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09/06/2016 | FRANCE | N°391238

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 09 juin 2016, 391238


Vu la procédure suivante :

La société European Recycling Platform a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 31 mars 2015 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, du ministre de l'intérieur et du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique rejetant sa demande d'agrément en tant qu'éco-organisme pour la filière des déchets d'équipements électriques et électroniques ménagers et, d

'autre part, d'enjoindre aux ministres compétents de lui accorder l'agrément ...

Vu la procédure suivante :

La société European Recycling Platform a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 31 mars 2015 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, du ministre de l'intérieur et du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique rejetant sa demande d'agrément en tant qu'éco-organisme pour la filière des déchets d'équipements électriques et électroniques ménagers et, d'autre part, d'enjoindre aux ministres compétents de lui accorder l'agrément sollicité ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans un délai de huit jours, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 1507143/9 du 3 juin 2015, le juge des référés a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juin et 7 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société European Recycling Platform demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de la société European Recycling Platform ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un arrêté du 31 mars 2015, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, le ministre de l'intérieur et le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique ont rejeté la demande de la société European Recycling Platform tendant à ce que lui soit délivré l'agrément en tant qu'éco-organisme pour la filière des déchets d'équipements électriques et électroniques ménagers ; que, par une ordonnance du 3 juin 2015 contre laquelle la société European Recycling Platform se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de cet arrêté et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint aux ministres compétents de lui accorder l'agrément sollicité ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans un délai de huit jours et sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard ;

3. Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa du II de l'article L. 541-10 du code de l'environnement, dans sa version alors applicable : " Les éco-organismes sont agréés par l'Etat pour une durée maximale de six ans renouvelable s'ils établissent qu'ils disposent des capacités techniques et financières pour répondre aux exigences d'un cahier des charges, fixé par arrêté interministériel, et après avis de l'instance représentative des parties prenantes de la filière " ; qu'aux termes de l'article R. 543-188 du même code : " Les producteurs d'équipements électriques et électroniques ménagers sont tenus d'enlever ou de faire enlever, puis de traiter ou de faire traiter les déchets d'équipements électriques et électroniques ménagers collectés séparément dans les conditions fixées aux articles R. 543-179 à R. 543-181, quelle que soit la date à laquelle ces équipements ont été mis sur le marché. Ces obligations sont réparties entre les producteurs selon les catégories et sous-catégories d'équipements définies au II de l'article R. 543-172, au prorata des équipements électriques et électroniques ménagers mis sur le marché. / Les producteurs s'acquittent des obligations qui leur incombent au titre de l'alinéa précédent soit en adhérant à un éco-organisme agréé dans les conditions définies aux articles R. 543-189 et R. 543-190, soit en mettant en place un système individuel approuvé dans les conditions définies aux articles R. 543-191 et R. 543-192 " ; qu'aux termes de l'article R. 543-189 du même code : " Un arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement, de l'industrie et des collectivités territoriales agrée les éco-organisme auxquels adhèrent les producteurs pour remplir les obligations prévues à l'article R. 543-188 " ; qu'aux termes de l'article R. 543-190 du même code : " L'agrément est délivré dès lors que l'éco-organisme établit, à l'appui de sa demande, qu'il dispose des capacités techniques et financières pour répondre aux exigences d'un cahier des charges relatif : / 1° Aux conditions d'enlèvement des déchets d'équipements électriques et électroniques collectés séparément dans les conditions définies aux articles R. 543-179 à R. 543-181 ; / 2° Aux dispositions envisagées en matière de réemploi des équipements électriques et électroniques ; / 3° Aux objectifs de valorisation des déchets et de recyclage et de réutilisation des composants, des matières et des substances ; / 4° Aux moyens qui seront mis en oeuvre pour satisfaire aux obligations d'information prévues aux articles R. 543-178 et R. 543-187 ; / 5° Au respect de ses obligations pour les déchets d'équipements électriques et électroniques ménagers ; / 6° A l'obligation de communiquer au ministre chargé de l'environnement un bilan annuel d'activité destiné à être rendu public, ainsi que les résultats obtenus en matière de réutilisation, de recyclage, de valorisation ou d'élimination des déchets d'équipements électriques et électroniques ; / 7° Aux objectifs de collecte annuels ; / 8° Aux modalités de reprise gratuite des déchets d'équipements électriques et électroniques issus des activités de réemploi et de réutilisation des acteurs de l'économie sociale et solidaire ; / 9° A la modulation du niveau des contributions des producteurs adhérant à l'organisme en fonction de critères d'écoconception des produits liés à leur réparabilité, réemploi, dépollution et recyclabilité et, dans la mesure où un lien avec la prévention de la production de déchets peut être établi, leur durée de vie ; / 10° A la mise en oeuvre du mécanisme d'équilibrage en application de l'article R. 543-188. / L'agrément est délivré pour une durée maximale de six ans renouvelable. / L'arrêté prévu à l'article R. 543-183 précise les conditions dans lesquelles l'agrément est délivré ainsi que les conditions dans lesquelles il peut y être mis fin en cas de manquement du titulaire à ses engagements " ;

4. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance, par l'arrêté litigieux, de l'autorité qui s'attache à l'ordonnance du 5 février 2015 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 31 décembre 2014 rejetant la demande d'agrément en tant qu'éco-organisme de la société European Recycling Platform et, d'autre part, enjoint aux ministres compétents de réexaminer sa demande, est nouveau en cassation et, par suite, inopérant ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions du quatrième alinéa du II de l'article L. 541-10 du code de l'environnement citées au point 3, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, que l'instance représentative des parties prenantes de la filière rend un avis sur le cahier des charges fixant les exigences conditionnant la délivrance de l'agrément des éco-organismes et non sur chaque décision d'agrément ou de refus d'agrément prise par l'Etat ; que, dès lors, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que n'était pas de nature à créer un doute sérieux le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait méconnu les dispositions de l'article L. 541-10 du code de l'environnement, faute d'avoir été précédé d'un tel avis ;

6. Considérant, en troisième lieu, que la société requérante ne pouvait utilement se prévaloir, pour contester l'arrêté litigieux, de ce que le refus de lui délivrer l'agrément demandé aurait eu pour effet d'accroître la position dominante d'une autre société agréée en tant qu'éco-organisme sur le marché de l'enlèvement et du traitement des déchets d'équipements électriques et électroniques ménagers ; que, dès lors, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit, ni entaché son ordonnance d'une dénaturation des pièces du dossier en estimant que ce moyen n'était pas de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'en jugeant que n'était pas de nature à créer un doute sérieux le moyen tiré de l'erreur d'appréciation à avoir considéré que la société requérante ne justifiait pas des capacités techniques et financières pour être agréée en tant qu'éco-organisme conformément aux dispositions citées au point 3, le juge des référés s'est livré à une appréciation souveraine des faits de l'espèce exempte de dénaturation ;

8. Considérant, enfin, qu'en estimant que n'était pas de nature à créer un doute sérieux le détournement de pouvoir allégué par la société requérante, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit et a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société European Recycling Platform n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société European Recycling Platform est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société European Recycling Platform, à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, au ministre de l'intérieur et au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 391238
Date de la décision : 09/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2016, n° 391238
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: M. Xavier De Lesquen
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:391238.20160609
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