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04/03/2016 | FRANCE | N°387280

France | France, Conseil d'État, 1ère ssjs, 04 mars 2016, 387280


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des chirurgiens de France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2014-1374 du 18 novembre 2014 relatif au contenu des contrats d'assurance maladie complémentaire bénéficiant d'aides fiscales et sociales ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l

e code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 ;

- la loi n° 2014-89...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des chirurgiens de France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2014-1374 du 18 novembre 2014 relatif au contenu des contrats d'assurance maladie complémentaire bénéficiant d'aides fiscales et sociales ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 ;

- la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Thoumelou, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. L'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale subordonne le bénéfice des aides fiscales et sociales applicables à certains contrats d'assurance complémentaire en matière de santé à la condition notamment que les opérations d'assurance concernées respectent des règles fixées par décret en Conseil d'Etat après avis de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire. Aux termes du quatrième alinéa de cet article, dans sa rédaction, applicable au litige, issue de la loi du 8 août 2014, ces règles " fixent les conditions dans lesquelles peuvent être pris en charge les dépassements tarifaires sur les consultations et les actes des médecins, en distinguant, le cas échéant, ceux des médecins ayant adhéré au contrat d'accès aux soins instauré par la convention nationale mentionnée à l'article L. 162-5 de ceux des médecins non adhérents. Elles fixent également les conditions dans lesquelles peuvent être pris en charge les frais exposés, en sus des tarifs de responsabilité, pour les soins dentaires prothétiques ou d'orthopédie dentofaciale et pour certains dispositifs médicaux à usage individuel admis au remboursement, notamment les dispositifs d'optique médicale. Ces conditions peuvent comprendre des plafonds de prise en charge distincts par catégorie de prestations notamment ainsi que, s'agissant des soins dentaires prothétiques ou d'orthopédie dentofaciale et de certains dispositifs médicaux à usage individuel, des niveaux minimaux de prise en charge ".

2. Eu égard aux moyens qu'elle soulève, l'Union des chirurgiens de France doit être regardée comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 18 novembre 2014 relatif au contenu des contrats d'assurance maladie complémentaire bénéficiant d'aides fiscales et sociales en tant que, par son article 2, il introduit, au sein de l'article R. 871-2 du code de la sécurité sociale, un 2° prévoyant, lorsque cette garantie est proposée, la prise en charge " des dépassements tarifaires des médecins n'ayant pas adhéré au contrat d'accès aux soins prévu par la convention nationale mentionnée à l'article L. 162-5, dans la double limite de 100 % du tarif de responsabilité et du montant pris en charge pour les dépassements des médecins ayant adhéré au contrat d'accès aux soins minoré d'un montant égal à 20 % du tarif de responsabilité " et en tant qu'à son article 4, il prévoit que " la limite de 100 % est portée à 125 % pour les soins délivrés en 2015 et en 2016 ".

Sur la légalité externe des dispositions attaquées :

3. En premier lieu, il résulte des termes mêmes des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale citées ci-dessus que le pouvoir réglementaire, agissant par voie de décret en Conseil d'Etat, est compétent pour définir les conditions de prise en charge, par les contrats d'assurance maladie complémentaire bénéficiant d'une aide fiscale ou sociale, des dépassements tarifaires sur les consultations et les actes des médecins. Par suite, le syndicat requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, relatif aux rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins, pour contester la compétence du Premier ministre pour modifier, ainsi qu'il l'a fait par le décret attaqué, l'article R. 871-2 du même code fixant ces conditions.

4. En second lieu, si l'Union des chirurgiens de France soutient que le décret attaqué n'aurait pas été précédé de la consultation de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, en méconnaissance de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale, il ressort des pièces du dossier que cet organisme a été saisi du projet de décret et a rendu son avis le 18 septembre 2014. Le moyen doit, par suite, être écarté comme manquant en fait.

Sur la légalité interne des dispositions attaquées :

5. En premier lieu, la légalité d'un acte administratif s'appréciant à la date à laquelle il a été pris, le syndicat requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que le décret attaqué du 18 novembre 2014 méconnaîtrait l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 2016. Au demeurant, les modifications de coordination apportées à l'article L. 871-1 par le H du II de l'article 22 de la loi du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015 ne portent pas sur le quatrième alinéa de cet article, sur le fondement duquel les dispositions attaquées ont été édictées.

6. En deuxième lieu, les dispositions de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale permettent au pouvoir réglementaire de fixer des plafonds de prise en charge des dépassements tarifaires sur les consultations et les actes des médecins, en distinguant selon que les médecins ont ou non adhéré au contrat d'accès aux soins instauré par la convention nationale définissant les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins. Si elles lui permettent également de distinguer ces plafonds de prise en charge par " catégorie de prestations ", ces dispositions lui ouvrent ainsi une simple faculté et ne subordonnent aucunement la fixation de plafonds différents selon que les médecins ont ou non adhéré au contrat d'accès aux soins à une modulation de ces plafonds selon les catégories de prestations. Par suite, l'Union des chirurgiens de France n'est pas fondée à soutenir que le pouvoir réglementaire aurait méconnu les dispositions de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale en ne distinguant pas la prise en charge des dépassements tarifaires sur les consultations et les actes des médecins selon des catégories de prestations.

7. En troisième lieu, d'une part, le principe d'une distinction, pour la prise en charge des dépassements tarifaires sur les consultations et les actes des médecins, selon que les médecins ont ou non adhéré au contrat d'accès aux soins instauré par la convention nationale définissant les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins résulte des dispositions de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la différence de traitement résultant des conditions de prise en charge fixées par le décret attaqué serait manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi par le législateur, qui est d'éviter la prise en charge par les organismes d'assurance complémentaires des dépassements tarifaires d'un montant excessif. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité entre les patients, selon que le médecin consulté a ou non adhéré au contrat d'accès aux soins, doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que l'Union des chirurgiens de France n'est pas fondée à demander l'annulation des dispositions qu'elle attaque du décret du 18 novembre 2014.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'Union des chirurgiens de France est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union des chirurgiens de France, au Premier ministre et à la ministre des affaires sociales et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère ssjs
Numéro d'arrêt : 387280
Date de la décision : 04/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 mar. 2016, n° 387280
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc Thoumelou
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:387280.20160304
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