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10/02/2016 | FRANCE | N°382153

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 10 février 2016, 382153


Vu la procédure suivante :

La société ACS Production a demandé au tribunal d'administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler le marché conclu le 14 décembre 2009 entre le syndicat interdépartemental des parcs des sports de Bobigny et la Courneuve (SIPS) et la société SMC2 relatif à la construction d'un plateau multisports couvert sur le parc de la Courneuve et, d'autre part, de condamner le syndicat à lui verser la somme de 120 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de son éviction du marché. Par un jugement n° 1002230 du 10 mai 2011, le

tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Par un...

Vu la procédure suivante :

La société ACS Production a demandé au tribunal d'administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler le marché conclu le 14 décembre 2009 entre le syndicat interdépartemental des parcs des sports de Bobigny et la Courneuve (SIPS) et la société SMC2 relatif à la construction d'un plateau multisports couvert sur le parc de la Courneuve et, d'autre part, de condamner le syndicat à lui verser la somme de 120 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de son éviction du marché. Par un jugement n° 1002230 du 10 mai 2011, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 11VE02239 du 18 juillet 2013, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel de la société ACS Production, d'une part, rejeté les conclusions à fin d'indemnisation présentées par la société ACS Production, d'autre part, avant de statuer sur le surplus des conclusions de la requête, ordonné avant dire droit une mesure d'instruction sous la forme d'un avis technique sur le fondement de l'article R. 625-2 du code de justice administrative.

Par un nouvel arrêt n° 11VE02239 du 6 mai 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé le jugement du 10 mai 2011 du tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société ACS Production contestant la validité du contrat ainsi que le contrat conclu entre le syndicat interdépartemental des parcs des sports de Bobigny et la Courneuve (SIPS) et la société SMC2, mis à la charge du SIPS les frais de l'avis technique et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 3 juillet et 3 octobre 2014, la société SMC2 demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 6 mai 2014, en tant qu'il fait partiellement droit aux conclusions de la société ACS Production ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société ACS Production ;

3°) de mettre à la charge de la société ACS Production la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Roussel, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Tiffreau, Marlange, de la Burgade, avocat de la société SMC2 et à la SCP Didier, Pinet, avocat de la société ACS Production ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le syndicat interdépartemental des parcs des sports de Bobigny et la Courneuve (SIPS) a conclu le 14 décembre 2009 un marché avec la société SMC2, en vue de la construction d'un plateau multisports couvert sur le parc de la Courneuve ; que la société ACS Production, candidate évincée, a demandé au tribunal administratif de Montreuil l'annulation du contrat et l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de son éviction ; que sa demande a été rejetée par un jugement du 10 mai 2011 du tribunal administratif de Montreuil ; que, par un arrêt du 18 juillet 2013, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de la société ACS Production, rejeté les conclusions indemnitaires présentées par cette société et, s'agissant des conclusions à fin d'annulation du marché litigieux, après avoir écarté l'ensemble des moyens à l'exception de celui tiré de la méconnaissance de l'article 6 du code des marchés publics, ordonné, avant dire droit, un avis technique sur le fondement de l'article R. 625-2 du code de justice administrative ; que la société SMC2 se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 mai 2014 en tant qu'il a annulé, d'une part, le jugement du 10 mai 2011 en tant que celui-ci a rejeté les conclusions de la société ACS Production contestant la validité du contrat et, d'autre part, le contrat litigieux ;

2. Considérant que, pour juger que les prescriptions des articles 4.2 et 4.3 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché contesté avaient eu pour effet de favoriser la société SMC2 et de porter atteinte au principe d'égalité entre les candidats, en méconnaissance du IV de l'article 6 du code des marchés publics, la cour a estimé que la technique de fixation de la couverture en toile par des profilés mécaniques inoxydables, exigée à l'article 4.3 du CCTP, correspondait à une technique maîtrisée par la seule société SCM2 et dont le brevet lui appartenait ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, en particulier des documents produits par la société SMC2, que celle-ci n'était pas la seule à utiliser et à maîtriser cette technique, la cour a dénaturé les pièces du dossier ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que la société SMC2 est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du code des marchés publics : " IV. - Les spécifications techniques ne peuvent pas faire mention d'un mode ou procédé de fabrication particulier ou d'une provenance ou origine déterminée, ni faire référence à une marque, à un brevet ou à un type, dès lors qu'une telle mention ou référence aurait pour effet de favoriser ou d'éliminer certains opérateurs économiques ou certains produits. / Toutefois, une telle mention ou référence est possible si elle est justifiée par l'objet du marché ou, à titre exceptionnel, dans le cas où une description suffisamment précise et intelligible de l'objet du marché n'est pas possible sans elle et à la condition qu'elle soit accompagnée des termes : " ou équivalent " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'objet du marché contesté est la construction d'un plateau multisports couvert par une toile ; que le syndicat interdépartemental des parcs des sports de Bobigny et la Courneuve (SIPS) a voulu choisir un système de fixation de cette toile de couverture offrant les meilleures garanties de vieillissement, un moindre coût de maintenance et une meilleure esthétique ; qu'à cette fin il a retenu, par les prescriptions de l'article 4.3 du cahier des clauses techniques particulières, le procédé de fixation de la toile de couverture " par des profilés métalliques inoxydables (...) non visible et discret ", lequel ne nécessite " aucune maintenance " ; que ce procédé de fixation de la couverture de l'ouvrage est justifié par l'objet même du marché ; que, par suite, le SIPS n'a, en faisant le choix de ce procédé, pas méconnu les dispositions du IV de l'article 6 du code des marchés publics citées ci-dessus ni le principe d'égalité entre les candidats ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société ACS Production n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par un jugement du 10 mai 2011, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du marché ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions tendant à ce que soit enjointe la démolition de l'ouvrage ;

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société ACS Production la somme de 4 500 euros à verser à la société SMC2 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société SMC2, qui n'est pas la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 6 mai 2014 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la société ACS Production tendant à l'annulation du marché conclu le 14 décembre 2009 entre le syndicat interdépartemental des parcs des sports de Bobigny et la Courneuve et la société SMC2 et à ce que soit enjointe la démolition de l'ouvrage ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La société ACS Production versera une somme de 4 500 euros à la société SMC2 au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société SMC2, à la société ACS Production et au syndicat interdépartemental des parcs des sports de Bobigny et la Courneuve.


Synthèse
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 382153
Date de la décision : 10/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 10 fév. 2016, n° 382153
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Roussel
Rapporteur public ?: M. Olivier Henrard
Avocat(s) : SCP TIFFREAU, MARLANGE, DE LA BURGADE ; SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 29/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:382153.20160210
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