Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 octobre et 14 novembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 13BX01114 du 16 septembre 2013 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, a annulé l'ordonnance n° 1300407 du 5 avril 2013 du juge des référés du tribunal administratif de Limoges condamnant la caisse d'allocations familiales (CAF) de l'Indre à lui verser une provision de 7 296 euros au titre de ses droits au bénéfice de l'aide personnalisée au logement et rejeté sa demande de provision ;
2°) statuant comme juge des référés, de rejeter l'appel de la CAF de l'Indre ;
3°) de mettre à la charge de la CAF de l'Indre le versement, au profit de la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, son avocat, de la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Dominique Chelle, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de M. B...et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la caisse d'allocations familiales de l'Indre ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux que, par un jugement en date du 29 novembre 2012 devenu définitif, le tribunal administratif de Limoges, saisi par M. B...d'une contestation portant sur la décision du 2 mai 2011 de la commission de recours amiable de la CAF de l'Indre lui refusant l'aide personnalisée au logement (APL) au titre d'un logement situé à La Châtre, a annulé cette décision et, tout en relevant que l'intéressé était en droit de prétendre à l'avantage demandé, a renvoyé M. B...devant la CAF de l'Indre pour qu'il soit procédé au calcul de ses droits ; que M.B..., estimant que la CAF de l'Indre n'avait pas pris les mesures aptes à assurer l'exécution de ce jugement, a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Limoges d'une demande, formée en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, tendant à ce que cette caisse soit condamnée à lui verser une provision ; que, faisant droit à cette demande, le juge des référés du tribunal administratif a condamné la CAF de l'Indre à verser à M. B...une provision de 7 296 euros par une ordonnance du 5 avril 2013 dont la CAF de l'Indre a relevé appel ; que M. B...se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 16 septembre 2013 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif et rejeté sa demande de provision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt qui, après avoir admis que l'une des parties était titulaire d'une créance, la renvoie devant l'autorité compétente pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette créance, cette partie peut, sans que les dispositions de l'article L. 911-4 du code de justice administrative y fassent obstacle, saisir le juge des référés, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, d'une demande tendant à ce que lui soit allouée une provision au titre de la créance en cause ; que celle-ci doit alors être évaluée en fonction du caractère non sérieusement contestable de l'obligation résultant du jugement ou de l'arrêt qui n'a pas reçu exécution ;
3. Considérant que, pour annuler l'ordonnance du 5 avril 2013 du juge des référés du tribunal administratif de Limoges, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a jugé qu'il appartenait à M.B..., s'il s'y croyait fondé, de saisir le juge de l'exécution du tribunal administratif des difficultés rencontrées pour assurer l'exécution du jugement du 29 novembre 2012 le renvoyant devant la CAF de l'Indre pour qu'il soit statué sur le montant de ses droits ; que le juge des référés de la cour a estimé que la créance née de ce même jugement ne pouvait être soumise à l'appréciation du juge des référés, saisi au titre de l'article R. 541-1 du code de justice administrative ; qu'en annulant par ce motif l'ordonnance dont il était saisi, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son ordonnance doit être annulée ;
4. Considérant que M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de la CAF de l'Indre la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise au même titre à la charge de M.B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 16 septembre 2013 est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : La caisse d'allocations familiales de l'Indre versera à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de M.B..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Les conclusions présentées par la CAF de l'Indre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la caisse d'allocations familiales de l'Indre.
Copie en sera adressée pour information à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.