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15/04/2016 | FRANCE | N°394256

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 15 avril 2016, 394256


Vu la procédure suivante :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 29 mars 2015 pour l'élection des conseillers départementaux dans le canton de Castanet-Tolosan (Haute-Garonne) et à l'issue desquelles ont été proclamés élus M. H...I...et Mme F...G.... Par un jugement n° 1501627 du 30 septembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a annulé ces opérations électorales.

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 octobr

e 2015, 26 novembre 2015 et 18 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil ...

Vu la procédure suivante :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 29 mars 2015 pour l'élection des conseillers départementaux dans le canton de Castanet-Tolosan (Haute-Garonne) et à l'issue desquelles ont été proclamés élus M. H...I...et Mme F...G.... Par un jugement n° 1501627 du 30 septembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a annulé ces opérations électorales.

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 octobre 2015, 26 novembre 2015 et 18 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. I...et Mme G...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du 30 septembre 2015 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de rejeter la protestation de M.C... ;

3°) de mettre à la charge de M. C...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Puigserver, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue du second tour des élections départementales dans le canton n° 4 (Castanet-Tolosan) du département de la Haute-Garonne, le 29 mars 2015, M. H...I...et Mme F...G...ont été proclamés élus, avec 50,04 % des suffrages exprimés, soit 8 148 voix, l'autre binôme de candidats, composé de Mme J...E...et de M. D...C..., ayant obtenu 49,96 % des suffrages exprimés, soit 8 134 voix. Par un jugement du 30 septembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a annulé ces opérations électorales, à la demande de M.C..., au motif que dix-sept suffrages contestés devaient être regardés comme ayant été irrégulièrement émis, faute d'être attestés par les signatures figurant sur les listes d'émargement, excédant ainsi l'écart de quatorze voix qui séparait les deux binômes de candidats.

Sur la régularité des émargements :

2. Aux termes de l'article L. 62-1 du code électoral : " (...) Le vote de chaque électeur est constaté par sa signature apposée à l'encre en face de son nom sur la liste d'émargement ". Aux termes de l'article L. 64 du même code : " (...) Lorsqu'un électeur se trouve dans l'impossibilité de signer, l'émargement prévu par le troisième alinéa de l'article L. 62-1 est apposé par un électeur de son choix qui fait suivre sa signature de la mention suivante : "l'électeur ne peut signer lui-même" ". Aux termes de l'article R. 76 de ce code : " A la réception d'une procuration dont la validité n'est pas limitée à un seul scrutin, le maire inscrit sur la liste électorale, à l'encre rouge, à côté du nom du mandant, celui du mandataire (...) / Les indications portées à l'encre rouge sur la liste électorale sont reproduites sur la liste d'émargement. / A la réception d'une procuration valable pour un seul scrutin, le maire porte ces indications sur la liste d'émargement seulement (...) ". Il résulte de ces dispositions, destinées à assurer la sincérité des opérations électorales, que seule la signature personnelle, à l'encre, d'un électeur est de nature à apporter la preuve de sa participation au scrutin, sauf cas d'impossibilité dûment reportée sur la liste d'émargement. Ainsi, la constatation d'un vote par l'apposition, sur la liste d'émargement, soit d'une croix, soit d'une signature qui présente des différences manifestes d'un tour de scrutin à l'autre sans qu'il soit fait mention d'un vote par procuration, ne peut être regardée comme garantissant l'authenticité de ce vote.

4. Il résulte de l'instruction que, parmi les dix-sept suffrages regardés comme irréguliers par le tribunal, les signatures des électeurs ayant voté sous les nos 202 dans la commune de Mervilla, 1 562 dans la commune d'Auzeville-Tolosane, 355 et 1005 dans le bureau de vote n° 1 de la commune de Péchabou et 1993 dans le bureau n° 2 de la commune de Lacroix-Falgarde présentent des différences significatives entre les deux tours de scrutin, sans que cette différence soit justifiée par les mentions portées sur la liste d'émargement. Or, s'agissant des deux premiers, aucune attestation de leur part accompagnée d'un document d'identité n'a été produite pour justifier de l'authenticité des signatures apposées sur la liste d'émargement. S'agissant des autres électeurs, s'ils attestent avoir voté par procuration au second tour de scrutin, aucune mention en ce sens n'a été portée sur la liste d'émargement, en méconnaissance de l'article R. 76 du code électoral. C'est donc à bon droit que le tribunal a jugé que ces votes avaient été irrégulièrement émis.

5. Doivent en outre être regardés comme irréguliers les votes des électeurs ayant voté sous le n° 861 dans le bureau n° 1 de la commune de Péchabou et sous le n° 526 dans la commune d'Auzielle, qui attestent avoir voté par procuration au second tour de scrutin, sans toutefois qu'aucune mention en ce sens ait été portée sur la liste d'émargement, en méconnaissance de l'article R. 76 du code électoral.

6. En revanche, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, il résulte de l'examen des listes d'émargement que les signatures des électeurs ayant voté sous les n°s 510 et 1116 dans le bureau n° 1 de la commune Lacroix-Falgarde, sous le n° 3 dans la commune de Mervilla, sous le n° 1040 dans la commune d'Auzielle et sous le n° 508 dans la commune d'Aureville ne présentent pas de différences significatives d'un tour de scrutin à l'autre. Si les signatures des électeurs ayant voté sous le n° 45 à Mervilla et sous le n° 294 à Rebigue présentent des différences significatives, celles-ci s'expliquent par l'utilisation successive d'un paraphe et de la signature complète et sont justifiées par les attestations et les documents d'identité produits. De même, les différences significatives que présentent, entre les deux tours, les signatures des électrices ayant voté sous le n° 1713 dans le bureau n° 2 de la commune de Lacroix-Falgarde et sous le n° 142 à Aureville, qui s'expliquent par l'utilisation successive d'un nom d'épouse et d'un nom de jeune fille, sont justifiées par les attestations et les documents d'identité produits. Les différences affectant les signatures des électeurs ayant voté sous les nos 29 et 63 dans la commune de Rebigue, qui s'expliquent, dans le premier cas, par la difficulté de l'électeur, très âgé, à écrire et, dans le second, par l'utilisation de deux signatures, sont également justifiées par les attestations et les documents d'identité produits. Enfin, si les signatures des électeurs ayant voté sous le n° 23 à Mervilla et sous le n° 1 à Goyrans présentent des différences significatives entre les deux tours, celles-ci s'expliquent par l'erreur commise par un autre électeur ayant signé en face de leur nom au premier tour de scrutin et la signature figurant sur la liste d'émargement pour le second tour est, pour chacun d'eux, identique à celle figurant sur la copie du document d'identité produite à l'appui de l'attestation par laquelle ils assurent être l'auteur de leur vote.

7. De même, il résulte de l'examen des listes d'émargement que les signatures des électeurs ayant voté sous les nos 617 et 702 dans le bureau n° 1 de la commune de Lacroix-Falgarde, sous les nos 1449, 1457, 1459 et 1470 dans le bureau n° 2 de la même commune, sous les nos 182 et 249 dans le bureau n° 2 de la commune de Labège, sous les nos 291 et 1134 dans la commune d'Auzielle, sous le n° 263 dans la commune d'Aureville, sous les nos 1388, 1582 et 2170 dans le bureau n° 1 de la commune d'Auzeville-Tolosane, sous les nos 223 et 350 dans la commune de Rebigue, sous les nos 373, 889 et 1750 dans le bureau n° 1 de la commune de Péchabou et sous les nos 127, 1400 et 1616 dans le bureau n° 2 de la même commune ne présentent pas de différences significatives entre les deux tours. Tel est le cas, également, des signatures des électeurs ayant voté sous le no 765 dans la commune de Vieille-Toulouse et sous le n° 118 dans le bureau n° 1 de la commune de Saint-Orens-de-Gameville, en dépit de la présence, dans l'emplacement réservé au second tour, pour l'un, d'un début de signature raturée de l'électeur votant sous le n° 764 et, pour l'autre, de la signature rayée de l'électeur votant sous le n° 122 dans le même bureau de vote.

8. Si les signatures apposées en face des noms des électeurs votant sous les nos 72 et 532 dans le bureau n° 2 de la commune de Labège et sous le n° 2355 dans le bureau n° 1 de la commune d'Auzeville diffèrent significativement selon le tour de scrutin, cette différence s'explique par la circonstance que ces électeurs ont voté par procuration à l'un des deux tours, conformément aux mentions figurant sur la liste d'émargement. Les différences de signatures, entre les deux tours, des électeurs votant sous les nos 566 et 1457 dans le bureau n° 1 de la commune de Lacroix-Falgarde, qui s'expliquent par l'erreur commise par les électeurs votant sous les nos 569 et 1460 sur l'emplacement qui leur était réservé au second tour, sont justifiées par les documents produits. De même, les différences affectant les signatures, selon le tour de scrutin, de l'électeur votant sous le n° 575 dans le bureau n° 1 de la commune d'Auzeville-Tolosane, qui s'expliquent par l'erreur commise par l'électeur n° 577 quant à l'emplacement de sa signature au premier tour, sont justifiées par les attestations et documents d'identité produits. Les différences significatives que présentent, entre les deux tours, les signatures des électeurs ayant voté sous les nos 764 dans le bureau n° 1 de Lacroix-Falgarde et 566 et 1359 dans le bureau n° 1 de la commune d'Auzeville, qui s'expliquent par l'utilisation alternative d'un paraphe et de la signature complète, sont justifiées par les attestations et les documents d'identité produits. Les signatures des électeurs ayant voté sous les nos 2347 dans le bureau n° 1 de la commune d'Auzeville-Tolosane, 1977 dans le bureau n° 2 de la même commune et 2006 dans le bureau n° 2 de la commune de Péchabou sont authentifiées par les documents d'identités produits. Enfin, si les signatures de l'électeur ayant voté sous le n° 115 à Mervilla, qui est le maire de la commune, présentent des différences significatives selon le tour de scrutin, la signature figurant sur la liste d'émargement pour le second tour est identique à celle figurant sur la copie des divers documents officiels produits.

9. La circonstance que la signature figurant en face du nom de l'électeur votant sous le n° 93 dans la commune de Mervilla a été raturée au premier tour est sans incidence sur les résultats du scrutin au second tour, auquel cet électeur n'a d'ailleurs pas participé. De même, il résulte de l'instruction que si une signature a été apposée par erreur puis rayée, ainsi qu'en attestent les mentions portées sur la liste d'émargement, en face du nom de l'électeur n° 924 de la commune de Vieille-Toulouse, dans la case réservée au second tour, cette erreur est restée sans incidence sur les résultats du scrutin. La circonstance que, sur la feuille d'émargement du bureau de vote n° 5 de la commune de Saint-Orens, figurent, au second tour, deux signatures identiques s'explique par la procuration donnée par l'électeur votant sous le n° 298 à celui votant sous le n° 297, ainsi que la mention en est faite sur la liste d'émargement. Le vote de l'électrice ayant voté sous le n° 388 dans le bureau n° 7 de la commune de Saint-Orens n'est pas entaché d'irrégularité du seul fait que celle-ci a apposé, dans l'emplacement réservé au second tour, ses deux signatures, correspondant à son nom de jeune fille et à son nom d'épouse. La circonstance que, dans le bureau n° 3 de la commune de Labège, l'un des membres du bureau de vote ait par erreur, pour une quarantaine d'électeurs, au fur et à mesure de leur vote à l'occasion premier tour de scrutin, coché sur la liste d'émargement l'emplacement réservé au second tour, ainsi que le mentionnent les observations portées au procès-verbal des opérations électorales, est sans incidence sur les résultats du scrutin. Enfin, si, lors du premier tour de scrutin, dans le bureau n° 2 de la commune d'Auzeville-Tolosane, le vote des mandataires ayant reçu procuration des électeurs votant sous les nos 787, 1491, 1642 et 2075 n'a pas été constaté par leur signature sur la liste d'émargement en face du nom de leur mandant, mais par leur signature du registre des procurations assortie d'une simple mention sur la liste d'émargement, cette irrégularité est, elle aussi, restée sans incidence sur les résultats du scrutin du second tour.

10. Il résulte de ce qui précède que seuls les votes de sept électeurs doivent être regardés comme ayant été irrégulièrement émis lors des opérations électorales qui se sont déroulées dans le canton de Castanet-Tolosan, le 29 mars 2015, en raison d'irrégularités affectant les émargements. Ces sept suffrages doivent être hypothétiquement déduits du nombre des voix obtenues par le binôme constitué par M. I...et par MmeG.... Compte tenu de l'écart de quatorze voix qui sépare ce binôme de l'autre binôme de candidats présent au second tour, ces irrégularités ne peuvent être regardées comme ayant altéré la sincérité du scrutin. C'est donc à tort que le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur le nombre de votes irréguliers pour annuler ces opérations électorales.

11. Toutefois, il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige en vertu des principes applicables au jugement des litiges en appel, d'examiner les autres griefs soulevés par M. C...dans sa protestation devant le tribunal administratif de Toulouse.

Sur les électeurs ayant qualité pour participer au scrutin :

12. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'électeur n° 188 du bureau n° 2 de la commune de Labège, radié sous ce numéro, a été réinscrit sous le n° 2627, ainsi qu'en atteste le maire de la commune, et que son vote dans ce bureau est ainsi régulier.

13. En second lieu, l'article R. 18 du code électoral dispose que : " Lorsqu'un électeur est décédé, son nom est rayé de la liste électorale aussitôt que l'acte de décès a été dressé dans la commune ou communiqué au maire (...) ". Il suit de là que la diminution du nombre d'électeurs inscrits sur les listes électorales des communes de Saint-Orens-de-Gameville et de Rebigue entre le premier et le second tours de scrutin, du fait de la radiation d'électeurs décédés, ne révèle aucune manoeuvre.

Sur le déroulement du scrutin :

14. En premier lieu, lorsque le nombre d'enveloppes trouvées dans l'urne excède, dans un bureau de vote, le nombre des émargements, il y a lieu, quelle que soit l'origine de cette discordance, de retrancher hypothétiquement les suffrages irrégulièrement émis du nombre des suffrages exprimés et de celui des voix obtenues par les candidats proclamés élus. Lorsque, à l'inverse, dans un bureau de vote, le nombre des émargements est supérieur au nombre de bulletins trouvés dans l'urne, sans que cette différence résulte d'une manoeuvre, il y a lieu, pour le calcul de la majorité et la détermination des candidats élus, de se fonder sur le nombre de bulletins trouvés dans l'urne.

15. Tout d'abord, il ne résulte pas de l'instruction que le nombre des émargements dans le bureau n° 1 de la commune de Lacroix-Falgarde et dans le bureau de vote de la commune de Rebigue, tel qu'il figure sur le procès-verbal des opérations électorales de ces bureaux, soit entaché d'erreur. Ensuite, si le procès-verbal des opérations électorales qui se sont déroulées dans le bureau n° 3 de la commune de Saint-Orens-de-Gameville fait apparaître à tort 421 suffrages exprimés au lieu de 420, cette erreur est restée sans incidence sur le nombre de voix comptabilisées au profit de chacun des deux binômes de candidats en compétition. Enfin, si le procès-verbal des opérations électorales qui se sont déroulées dans la commune d'Auzeville-Tolosane mentionne 678 émargements pour 677 enveloppes trouvées dans l'urne, seul ce dernier chiffre a été retenu pour déterminer les candidats élus.

16. En revanche, il résulte de l'examen des listes d'émargement des communes de Vieille-Toulouse, d'Auzielle, de Vigoulet-Auzil et du bureau n° 4 de la commune de Saint-Orens-de-Gameville que le nombre des émargements s'y élève respectivement à 584, 619, 510 et 414, alors que le nombre de bulletins trouvés dans l'urne atteint respectivement 585, 620 et 512 et 415. Il suit de là que, outre les sept suffrages mentionnés au point 10, cinq autres suffrages doivent être hypothétiquement retranchés du nombre des voix obtenues par le binôme constitué par M. I...et par MmeG.... Le nombre total des suffrages retranchés restant inférieur à l'écart de voix constaté au second tour en faveur du binôme de candidats proclamé élu, les irrégularités constatées n'ont pas eu d'incidence sur l'issue du scrutin.

17. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article R. 44 du code électoral que chaque binôme de candidats a le droit de désigner " un assesseur et un seul pris parmi les électeurs du département ". Par suite, la circonstance qu'une personne n'ayant pas la qualité d'électeur de la commune a siégé au sein du bureau de vote de la commune de Clermont-le-Fort n'a pas eu pour effet de rendre irrégulière la composition de ce bureau.

18. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 41 du code électoral : " Le scrutin est ouvert à huit heures et clos le même jour à dix-huit heures. / Toutefois, pour faciliter aux électeurs l'exercice de leur droit de vote, les préfets pourront prendre des arrêtés à l'effet d'avancer l'heure d'ouverture du scrutin ou de retarder son heure de clôture dans certaines communes (...) ". Aux termes de l'article L. 52-2 du même code : " En cas d'élections générales, aucun résultat d'élection, partiel ou définitif, ne peut être communiqué au public par la voie de la presse ou par tout moyen de communication au public par voie électronique, en métropole, avant la fermeture du dernier bureau de vote sur le territoire métropolitain (...) ". Enfin, l'article R. 67 de ce code prévoit que : " Immédiatement après la fin du dépouillement, le procès-verbal des opérations électorales est rédigé par le secrétaire dans la salle de vote, en présence des électeurs. (...) Dès l'établissement du procès-verbal, le résultat est proclamé en public par le président du bureau de vote et affiché en toutes lettres par ses soins dans la salle de vote ".

19. Il résulte de l'instruction que, faisant application des dispositions citées ci-dessus du second alinéa de l'article R. 41 du code électoral, le préfet de la Haute-Garonne a décidé de fixer à 20 heures l'heure de clôture du scrutin dans les communes de Castanet-Tolosan et de Saint-Orens-de-Gameville, tandis que cette heure restait fixée à 18 heures pour les treize autres communes du canton. La circonstance que, dans la commune d'Auzeville, les résultats du scrutin ont été affichés peu avant 20 heures sur la porte de la mairie n'a pas constitué une irrégularité de nature à altérer la sincérité du scrutin dans les communes où il n'était pas encore clos.

Sur le déroulement de la campagne électorale :

20. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : " Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués ". Aux termes de l'article L. 49 du code électoral : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents. / A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est également interdit de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale ".

21. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, par un courrier adressé aux électeurs de la commune le 16 mars 2015, le maire de Labège s'est prononcé contre le refus de prolongation d'une ligne de métro jusqu'à sa commune, imputé au maire de Toulouse, en appelant ses administrés à participer aux élections départementales des 22 et 29 mars 2015, munis d'un badge relatif à ce projet, dans le but d'attirer l'attention des médias sur la situation de la commune. Ce courrier, qui n'appelait pas expressément à voter en faveur d'un binôme de candidats et qui, de ce fait, ne peut être regardé comme intéressant directement la campagne électorale, n'a pas été diffusé en violation des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral et n'a pas revêtu le caractère d'une manoeuvre ayant rompu l'égalité entre candidats et altéré la sincérité du scrutin.

22. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que Mme G...a participé, le 15 mars 2015, à une remise de récompenses à de jeunes sportifs, à la suite d'une compétition de football en salle organisée par un club sportif de la région. Toutefois, les conditions de participation à cet événement annuel n'ont pas, en l'absence de connotation électorale, présenté le caractère d'une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin ni d'un don consenti à un candidat par une personne morale, en méconnaissance de l'article L. 52-8 du code électoral. Si cet événement a été relaté dans la presse locale, y compris sur un site internet, la veille du scrutin du second tour, une telle intervention ne peut être regardée comme la diffusion d'un message ayant le caractère de propagande électorale, en violation des dispositions de l'article L. 49 du même code.

23. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que Mme G...a participé, le 19 mars 2015, aux côtés de M. B...A..., ancien ministre et député de la circonscription, à une manifestation organisée par une association d'anciens combattants pour la commémoration du 53ème anniversaire de la guerre d'Algérie, dont la presse locale s'est fait l'écho. Toutefois, en raison de l'absence de connotation électorale de cet événement, organisé les années précédentes à la même date, cette participation n'a constitué, dans les circonstances de l'espèce, ni une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin ni un don consenti par une personne morale en violation de l'article L. 52-8 du code électoral.

24. Il résulte de tout ce qui précède que M. I...et Mme G...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé les opérations électorales contestées. Dans ces conditions, ce jugement doit être annulé et il n'est pas nécessaire pour le Conseil d'Etat de se prononcer sur sa régularité.

25. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. I...et Mme G...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 septembre 2015 est annulé.

Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées le 29 mars 2015 pour l'élection des conseillers départementaux dans le canton de Castanet-Tolosan (Haute-Garonne) sont validées.

Article 3 : La protestation de M. C...est rejetée.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. I...et Mme G...est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. H...I..., à Mme F...G..., à Mme J...E..., à M. D...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 394256
Date de la décision : 15/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 2016, n° 394256
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Puigserver
Rapporteur public ?: M. Jean Lessi

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:394256.20160415
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