au Journal Officiel.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le décret n°2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le décret n° 2008-1281 du 8 décembre 2008 ;

- l'arrêté du 8 février 2012 modifiant l'arrêté du 15 septembre 2006 relatif au diagnostic de performance énergétique pour les bâtiments existants proposés à la vente en France métropolitaine ;

- l'arrêté du 18 avril 2012 relatif au diagnostic de performance énergétique pour les centres commerciaux existants proposés à la vente ou à la location en France métropolitaine ;

- l'arrêté du 17 octobre 2012 modifiant la méthode de calcul 3CL-DPE introduite par l'arrêté du 9 novembre 2006 portant approbation de diverses méthodes de calcul pour le diagnostic de performance énergétique en France métropolitaine ;

- l'arrêté du 24 décembre 2012 relatif à la base de données introduite par le décret n° 2011-807 du 5 juillet 2011 relatif à la transmission des diagnostics de performance énergétique à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Anfruns, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 134-1 du code de la construction et de l'habitation : " Le diagnostic de performance énergétique d'un bâtiment ou d'une partie de bâtiment est un document qui comprend la quantité d'énergie effectivement consommée ou estimée pour une utilisation standardisée du bâtiment ou de la partie de bâtiment et une classification en fonction de valeurs de référence afin que les consommateurs puissent comparer et évaluer sa performance énergétique. Il est accompagné de recommandations destinées à améliorer cette performance. / Il est établi par une personne répondant aux conditions prévues par l'article L. 271-6. (...) " ; que l'article R. 134-5 du même code dispose : " Un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction et de l'industrie détermine les modalités d'application de la présente sous-section. Il précise notamment, par catégorie de bâtiments, la définition des surfaces, le contenu du diagnostic de performance énergétique, les éléments des méthodes de calcul conventionnel, les échelles de référence, le prix moyen de l'énergie servant à l'évaluation des dépenses annuelles mentionnée à l'article R. 134-2, les facteurs de conversion des quantités d'énergie finale en quantités d'émissions de gaz à effet de serre et les modalités selon lesquelles est prise en compte dans les calculs l'incidence positive de l'utilisation de sources d'énergie renouvelable ou d'éléments équivalents. " ; que, pour l'application de ces dispositions, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et le ministre délégué à l'industrie ont, le 15 septembre 2006, pris un arrêté relatif au diagnostic de performance énergétique pour les bâtiments existants proposés à la vente en France métropolitaine, qui a ensuite été modifié à plusieurs reprises, pour la dernière fois par un arrêté du 8 février 2012 ; que l'annexe I à ce texte prévoit plusieurs méthodes conventionnelles de calcul pour la réalisation des diagnostics, dont la " méthode annuelle simplifiée, dite 3CL-DPE ", et précise que " seuls sont reconnus les logiciels validés par le ministre en charge de la construction selon la procédure d'évaluation définie en annexe 5 " ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la " fiche d'application " litigieuse :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le document daté du 7 octobre 2013, dénommé " fiche d'application de diagnostic de performance énergétique - version 1.0 " (DPE), est un document à en-tête du ministère de l'égalité des territoires et du logement et du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; qu'il a été mis en ligne sur le site internet du Centre scientifique et technique du bâtiment, établissement public industriel et commercial placé, aux termes de l'article R. 142-1 du code de la construction et de l'habitation, " sous l'autorité du ministre chargé de la construction " ; qu'il prescrit " l'interprétation harmonisée " des arrêtés relatifs au DPE qu'il y a lieu de retenir, en modifiant ou supprimant plusieurs dispositions réglementaires de ceux-ci ; qu'ainsi, la " fiche d'application " litigeuse constitue une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir ;

3. Considérant que les ministres chargés de la construction et de l'industrie sont, ainsi qu'il a été dit, compétents pour arrêter les mesures réglementaires nécessaires à la définition des modalités de réalisation des diagnostics de performance énergétique ; que la " fiche d'application " litigieuse, qui prévoit de telles mesures réglementaires, n'est pas signée par ces ministres ni par aucune personne bénéficiant d'une délégation régulière de signature de leur part ; qu'il suit de là qu'elle est entachée d'incompétence et que, sans qu'il y ait lieu de faire une distinction entre ses différentes dispositions, elle doit être annulée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

4. Considérant que si la ministre chargée du logement soutient que l'annulation de la " fiche d'application de diagnostic de performance énergétique " serait de nature à avoir un impact sur " la fiabilité des diagnostics et impliquerait la révision des logiciels permettant de les établir " et si elle demande, en conséquence, que soient reportés les effets d'une éventuelle annulation, il ne ressort pas des pièces du dossier que la disparition rétroactive de la décision attaquée entraînerait des conséquences manifestement excessives, eu égard aux intérêts en présence et aux inconvénients que présenterait une limitation dans le temps des effets de son annulation ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, d'assortir l'annulation de cette fiche d'une telle limitation ;

Sur les autres conclusions de la société Tekimmo :

5. Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition ni d'aucun principe que les ministres seraient tenus de retenir, par un arrêté compétemment pris, les mêmes modalités de mise en oeuvre du DPE que celles que prévoyait la fiche annulée par la présente décision ; qu'ainsi, les conclusions de la société Tekimmo dirigées contre la décision implicite de rejet de sa demande tendant à ce que les ministres compétents prennent un arrêté reprenant le contenu de la fiche ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il en va de même de ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint aux ministres de prendre un tel arrêté ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La " fiche d'application de diagnostic de performance énergétique version 1.0 " du 7 octobre 2013 est annulée.

Article 2 : Le surplus de la requête de la société Tekimmo est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Tekimmo et à la ministre du logement et de l'habitat durable.

Copie en sera adressée pour information à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 384633
Date de la décision : 15/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 jui. 2016, n° 384633
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Julien Anfruns
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:384633.20160615
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