La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/05/2015 | FRANCE | N°388469

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 20 mai 2015, 388469


Vu la procédure suivante :

La Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil de la décharger de la fraction de la taxe de risque systémique qu'elle a acquittée au titre de l'année 2011 en application de l'article 235 ter ZE du code général des impôts à raison des actifs pondérés par les risques de ses filiales étrangères, pour un montant de 22 194 500 euros. A l'appui de cette demande, elle a produit un mémoire, enregistré le 12 janvier 2015 au greffe du tribunal administratif, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novem

bre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, par lequel ...

Vu la procédure suivante :

La Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil de la décharger de la fraction de la taxe de risque systémique qu'elle a acquittée au titre de l'année 2011 en application de l'article 235 ter ZE du code général des impôts à raison des actifs pondérés par les risques de ses filiales étrangères, pour un montant de 22 194 500 euros. A l'appui de cette demande, elle a produit un mémoire, enregistré le 12 janvier 2015 au greffe du tribunal administratif, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 1407972 du 26 février 2015, enregistrée le 5 mars 2015 au secrétariat de la section du contentieux, le président de la première chambre du tribunal administratif de Montreuil, avant qu'il soit statué sur cette demande, a décidé, en application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du II de l'article 235 ter ZE du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code général des impôts ;

- le code monétaire et financier ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Anton, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la Société Générale ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 mai 2015, présentée pour la Société Générale ;

1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes du II de l'article 235 ter ZE du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la taxe de risque systémique due au titre de l'année 2011 : " L'assiette de la taxe de risque systémique est constituée par les exigences minimales en fonds propres permettant d'assurer le respect des ratios de couverture ou du niveau de fonds propres adéquat (...) définies au cours de l'exercice clos l'année civile précédente. Les exigences minimales en fonds propres sont appréciées sur base consolidée pour les personnes (...) appartenant à un groupe (...) " ; que le I du même article assujettit à une taxe de risque systémique au titre de leur activité exercée au 1er janvier de chaque année les entreprises mentionnées aux 1° à 4° du A du I de l'article L. 612-2 du code monétaire et financier, soumises au contrôle de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution pour le respect de leurs ratios de couverture et de division des risques ou de leur niveau de fonds propres ; qu'il résulte notamment de ces dispositions que l'assiette de cette taxe inclut, sur une base consolidée, l'ensemble des actifs pondérés par les risques de telles entreprises, y compris ceux de leurs filiales étrangères ;

3. Considérant qu'en vertu du I de l'article 235 ter ZE du code général des impôts, seules des entreprises soumises au contrôle de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sont redevables de la taxe de risque systémique ; qu'il résulte également de l'article L. 312-4 du code monétaire et financier que le bénéfice de l'intervention du fonds de garantie des dépôts et de résolution, auquel elles doivent adhérer en vertu de ce même article, est subordonné à la demande, à la proposition ou à la saisine de cette Autorité ; que, toutefois, le régime en cause n'a pas pour but de financer un tel fonds, dont l'objet est d'indemniser les déposants en cas d'indisponibilité de leurs dépôts ou autres fonds remboursables du public, mais, à des fins d'internalisation et, ainsi, de prévention d'une prise de risque excessive, d'intégrer dans les charges de ces entreprises le coût des dommages susceptibles d'être causés à l'économie française par les crises financières pour permettre à l'Etat d'y faire face, en mettant à la charge des institutions financières susceptibles de faire courir un risque systémique en France, compte tenu de leurs engagements et des risques correspondants, une taxe proportionnelle aux montants de ces engagements pondérés par les risques que prennent ces entreprises dans la conduite de leur activité en France et à l'étranger ;

4. Considérant, d'une part, qu'au regard de cet objet et contrairement à ce que soutient la Société Générale, une banque soumise à la taxe de risque systémique à raison des actifs pondérés par leurs risques de ses filiales étrangères n'est ni placée dans une situation différente de celle d'une banque dont l'ensemble des actifs ainsi pondérés serait situé exclusivement en France, ni traitée différemment ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du II de l'article 235 ter ZE du code général des impôts méconnaîtraient le principe d'égalité devant la loi fiscale en fixant l'assiette de la taxe en cause sur une base consolidée doit être écarté ;

5. Considérant, d'autre part, qu'en instaurant une taxe proportionnelle aux exigences minimales en fonds propres permettant d'assurer le respect des ratios de couverture ou du niveau de fonds propres adéquat, lesquels sont eux-mêmes fonction des actifs pondérés par les risques, le régime en cause est fondé sur un critère objectif et rationnel en fonction des buts poursuivis ; que si la société soutient que la charge de cette imposition serait excessive, elle se borne à invoquer, à l'appui de cette argumentation, le seul fait que l'assiette de la taxe comprend des actifs pondérés qui n'auraient pas dû être pris en compte ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient le principe d'égalité devant les charges publiques doit également être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les dispositions du II de l'article 235 ter ZE du code général des impôts porteraient atteinte aux principes d'égalité devant la loi et les charges publiques garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui ne soulève pas une question nouvelle, ne présente pas non plus un caractère sérieux ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Société Générale.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Société Générale et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au tribunal administratif de Montreuil.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 388469
Date de la décision : 20/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 20 mai. 2015, n° 388469
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Anton
Rapporteur public ?: Mme Nathalie Escaut
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:388469.20150520
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award