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27/07/2015 | FRANCE | N°370252

France | France, Conseil d'État, 1ère / 6ème ssr, 27 juillet 2015, 370252


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 juillet 2013 et 10 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Société Mölnlycke Health Care SAS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre des affaires sociales et de la santé et le ministre de l'économie et des finances ont rejeté sa demande tendant à l'abrogation, d'une part, de l'arrêté du 16 juillet 2010 du ministre de la santé et des sports et du ministre du budget, des comptes p

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Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 juillet 2013 et 10 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Société Mölnlycke Health Care SAS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre des affaires sociales et de la santé et le ministre de l'économie et des finances ont rejeté sa demande tendant à l'abrogation, d'une part, de l'arrêté du 16 juillet 2010 du ministre de la santé et des sports et du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat relatif à la modification de la procédure d'inscription et des conditions de prise en charge des articles pour pansements inscrits à la section 1, chapitre 3, titre Ier de la liste prévue à l'article L. 165-1 (LPP) du code de la sécurité sociale et, d'autre part, de l'arrêté du 10 décembre 2012 du ministre des affaires sociales et de la santé et du ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, modifiant l'arrêté du 16 juillet 2010 ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires sociales et de la santé et au ministre de l'économie et des finances d'abroger ces deux arrêtés, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 2004-1419 du 23 décembre 2004 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yannick Faure, auditeur,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la société Mölnlycke Health Care SAS ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale : " Le remboursement par l'assurance maladie des dispositifs médicaux à usage individuel (...) est subordonné à leur inscription sur une liste établie après avis d'une commission de la Haute Autorité de santé mentionnée à l'article L. 161-37. L'inscription est effectuée soit par la description générique de tout ou partie du produit concerné, soit sous forme de marque ou de nom commercial (...) " ; qu'en vertu de l'article R. 165-1 du même code, cette liste est établie par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé de la santé ; qu'aux termes de l'article R. 165-2 du même code : " Les produits ou les prestations mentionnés à l'article L. 165-1 sont inscrits sur la liste prévue audit article au vu de l'appréciation du service qui en est attendu. / (...) / Les produits ou prestations dont le service attendu est insuffisant pour justifier l'inscription au remboursement ne sont pas inscrits sur la liste " ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 165-3 du code de la sécurité sociale : " L'inscription sur la liste est effectuée, pour une durée maximale de cinq ans renouvelable par la description générique du produit ou de la prestation. Cette description est constituée par l'énumération de ses principales caractéristiques. / Toutefois, l'inscription sur la liste est effectuée pour une durée maximale de cinq ans renouvelable, sous forme de marque ou de nom commercial : / - pour les produits qui présentent un caractère innovant ; / - ou lorsque l'impact sur les dépenses d'assurance maladie, les impératifs de santé publique ou le contrôle des spécifications techniques minimales nécessite un suivi particulier du produit (...) " ;

3. Considérant que, sur le fondement de ces dispositions, il est loisible aux ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé, lorsque des dispositifs médicaux à usage individuel inscrits sur la liste prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale par leur description générique remplissent les conditions d'une inscription sous forme de marque ou de nom commercial, de prévoir que le renouvellement de leur inscription sera effectué sous cette forme, sous réserve qu'ils présentent un service attendu suffisant ;

4. Considérant que l'article 27 du décret du 23 décembre 2004 relatif à la prise en charge des produits et prestations mentionnés à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale et modifiant ledit code a prévu à titre transitoire que, pour chacune des années 2005 à 2014, un arrêté annuel des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale préciserait, par catégorie homogène de produits et prestations, les descriptions génériques dont l'inscription arriverait en fin de validité au 31 juillet de l'année suivante et qui feraient l'objet d'un examen en vue d'un renouvellement d'inscription ; qu'en application de ces dispositions, un arrêté du 12 juillet 2005 a prévu que les descriptions génériques des articles pour pansements devraient faire l'objet d'un tel examen au titre de l'année 2006 ; qu'en l'absence de publication d'une décision de renouvellement d'inscription au 31 juillet 2006, ces dispositifs médicaux ont bénéficié d'un renouvellement tacite, ainsi que le prévoit l'article R. 165-10-1 du code de la sécurité sociale, pour une durée de 5 ans ; qu'ainsi, les ministres devaient se prononcer sur le renouvellement de l'inscription des articles pour pansements avant le 31 juillet 2011 ; que, par un arrêté du 16 juillet 2010, ils ont prévu qu'à compter du 31 décembre 2012, l'inscription par description générique des articles pour pansements serait réservée aux pansements exempts de composants ou substances ajoutés possédant une propriété, revendiquée ou connue, de type pharmacologique ou biologique, les pansements incorporant de tels composants ou substances devant faire l'objet d'une inscription sous forme de marque ou de nom commercial ; qu'un arrêté du 10 décembre 2012 a remplacé la date du 31 décembre 2012 par celle du 1er avril 2013;

5. Considérant que les ministres pouvaient légalement, par les arrêtés en litige, prévoir que, pour certains articles, le renouvellement de leur inscription serait effectué pour une durée inférieure à cinq ans ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'ils pouvaient également prévoir, sous réserve d'être dans l'un des deux cas prévus par les dispositions précitées des troisième et quatrième alinéas de l'article R. 165-3 du code de la sécurité sociale, que le renouvellement suivant le serait sous forme de marque ou de nom commercial ; qu'il suit de là que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les arrêtés litigieux seraient dépourvus de base légale ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 165-16 du code de la sécurité sociale : " Les décisions portant refus d'inscription sur la liste prévue à l'article L. 165-1, refus de renouvellement d'inscription, radiation de la liste ou refus de modification de l'inscription (...) doivent, dans la notification au fabricant ou distributeur, être motivées (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a dit été ci-dessus que les arrêtés en litige renouvellent l'inscription par description générique des pansements incorporant des composants ou substances ajoutés possédant une propriété, revendiquée ou connue, de type pharmacologique ou biologique jusqu'au 31 mars 2013 et décident de ne pas la renouveler à la date du 1er avril 2013 ; qu'ils ne peuvent être regardés comme procédant ainsi à une radiation de la liste prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale ; que le renouvellement de l'inscription par description générique n'étant pas subordonné à une demande des fabricants ou des distributeurs, contrairement au renouvellement de l'inscription sous forme de marque ou de nom commercial, ces arrêtés ne portent pas non plus refus de renouvellement d'inscription au sens de l'article R. 165-16 du code de la sécurité sociale ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'ils auraient dû être motivés en application des dispositions de cet article ;

8. Considérant, en troisième lieu, que les arrêtés en litige ne peuvent, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, être regardés comme procédant à une radiation de la liste prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale ; que, par suite, la société requérante ne peut utilement soutenir qu'ils ont été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R. 165-5 du même code, qui détermine les motifs pour lesquels des produits peuvent être radiés de la liste prévue par l'article L. 165-1 ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les ministres aient commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que l'ajout à certains pansements de composants ou substances possédant une propriété de type pharmacologique ou biologique justifiait, pour des impératifs de santé publique, que ces produits fassent l'objet d'un suivi particulier ; qu'un tel motif justifie légalement l'inscription de produits sous forme de marque ou de nom commercial ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les ministres se seraient abstenus de procéder à un examen des caractéristiques des différentes catégories de pansements en cause ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les arrêtés en litige méconnaîtraient les dispositions de l'article R. 165-3 du code de la sécurité sociale citées au point 2 ou seraient entachés d'erreur de droit ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la commission d'évaluation des produits et prestations de la Haute Autorité de santé a recommandé par un avis du 7 mars 2007 que les pansements incorporant des composants ou substances possédant une propriété, revendiquée ou connue, de type pharmacologique ou biologique fassent l'objet d'un dossier de demande d'inscription par nom de marque, justifiant le service attendu dans les indications revendiquées par le fabricant ; que les fabricants intéressés ont eu connaissance en septembre 2008 des critères admis par la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé pour mener les études cliniques nécessaires et que la société requérante a d'ailleurs pu lancer en octobre 2008 une étude clinique destinée à justifier le service attendu des pansements contenant de l'argent qu'elle commercialise ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en fixant au 31 mars 2013 le terme de l'inscription de ces produits par description générique, les ministres aient porté une appréciation manifestement erronée sur les délais nécessaires à la réalisation d'études cliniques propres à en établir le service attendu ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les arrêtés litigieux sont entachés, pour ce motif, d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé ont refusé d'abroger les arrêtés des 16 juillet 2010 et 10 décembre 2012 en litige ;

12. Considérant, dès lors, que les conclusions de la société Mölnlycke Health Care SAS présentées aux fins d'injonction et au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être également rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la société Mölnlycke Health Care SAS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Mölnlycke Health Care SAS, à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la Haute Autorité de santé.


Synthèse
Formation : 1ère / 6ème ssr
Numéro d'arrêt : 370252
Date de la décision : 27/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2015, n° 370252
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Yannick Faure
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:370252.20150727
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