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15/02/2016 | FRANCE | N°391159

France | France, Conseil d'État, 2ème / 7ème ssr, 15 février 2016, 391159


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse a demandé au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 9-1 et le 5° du A de l'article 12 du décret n° 2007-628 du 27 avril 2007 relatif aux fromages et spécialités fromagères, issus du décret n° 2013-1010 du 12 novembre 2013. Par une décision n° 374602 du 17 avril 2015 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé la seconde phrase du premier alinéa de l'article 9-1 et le 5° du A de l'article 12 du décret d

u 27 avril 2007.

Recours en tierce opposition :

Par un requête sommaire en ti...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse a demandé au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 9-1 et le 5° du A de l'article 12 du décret n° 2007-628 du 27 avril 2007 relatif aux fromages et spécialités fromagères, issus du décret n° 2013-1010 du 12 novembre 2013. Par une décision n° 374602 du 17 avril 2015 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé la seconde phrase du premier alinéa de l'article 9-1 et le 5° du A de l'article 12 du décret du 27 avril 2007.

Recours en tierce opposition :

Par un requête sommaire en tierce opposition et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juin et 18 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) de déclarer non avenue sa décision n° 374602 du 17 avril 2015 ;

2°) de rejeter la requête de l'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse ;

3°) de mettre à la charge de l'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse le paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de la consommation ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres ;

Sur la tierce opposition :

1. Considérant qu'en vertu de l'article R. 832-1 du code de justice administrative, toute personne qui n'a été ni appelée, ni représentée dans l'instance peut former tierce opposition à une décision du Conseil d'Etat rendue en matière contentieuse ; que cette voie de rétractation est ouverte à ceux qui se prévalent d'un droit auquel la décision entreprise aurait préjudicié ;

2. Considérant que, par une décision en date du 17 avril 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé, à la demande de l'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse, la seconde phrase du premier alinéa de l'article 9-1 et le 5° du A de l'article 12 du décret du 27 avril 2007 relatif aux fromages et spécialités fromagères issus du décret n° 2013-1010 du 12 novembre 2013 ; que la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres, qui, en vertu des dispositions annulées, pouvaient faire usage de la mention " fromage fermier " pour des fromages, même affinés en dehors de l'exploitation, étaient bénéficiaires directs de ces dispositions ; qu'ils n'ont été ni présents, ni représentés à l'instance, la requête ne leur ayant pas été communiquée ; que, dans ces conditions, leur tierce opposition est recevable ;

Sur la légalité des dispositions attaquées :

3. Considérant que le premier alinéa de l'article 9-1 du décret du 27 avril 2007, réserve, dans sa première phrase, la dénomination " fromage fermier ", ou tout autre qualificatif laissant entendre une origine fermière, " à un fromage fabriqué selon les techniques traditionnelles par un producteur agricole ne traitant que les laits de sa propre exploitation sur le lieu même de celle-ci " ; que, toutefois, aux termes de la seconde phrase de ce premier alinéa : " Lorsque l'affinage a lieu en dehors de l'exploitation, l'étiquetage comporte les mentions prévues au 5° du A de l'article 12 " ; que l'article 12 du même décret prévoit que la dénomination de vente est complétée par : " [...] 5° La mention ''fabriqué à la ferme puis affiné par l'établissement'' suivie du nom de l'affineur, dans le cas des fromages fermiers tels que définis à l'article 9-1 mais dont la phase d'affinage a été réalisée en dehors de l'exploitation agricole. Cette mention suit immédiatement la dénomination '' fromage fermier''. La taille des caractères de ces mentions est identique " ; que l'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse demandait au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir de la seconde phrase du premier alinéa de l'article 9-1 et du 5° de l'article 12 du décret du 27 avril 2007, au motif que ces dispositions étendent le bénéfice de la dénomination " fromage fermier " ou de tout autre qualificatif laissant entendre une origine fermière à des fromages affinés en dehors de l'exploitation ;

4. Considérant, d'une part, que, ainsi que l'a relevé le Conseil d'Etat dans sa décision du 17 avril 2015 en réponse à un moyen soulevé sur ce point, l'affinage est partie intégrante du processus de fabrication, qu'il parachève, d'un fromage dit " affiné " ; que, par suite, il y a lieu d'écarter le moyen, soulevé à titre principal par les requérants, tiré de ce que l'affinage ne ferait pas partie du processus de fabrication des fromages affinés ; que, d'autre part, si la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres soutiennent, à titre subsidiaire, que les pratiques d'affinage des fromages sous appellation d'origine à l'extérieur de la ferme respectent les exigences du producteur et n'utilisent pas de procédés industriels, un tel moyen ne peut en tout état de cause qu'être écarté dès lors que les dispositions attaquées du décret du 27 avril 2007 n'ont pas pour effet, à elles seules, de garantir l'exclusion de techniques industrielles et le maintien de la responsabilité directe de l'exploitant dans l'élaboration du produit aux différents stades de production lorsque le processus d'affinage a lieu en dehors de l'exploitation ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres doit être rejetée ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SCA des producteurs de Reblochon de la Vallée de Thônes et autres, à l'Association régionale des producteurs de fromages fermiers de Corse, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Copie sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 2ème / 7ème ssr
Numéro d'arrêt : 391159
Date de la décision : 15/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-08-04-01 PROCÉDURE. VOIES DE RECOURS. TIERCE-OPPOSITION. RECEVABILITÉ. - EXISTENCE - SOCIÉTÉS QUI, EN VERTU DES DISPOSITIONS ANNULÉES PAR LA DÉCISION JURIDICTIONNELLE CONTESTÉE, POUVAIENT FAIRE USAGE D'UNE MENTION VALORISANTE POUR LEUR PRODUCTION.

54-08-04-01 En vertu des dispositions annulées par la décision contestée du Conseil d'Etat, les requérants pouvaient faire usage de la mention fromage fermier pour des fromages affinés en dehors de l'exploitation. Ils étaient ainsi bénéficiaires directs de ces dispositions. Dès lors qu'ils n'ont été ni présents, ni représentés à l'instance, leur tierce opposition est recevable.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 fév. 2016, n° 391159
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:391159.20160215
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