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22/07/2015 | FRANCE | N°385651

France | France, Conseil d'État, 6ème ssjs, 22 juillet 2015, 385651


Vu la procédure suivante :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Basse-Terre d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 en vue de l'élection des conseillers municipaux et des conseillers communautaires de la commune de Basse-Terre (Guadeloupe). Par un jugement n° 1400312 du 9 octobre 2014, ce tribunal administratif a rejeté sa protestation.

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 novembre et 11 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E...demande au Conseil d'Et

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1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Basse-Terre ...

Vu la procédure suivante :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Basse-Terre d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 en vue de l'élection des conseillers municipaux et des conseillers communautaires de la commune de Basse-Terre (Guadeloupe). Par un jugement n° 1400312 du 9 octobre 2014, ce tribunal administratif a rejeté sa protestation.

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 novembre et 11 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Basse-Terre ;

2°) d'annuler ces opérations électorales ;

3°) de mettre à la charge de Mme K...et de ses colistiers la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Clémence Olsina, auditeur,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. E...;

1. Considérant qu'à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Basse-Terre (Guadeloupe), la liste " Expérience et solidarité au service des Basse-Terriens ", conduite par MmeK..., a obtenu 3 198 voix, soit 56,36 % des suffrages exprimés, tandis que la liste " B@tir ", conduite par M.E..., a recueilli 1 395 voix, soit 24,58 % des suffrages exprimés, suivie de la liste conduite par M. F...avec 545 voix, soit 9,6 % des suffrages exprimés et de la liste conduite par M.C..., avec 536 voix soit 9,44 % des suffrages exprimés ; que M. E...relève appel du jugement du 9 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa protestation tendant à l'annulation de ces opérations électorales ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 11 du code électoral : " Sont inscrits sur la liste électorale, sur leur demande : / 1° Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis six mois au moins ; / 2° Ceux qui figurent pour la cinquième fois sans interruption, l'année de la demande d'inscription, au rôle d'une des contributions directes communales et, s'ils ne résident pas dans la commune, ont déclaré vouloir y exercer leurs droits électoraux. Tout électeur ou toute électrice peut être inscrit sur la même liste que son conjoint au titre de la présente disposition ; / 3° Ceux qui sont assujettis à une résidence obligatoire dans la commune en qualité de fonctionnaires publics. / Sont également inscrits, dans les mêmes conditions, les citoyens qui, ne remplissant pas les conditions d'âge et de résidence ci-dessus indiquées lors de la formation des listes, les rempliront avant la clôture définitive. / L'absence de la commune résultant du service national ne porte aucune atteinte aux règles ci-dessus édictées pour l'inscription sur les listes électorales " ; que s'il n'appartient pas au juge de l'élection d'apprécier si un électeur inscrit sur les listes électorales remplit effectivement la condition de domicile exigée par ces dispositions, il lui incombe de rechercher si des manoeuvres dans l'établissement de la liste électorale ont altéré la sincérité du scrutin ;

3. Considérant que la circonstance que le nombre des électeurs inscrits sur la liste électorale de la commune de Basse-Terre aurait augmenté de 6,5 % en 2014 par rapport à l'année précédente, alors que la population est restée stable depuis 2012, ne saurait révéler à elle seule l'existence de manoeuvres dans l'établissement de la liste électorale ; que la circonstance que 445 nouveaux électeurs inscrits ne figuraient pas au rôle des contributions directes communales et que 70 d'entre eux auraient, au vu des fichiers d'assurés sociaux et de demandeurs d'emploi produits par le requérant, conservé un domicile dans une autre commune et été inscrits sur la liste électorale au bénéfice d'une domiciliation chez un tiers, ne suffit pas non plus à établir que l'inscription des intéressés serait constitutive d'une manoeuvre ayant altéré la sincérité du scrutin ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté qu'au cours de la campagne électorale des messages sonores à caractère xénophobe, visant nommément M.E..., ont été diffusés par l'un des colistiers de Mme K..., M.I..., dans un véhicule de campagne circulant dans la ville et équipé d'un haut-parleur ; que ces messages excédaient largement les limites de ce qui peut être toléré dans le cadre de la polémique électorale et excluaient toute défense utile de la part du candidat visé ; que, toutefois, pour particulièrement condamnables que soient de tels agissements, ils n'ont pas, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu notamment de l'écart des voix séparant les listes en présence, été de nature à altérer la sincérité du scrutin ;

5. Considérant, en troisième lieu, que le requérant a soutenu devant le tribunal administratif de Basse-Terre que trois électeurs auraient irrégulièrement été ajoutés de façon manuscrite sur la liste électorale du bureau n° 9, que sept électeurs auraient voté dans les bureaux n° 2, 3 et 4 sans être inscrits sur la liste électorale de ces bureaux, qu'un électeur aurait émargé à la place d'un autre dans le bureau n° 3 et que trois personnes auraient voté par procuration dans des conditions irrégulières dans le bureau n° 6 ; qu'en jugeant que, à supposer que ces allégations soient établies, l'irrégularité de ces 14 votes n'était pas de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin compte tenu de l'écart de voix par lequel la liste conduite par Mme K...a dépassé la majorité absolue des suffrages exprimés, le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le bureau de vote n° 3 était installé, au sein d'une école maternelle, dans une salle portant, au-dessus de la porte d'entrée, le nom de Mme K...; que, d'une part, pour regrettable que soit le choix de cette salle pour accueillir un bureau de vote, il ne saurait être regardé, compte tenu de l'écart de voix par lequel la liste conduite par l'intéressée a dépassé la majorité absolue des suffrages exprimés, comme ayant été de nature à altérer la sincérité du scrutin ; que, d'autre part, le requérant ne peut utilement soutenir que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en relevant, de façon surabondante, que l'arrêté préfectoral ayant déterminé les lieux d'implantation des bureaux de vote de la commune de Basse-Terre n'avait pas été contesté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 228 du code électoral : " (...) Sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l'année de l'élection. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que sont notamment éligibles les personnes qui remplissent les conditions énoncées à l'article L. 11 du code électoral, cité au point 2 ; que s'il n'appartient pas au juge de l'élection d'apprécier si un électeur inscrit sur les listes électorales remplit effectivement la condition de domicile exigée par ces dispositions, il lui incombe de rechercher si des manoeuvres dans l'établissement de la liste électorale ont altéré la sincérité du scrutin ;

8. Considérant que M. E...soutient que MmeJ..., MmeH..., Mme A...et MmeD..., candidates sur la liste conduite par MmeK..., les trois premières ayant été élues à l'issue du scrutin, ne remplissaient pas les conditions prévues par les dispositions l'article L. 11 du code électoral pour être inscrites sur la liste électorale de la commune de Basse-Terre et, en particulier, qu'aucune d'entre elle n'y avait son domicile réel ou sa résidence effective depuis six mois au moins ;

9. Considérant, d'abord, qu'il n'est pas établi que l'inscription sur la liste électorale de MmeJ..., qui se prévaut de la location d'un logement à Basse-Terre à raison duquel elle s'est acquittée de la taxe d'habitation en 2014, résulterait d'une manoeuvre ayant altéré la sincérité du scrutin ; qu'ensuite, la circonstance que Mme H...ait fait figurer une autre adresse que celle dont elle se prévaut à Basse-Terre sur diverses correspondances échangées en 2012 et 2013 dans le cadre de contentieux judiciaires, ne suffit pas à établir qu'elle ne remplirait pas les conditions prévues par l'article L. 11 du code électoral pour être inscrite sur la liste électorale de la commune ni, en tout état de cause, que son inscription résulterait d'une manoeuvre ayant altéré la sincérité du scrutin ; qu'il en va de même de l'inscription sur la liste électorale de Mmes A...etD..., qui se sont prévalues d'une domiciliation chez des tiers, qui ne saurait être contestée au seul motif qu'il résulte de fichiers d'assurés sociaux et de demandeurs d'emploi produits par le requérant qu'elles auraient conservé un domicile dans une autre commune ;

10. Considérant, enfin, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la combinaison des irrégularités invoquées par le requérant ait été de nature, compte tenu de l'écart de voix par lequel la liste conduite par Mme K...a dépassé la majorité absolue des suffrages exprimés, à altérer la sincérité du scrutin ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ; que le surplus de ses conclusions ne peut, par suite, qu'être rejeté ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme K...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme K...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B...E..., à Mme G...K...et à la ministre des outre-mer.


Synthèse
Formation : 6ème ssjs
Numéro d'arrêt : 385651
Date de la décision : 22/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2015, n° 385651
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Clémence Olsina
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:385651.20150722
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