Vu la procédure suivante :
La Communauté d'agglomération de la région de Compiègne (ARC) a demandé au jugé des référés du tribunal administratif d'Amiens statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative de suspendre la décision du 28 septembre 2015 de la préfète de la région Picardie refusant d'autoriser des fouilles sur le site de l'école d'Etat-major de Compiègne.
Par une ordonnance n° 1503031 du 17 novembre 2015 le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens, a suspendu la décision du 28 septembre 2015.
Par un pourvoi, un mémoire en production et un mémoire en réplique enregistrés le 3 décembre 2015, le 28 décembre 2015 et le 13 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de la culture et de la communication demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 17 novembre 2015 du juge des référés du tribunal administratif d'Amiens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du patrimoine ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Arno Klarsfeld, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Communauté d'agglomération de la région de Compiègne ;
1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que par décision du 28 septembre 2015, la préfète de la région Picardie a refusé à la communauté d'agglomération de la région de Compiègne (ARC), l'autorisation d'effectuer les fouilles prescrites par l'arrêté préfectoral du 13 mai 2014, portant sur le réaménagement du site de l'école d'état-major de Compiègne ; que la communauté d'agglomération a saisi le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens d'une demande tendant à la suspension de la décision de la préfète ; que la ministre de la culture et de la communication se pourvoit contre l'ordonnance du 17 novembre 2015 ayant fait droit à cette demande ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 523-8 du code du patrimoine : " La réalisation des opérations de fouilles d'archéologie préventive mentionnées à l'article L. 522-1 incombe à la personne projetant d'exécuter les travaux ayant donné lieu à la prescription. Celle-ci fait appel, pour leur mise en oeuvre, soit à l'établissement public mentionné à l'article L. 523-1, soit à un service archéologique territorial, soit, dès lors que sa compétence scientifique est garantie par un agrément délivré par l'Etat, à toute autre personne de droit public ou privé. " ; qu'aux termes de l'article L. 523-9 du même code : " (...). / L'Etat autorise les fouilles après avoir contrôlé la conformité du contrat mentionné au premier alinéa avec les prescriptions de fouilles édictées en application de l'article L. 522.2. " ; qu'aux termes de l'article R. 523-21 de ce code : " Lorsque des opérations sont réalisées par tranches successives, le calendrier prévisionnel de leur réalisation est communiqué au préfet de région qui peut décider de prescrire les mesures prévues à l'article R. 523.15 soit pour la totalité du projet, soit lors de l'exécution de chaque tranche. Dans ce dernier cas, il définit par arrêté les délais de sa saisine et la nature des documents à fournir. (...). " ; et qu'enfin aux termes de l'article R. 523-39 dudit code : " Lorsque le préfet de région prescrit, dans les conditions prévues par l'article R. 523-19, la réalisation d'une fouille, il assortit son arrêté de prescription d'un cahier des charges scientifique qui : (...) 3° Définit la nature prévisible des travaux nécessités par l'opération archéologique. Le cahier des charges scientifique en indique, le cas échéant, la durée minimale et fournit une composition indicative de l'équipe ; (...). " ;
4. Considérant qu'en application des dispositions susmentionnées, par arrêté du 13 mai 2014, la préfète de la région Picardie a imposé la réalisation d'une fouille archéologique préventive sur les terrains qui font l'objet du réaménagement faisant suite au transfert de l'école d'état-major et que pour réaliser ces fouilles, l'ARC a conclu un marché public de travaux avec la société Evéha le 7 novembre 2014 ; que pour refuser l'autorisation d'engager lesdites fouilles, la préfète de la région Picardie a d'une part, opposé le fait que les moyens humains prévus par le projet scientifique d'intervention pour réaliser ces fouilles, joint à la demande d'autorisation, étaient très insuffisants pour réaliser correctement la fouille prescrite et d'autre part, relevé que le contrat avait transformé en tranches conditionnelles des secteurs de fouilles prévus en tranche ferme alors que ces secteurs opérationnels ne pouvaient être regardés comme pouvant faire l'objet d'options éventuelles de fouilles ;
5. Considérant que, pour suspendre la décision du 28 septembre 2015 par laquelle la préfète de la région Picardie a refusé à la communauté d'agglomération de la région de Compiègne (ARC), l'autorisation d'effectuer les fouilles prescrites par l'arrêté préfectoral du 13 mai 2014, le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens, après avoir estimé que la condition d'urgence était remplie a jugé qu'il résultait des dispositions de l'article R. 523-21 du code du patrimoine et du cahier des charges scientifique de la fouille archéologique préventive à réaliser, que le découpage des travaux par tranche était possible et que le contrat conclu avec Eheva pouvait comporter une ou plusieurs tranches conditionnelles alors qu'il résulte de l'article L. 522-1 du code du patrimoine que c'est l'Etat qui " prescrit les mesures visant à la détection, à la conservation ou à la sauvegarde par l'étude scientifique du patrimoine archéologique " et qu'il résulte du cahier des charges scientifique que la prescription valait pour la totalité de l'aménagement, que le juge des référés a ainsi en jugeant, d'une part, que l'aménageur était en droit de modifier en se substituant à l'autorité compétente la nature des tranches de travaux telles qu'elles avaient été prévues dans la prescription d'origine et, d'autre part, que l'Etat ne pouvait imposer à l'aménageur les moyens humains nécessaires alors que le refus d'autorisation était fondé sur l'inadéquation entre les moyens humains définis par le marché et l'importance des fouilles à réaliser, commis des erreurs de droit ; que par la suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 16 février 2015 du juge des référés du tribunal administratif d'Amiens est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la ministre de la culture et de la communication et à la Communauté d'agglomération de la région de Compiègne.