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23/12/2015 | FRANCE | N°382005

France | France, Conseil d'État, 5ème / 4ème ssr, 23 décembre 2015, 382005


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 14 septembre 2010 par laquelle le directeur du centre hospitalier intercommunal (CHI) de Villeneuve-Saint-Georges a décidé que son contrat de praticien ne serait pas renouvelé et la décision du 17 décembre 2010 par laquelle, après avoir rapporté la décision du 14 septembre 2010, il a confirmé que son contrat ne serait pas renouvelé et a fixé le terme de ses fonctions au 15 mars 2011. Par un jugement n° 1101063, 116185 du 31 octobre 2012, le tribunal administratif a

rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA00003 du 30 avril 2014, la c...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 14 septembre 2010 par laquelle le directeur du centre hospitalier intercommunal (CHI) de Villeneuve-Saint-Georges a décidé que son contrat de praticien ne serait pas renouvelé et la décision du 17 décembre 2010 par laquelle, après avoir rapporté la décision du 14 septembre 2010, il a confirmé que son contrat ne serait pas renouvelé et a fixé le terme de ses fonctions au 15 mars 2011. Par un jugement n° 1101063, 116185 du 31 octobre 2012, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA00003 du 30 avril 2014, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement en tant qu'il refuse d'annuler la décision du 17 décembre 2010.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 juin et 26 septembre 2014 et le 24 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge du CHI de Villeneuve-Saint-Georges la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 ;

- le code de la santé publique, notamment son article R. 6152-610 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M.B... ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. B...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... a été recruté en qualité de praticien attaché par le centre hospitalier intercommunal (CHI) de Villeneuve-Saint-Georges pour une période de deux ans courant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ; que, par un avenant du 15 mars 2004, son contrat a été prolongé pour une période de trois ans courant jusqu'au 31 décembre 2007 ; que ce contrat a été tacitement reconduit pour une nouvelle période de trois ans courant jusqu'au 31 décembre 2010 ; que, par une lettre du 14 septembre 2010, le directeur du centre a informé le praticien de sa décision de ne pas renouveler le contrat ; que, par une lettre du 17 décembre 2010, le directeur a retiré cette décision mais confirmé que le contrat de M. B...ne serait pas renouvelé et fixé au 15 mars 2011 la date de cessation de ses fonctions ; que la demande de M. B... tendant à l'annulation du refus de renouveler son contrat a été rejetée par un jugement du tribunal administratif de Melun du 31 octobre 2012, confirmé par un arrêt du 30 avril 2014 de la cour administrative d'appel de Paris contre lequel il se pourvoit en cassation ;

2. Considérant qu'aux termes des premier et quatrième alinéas de l'article R. 6152-610 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2010 : " Les praticiens attachés sont recrutés pour un contrat d'une durée maximale d'un an, renouvelable dans la limite d'une durée totale de vingt-quatre mois. (...) / A l'issue de cette période de vingt-quatre mois, le renouvellement s'effectue par un contrat de trois ans renouvelable de droit, par tacite reconduction " ; que le décret du 29 septembre 2010 portant dispositions relatives aux praticiens contractuels, aux assistants, aux praticiens attachés et aux médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes recrutés dans les établissements publics de santé a donné au quatrième alinéa la rédaction suivante : " A l'issue de cette période de vingt-quatre mois, le renouvellement s'effectue par un contrat de trois ans, renouvelable de droit, par décision expresse. A l'issue du contrat triennal, le renouvellement s'effectue par un contrat à durée indéterminée " ; qu'en l'absence de dispositions transitoires, ces dispositions nouvelles, prises à l'effet de transposer à la situation particulière des praticiens attachés la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, sont applicables aux praticiens attachés qui, à la date de publication du décret du 29 septembre 2010, étaient employés par un établissement hospitalier dans le cadre d'un contrat de trois ans renouvelable de droit par tacite reconduction, conformément aux dispositions antérieures du quatrième alinéa de l'article R. 6152-610 ; qu'il résulte de ces dispositions que, par dérogation au principe selon lequel l'agent public dont le contrat arrive à son terme n'a pas de droit à son renouvellement, le praticien attaché, parvenu au terme d'un contrat de trois ans faisant suite à une période initiale de recrutement de vingt-quatre mois, a le droit de se voir proposer par le centre hospitalier qui l'emploie de poursuivre son engagement dans le cadre d'un contrat qui, du fait des dispositions nouvelles de l'article R. 6152-610 précité, ne peut être qu'un contrat à durée indéterminée conclu sur décision expresse du directeur de l'établissement ; que ce dernier ne peut refuser de renouveler le contrat que pour un motif qui serait de nature à justifier le licenciement et par une décision qui, dès lors qu'elle refuse un avantage dont l'attribution constitue un droit pour l'intéressé, doit, en vertu des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, énoncer les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle repose ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que la décision attaquée, par laquelle le directeur du CHI de Villeneuve-Saint-Georges a décidé de ne pas renouveler le contrat de M. B...et ainsi refusé de conclure avec lui un contrat à durée indéterminée alors que ce dernier, parvenu au terme d'un contrat de recrutement de trois ans, entrait dans les prévisions du quatrième alinéa de l'article R. 6152-610 du code de la santé publique, n'avait pas à être motivée, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHI de Villeneuve-Saint-Georges le versement d'une somme de 3 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 30 avril 2014 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : Le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges versera la somme de 3 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges.

Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.


Synthèse
Formation : 5ème / 4ème ssr
Numéro d'arrêt : 382005
Date de la décision : 23/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - QUESTIONS GÉNÉRALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - MOTIVATION OBLIGATOIRE EN VERTU DES ARTICLES 1 ET 2 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979 - DÉCISION REFUSANT UN AVANTAGE DONT L'ATTRIBUTION CONSTITUE UN DROIT - EXISTENCE - DÉCISION PAR LAQUELLE LE DIRECTEUR D'UN ÉTABLISSEMENT HOSPITALIER REFUSE DE RENOUVELER LE CONTRAT D'UN PRATICIEN ATTACHÉ AU TERME D'UN CONTRAT DE TROIS ANS - L'INTÉRESSÉ BÉNÉFICIANT D'UN DROIT À SE VOIR PROPOSER CE RENOUVELLEMENT DANS LE CADRE D'UN CDI [RJ1].

01-03-01-02-01-01-04 Par dérogation au principe selon lequel l'agent public dont le contrat arrive à son terme n'a pas de droit à son renouvellement, le praticien attaché, parvenu au terme d'un contrat de trois ans faisant suite à une période initiale de recrutement de vingt-quatre mois, a le droit de se voir proposer par le centre hospitalier qui l'emploie de poursuivre son engagement dans le cadre d'un contrat qui, du fait des dispositions nouvelles de l'article R. 6152-610 du code de la santé publique (CSP), ne peut être qu'un contrat à durée indéterminée conclu sur décision expresse du directeur de l'établissement.... ,,Ce dernier ne peut refuser de renouveler le contrat que pour un motif qui serait de nature à justifier le licenciement et par une décision qui, dès lors qu'elle refuse un avantage dont l'attribution constitue un droit pour l'intéressé, doit, en vertu des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, énoncer les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle repose.

SANTÉ PUBLIQUE - PROFESSIONS MÉDICALES ET AUXILIAIRES MÉDICAUX - RECRUTEMENT DES PRATICIENS ATTACHÉS - RENOUVELLEMENT PAR CDI À L'ISSUE DU CONTRAT TRIENNAL (4E AL - DE L'ART - R - 6152-610 DU CSP - ISSU DU DÉCRET DU 29 SEPTEMBRE 2010) - 1) APPLICABILITÉ - 2) PORTÉE.

61-035 En vertu de l'article R. 6152-610 du code de la santé publique (CSP), les praticiens attachés sont recrutés pour un contrat d'une durée maximale d'un an, renouvelable dans la limite d'une durée totale de vingt-quatre mois. Dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2010, le 4e alinéa de cet article prévoyait qu'à l'issue de la période de vingt-quatre mois, le renouvellement s'effectue par un contrat de trois ans renouvelable de droit par tacite reconduction. Dans sa rédaction issue du décret n° 2010-1137 du 29 septembre 2010, il prévoit qu'à l'issue de la période de vingt-quatre mois, le renouvellement s'effectue par un contrat de trois ans, renouvelable de droit par décision expresse et qu'à l'issue du contrat triennal, le renouvellement s'effectue par un contrat à durée indéterminée.,,,1) En l'absence de dispositions transitoires, ces dispositions nouvelles, prises à l'effet de transposer à la situation particulière des praticiens attachés la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, sont applicables aux praticiens attachés qui, à la date de publication du décret du 29 septembre 2010, étaient employés par un établissement hospitalier dans le cadre d'un contrat de trois ans renouvelable de droit par tacite reconduction, conformément aux dispositions antérieures du quatrième alinéa de l'article R. 6152-610.,,,2) Il résulte de ces dispositions que, par dérogation au principe selon lequel l'agent public dont le contrat arrive à son terme n'a pas de droit à son renouvellement, le praticien attaché, parvenu au terme d'un contrat de trois ans faisant suite à une période initiale de recrutement de vingt-quatre mois, a le droit de se voir proposer par le centre hospitalier qui l'emploie de poursuivre son engagement dans le cadre d'un contrat qui, du fait des dispositions nouvelles de l'article R. 6152-610, ne peut être qu'un contrat à durée indéterminée conclu sur décision expresse du directeur de l'établissement. Ce dernier ne peut refuser de renouveler le contrat que pour un motif qui serait de nature à justifier le licenciement et par une décision qui, dès lors qu'elle refuse un avantage dont l'attribution constitue un droit pour l'intéressé, doit, en vertu des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, énoncer les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle repose.


Références :

[RJ1]

Comp., pour la règle générale, CE, 23 février 2009, Moutterlos, n° 304995, T. pp. 607-806.


Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 2015, n° 382005
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:382005.20151223
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