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08/06/2016 | FRANCE | N°380624

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 08 juin 2016, 380624


Vu la procédure suivante :

La société Movitex SA a demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de majorations, qui lui ont été réclamés au titre de la période correspondant aux années 2005 et 2006. Par les articles 1er et 2 d'un jugement n° 1009216 du 5 janvier 2012, le tribunal a dit n'y avoir plus lieu de statuer sur cette demande, en tant qu'elle portait sur le rappel établi au titre de la période correspondant à l'année 2005 et rejeté le surplus des conclusions de la société.

Par un arrêt

n° 12VE00829 du 13 mars 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rej...

Vu la procédure suivante :

La société Movitex SA a demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de majorations, qui lui ont été réclamés au titre de la période correspondant aux années 2005 et 2006. Par les articles 1er et 2 d'un jugement n° 1009216 du 5 janvier 2012, le tribunal a dit n'y avoir plus lieu de statuer sur cette demande, en tant qu'elle portait sur le rappel établi au titre de la période correspondant à l'année 2005 et rejeté le surplus des conclusions de la société.

Par un arrêt n° 12VE00829 du 13 mars 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société contre l'article 2 de ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mai et 26 août 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Movitex SA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 modifiée ainsi que la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Timothée Paris, maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la société Movitex SA ;

1. Considérant que l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts, avant son abrogation au 1er janvier 2008, excluait du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée due par un assujetti, la taxe ayant grevé les biens cédés par cet assujetti sans rémunération ou moyennant une rémunération très inférieure à leur prix normal, notamment à titre de commission, salaire, gratification, rabais, bonification, cadeau et quelle que fût la qualité du bénéficiaire ou la forme de la distribution, sauf quand il s'agissait de biens de très faible valeur ; que l'article 28-00 A de l'annexe IV au même code, dans sa rédaction en vigueur pendant l'année 2006, fixait à 60 euros, toutes taxes comprises, la valeur par objet et par an, pour un même bénéficiaire, en deçà de laquelle un bien devait être regardé comme de très faible valeur, au sens de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Movitex SA, qui a pour activité la vente à distance d'articles textiles, a notamment déduit de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable pour l'année 2006, au titre de cette activité, la taxe ayant grevé l'achat de l'ensemble des articles promotionnels qu'elle remettait à ses clients, sous la désignation commerciale de cadeaux, lorsque ceux-ci acquéraient à titre onéreux un ou plusieurs des articles proposés à la vente sur le catalogue de la société ou lorsqu'ils lui présentaient de nouveaux clients potentiels, sous la forme d'un parrainage ; qu'à l'issue d'une vérification de la comptabilité de la société, l'administration fiscale a estimé que ceux de ces articles promotionnels dont la valeur toutes taxes comprises, telle qu'indiquée par la société sur ses supports publicitaires et bons de commande, était supérieure à 60 euros, entraient dans le champ des dispositions de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts mentionné ci-dessus ; qu'elle a, en conséquence, refusé la déduction de la taxe ayant grevé l'achat de ces articles ; que le complément d'imposition restant en litige devant le juge de l'impôt procède, en droits et majorations, de cette rectification ;

3. Considérant que, pour apprécier si la société bénéficiait d'une contrepartie à la remise d'articles promotionnels lors de la présentation de nouveaux clients, opération qui constitue par elle-même une prestation de service, et juger que la remise de ces articles ne concourait pas à la réalisation des opérations taxables de la contribuable, la cour ne pouvait utilement se fonder sur le fait que ces articles étaient acquis aux parrains avant que les nouveaux clients présentés ne procèdent eux-mêmes à un achat ; qu'elle a entaché son arrêt sur ce point d'une erreur de droit ;

4. Considérant, par ailleurs, que si, pour procéder à la même appréciation pour les articles promotionnels remis aux clients ayant passé commande à la société, la cour pouvait utilement relever que les articles ainsi remis pouvaient être conservés par tout client ayant retourné l'article principal figurant sur le bon de commande, elle ne pouvait se fonder sur cette seule circonstance pour juger que la remise des articles promotionnels aux clients ayant passé commande ne concourait pas à la réalisation d'opérations taxables de la société ; qu'elle s'est au demeurant fondée également sur deux autres motifs tirés, le premier, de ce que " le prix des articles commandés était inchangé si l'acheteur refusait le cadeau " et, le second, de ce que " la marge de l'entreprise était automatiquement diminuée en cas de remise effective des cadeaux " ; que les faits qu'elle a ainsi relevés étaient cependant sans influence sur l'appréciation qu'elle avait à porter ; qu'ainsi, la cour a également entaché son arrêt sur ce point d'une erreur de droit ;

5. Considérant qu'il résulte tout ce qui précède que la société Movitex est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société Movitex, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 13 mars 2014 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera à la société Movitex une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Movitex SA et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 380624
Date de la décision : 08/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2016, n° 380624
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Timothée Paris
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:380624.20160608
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