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17/06/2015 | FRANCE | N°371162

France | France, Conseil d'État, 9ème / 10ème ssr, 17 juin 2015, 371162


Vu la procédure suivante :

La société Autobus aixois a demandé au tribunal administratif de Montreuil la restitution des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2008, ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties. Par un jugement n° 0913154 du 12 juillet 2011, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 11VE03330 du 23 avril 2013, la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les pénalités pour retard de déclaration au titre des année

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Vu la procédure suivante :

La société Autobus aixois a demandé au tribunal administratif de Montreuil la restitution des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2008, ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties. Par un jugement n° 0913154 du 12 juillet 2011, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 11VE03330 du 23 avril 2013, la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les pénalités pour retard de déclaration au titre des années 2006 et 2007, d'un montant total de 60 432 euros, a rejeté le surplus des conclusions de la requête d'appel formée contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 août 2013, 11 novembre 2013 et 23 février 2015, la société Autobus aixois demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 8 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens au titre de l'article R. 761-1 du même code.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Japiot, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la société Autobus Aixois ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 1er juin 2015, présentée par la société Autobus aixois ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Autobus aixois, délégataire de service public qui exploite un réseau de transport public de voyageurs, a réclamé la restitution des cotisations de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2006 à 2008 ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 23 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les pénalités pour retard de déclaration au titre des années 2006 et 2007, a rejeté le surplus des conclusions de son appel contre le jugement du 12 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande de restitution ;

Sur les conclusions relatives aux intérêts de retard :

2. Considérant que, postérieurement à l'introduction du pourvoi, l'administration a prononcé le dégrèvement des intérêts de retard en litige ; que, par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette la demande de la société Autobus aixois tendant à la restitution de ces intérêts ;

Sur les autres conclusions du pourvoi :

3. Considérant qu'aux termes du 1 de 231 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, (...) à la charge des personnes ou organismes, à l'exception des collectivités locales, de leurs régies personnalisées mentionnées à l'article L. 1412-2 du code général des collectivités territoriales et de leurs groupements, des services départementaux de lutte contre l'incendie, des centres d'action sociale dotés d'une personnalité propre lorsqu'ils sont subventionnés par les collectivités locales, du centre de formation des personnels communaux, des caisses des écoles (...), qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée./ (...) " ; qu'aux termes de l'article 1654 du même code : " Les (...) exploitations industrielles ou commerciales de l'Etat ou des collectivités locales, les entreprises concessionnaires ou subventionnées (...) doivent sous réserve des dispositions des articles 133, 207, 208, 1040, 1382, 1394 et 1449 à 1463 acquitter, dans les conditions de droit commun, les impôts et taxes de toute nature auxquels seraient assujetties des entreprises privées effectuant les mêmes opérations./ (...) " ;

4. Considérant, en premier lieu, que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que les subventions versées par les collectivités locales devaient être incluses dans le dénominateur du rapport mentionné par les dispositions précitées du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dès lors qu'il résulte des termes mêmes de la loi que le chiffre d'affaires total s'entend du total des recettes et autres produits, y compris ceux qui correspondent à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, sans que la société puisse utilement faire valoir que le terme " d'opérations " devrait être entendu au sens strict que lui donnent les articles 1 et 2 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 sur la taxe sur la valeur ajoutée, cette directive n'étant pas applicable à la taxe sur les salaires ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, ne l'a pas entaché de contradiction de motifs et n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le personnel dit " roulant ", assurant le transport des voyageurs par bus, et le personnel administratif ne pouvaient être regardés comme mettant en oeuvre des cycles distincts d'opérations ni, par suite, comme relevant de secteurs distincts d'activité pour le calcul du rapport mentionné au point 4 ci-dessus ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. " ; qu'aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à cette convention : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international./ Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. " ; qu'il résulte de ces stipulations qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères rationnels en rapport avec les buts de la loi ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 1654 du code général des impôts, citées au point 3, que les exploitations industrielles ou commerciales des collectivités territoriales, quelle qu'en soit la forme, doivent acquitter la taxe sur les salaires à laquelle seraient assujetties des entreprises privées effectuant les mêmes opérations ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que ces dispositions institueraient une différence de traitement, en matière d'assujettissement à la taxe sur les salaires, entre les régies de transport public de voyageurs et les entreprises délégataires assurant les mêmes opérations qu'elles et seraient, pour ce motif, incompatibles avec les stipulations combinées précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, ne peut qu'être écarté ; que ce motif de pur droit doit être substitué au motif erroné retenu par l'arrêt attaqué ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Autobus aixois n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu de laisser la contribution pour l'aide juridique à sa charge ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt du 23 avril 2013 en tant qu'il rejette la demande de la société Autobus aixois tendant à la restitution des intérêts de retard en litige.

Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la société Autobus aixois est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Autobus aixois et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème / 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 371162
Date de la décision : 17/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 jui. 2015, n° 371162
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Japiot
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:371162.20150617
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