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11/05/2015 | FRANCE | N°369257

France | France, Conseil d'État, 10ème / 9ème ssr, 11 mai 2015, 369257


Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0812980 du 26 mai 2011, le tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 11VE02779 du 14 février 2013, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par Mme A...à l'encontre de ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoi

re complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 juin 2013, 9 septem...

Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0812980 du 26 mai 2011, le tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 11VE02779 du 14 février 2013, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par Mme A...à l'encontre de ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 juin 2013, 9 septembre 2013 et 6 octobre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Timothée Paris, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de Mme B...A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL Al'Sev Express, dont Mme A... était associée, l'administration fiscale a procédé à la rectification du revenu imposable de cette dernière au titre, notamment, des années 2004 et 2005 ; qu'elle a, à cette fin, d'une part, rapporté au revenu imposable de l'intéressée le montant des dividendes qui lui avaient été versés par la société au cours de l'année 2005, sans le bénéfice de l'abattement de 50 % alors prévu par les dispositions du 2° du 3 de l'article 158 du code général des impôts ; qu'elle a, d'autre part, rapporté à ce même revenu le montant des sommes regardées comme distribuées en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts à la suite de rectifications apportées au résultat de la société ; que Mme A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 février 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 26 mai 2011 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondant à ces impositions, mises à sa charge au titre des années 2004 et 2005 en conséquence de ces rectifications ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'en application du 2° du 3 de l'article 158 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2005, les revenus de capitaux mobiliers " distribués par les sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés ou d'un impôt équivalent ou soumises sur option à cet impôt, ayant leur siège dans un Etat de la Communauté européenne ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur les revenus et résultant d'une décision régulière des organes compétents, sont retenus, pour le calcul de l'impôt sur le revenu, pour 50 % de leur montant " ;

3. Considérant que, pour l'application de ces dispositions, une décision de distribution de dividendes n'est irrégulière que si elle n'a pas été prise par l'organe compétent, si elle est le résultat d'une fraude ou si elle n'entre dans aucun des cas pour lesquels le code de commerce autorise la distribution de sommes prélevées sur les bénéfices ;

4. Considérant que, pour juger irrégulière la distribution de dividendes décidée par l'assemblée générale des associés de la SARL Al'Sev Express du 10 mai 2005, la cour administrative d'appel de Versailles s'est fondée sur ce que cet organe avait décidé une distribution de bénéfices en étant composée, notamment, de MmeC..., en qualité d'associée de la société, et non en qualité de mandataire de son époux, alors qu'elle avait cédé à ce dernier, le 3 janvier 2005, l'intégralité de ses parts sociales ; que, toutefois, ces circonstances ne permettaient pas de regarder la distribution comme n'ayant pas été prise par l'assemblée générale, ni comme étant entachée de fraude, ni comme n'entrant pas dans les cas dans lesquels le code de commerce autorise la distribution de sommes prélevées sur les bénéfices ; que la cour a ainsi entaché son arrêt d'erreur de droit ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler celui-ci en tant qu'il s'est prononcé sur les suppléments d'imposition résultant de la réintégration, sans le bénéfice de l'abattement de 50 % alors prévu par les dispositions du 2° du 3 de l'article 158 du code général des impôts, des dividendes versés à Mme A...par la société Al'Sev Express au cours de l'année 2005 ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les revenus de capitaux mobiliers assignés à Mme A...au titre des années 2004 et 2005 sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts en conséquence des rectifications apportées au résultat de la SARL Al'Sev Express avaient pour origine la réintégration, dans ce résultat, de sommes comptabilisées en charges de sous-traitance correspondant à des prestations facturées par la société TLF ; qu'en estimant que l'administration fiscale rapportait la preuve de l'existence et du montant de ces distributions, dès lors que celle-ci faisait valoir que l'entreprise TLF n'avait été immatriculée qu'au cours de l'exercice 2006, que son gérant avait confirmé qu'elle n'avait facturé aucune prestation pour le compte de la SARL Al'Sev Express, qu'aucun contrat de sous-traitance n'avait été conclu entre les deux sociétés et que les factures produites n'étaient pas régulières, alors que Mme A...se bornait à soutenir que les prestations étaient réelles et qu'en l'absence de comptabilisation de ces charges, le taux de marge brut réalisé par la société serait irréaliste, la cour, qui n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit, s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce exempte de dénaturation ;

6. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle ont été assignées les pénalités en litige : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de:/ (...) b. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses " ;

7. Considérant que la cour administrative d'appel de Versailles, en estimant que l'administration rapportait la preuve du bien-fondé des pénalités pour manoeuvres frauduleuses du seul fait du recours, par MmeA..., à des factures de sous-traitance fictives, alors que l'intéressée se bornait, dans ses écritures d'appel, à contester les pénalités en conséquence de sa demande tendant à la décharge des droits auxquels celles-ci correspondaient, a donné aux faits qu'elle a souverainement appréciés une exacte qualification juridique ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...est seulement fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur les suppléments d'imposition résultant de la réintégration, sans le bénéfice de l'abattement de 50 % alors prévu par les dispositions du 2° du 3 de l'article 158 du code général des impôts, des dividendes versés par la société Al'Sev Express au cours de l'année 2005 ;

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 14 février 2013 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur les suppléments d'imposition résultant de la réintégration, sans le bénéfice de l'abattement de 50 % alors prévu par les dispositions du 2° du 3 de l'article 158 du code général des impôts, des dividendes versés à Mme A...par la société Al'Sev Express au cours de l'année 2005.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 10ème / 9ème ssr
Numéro d'arrêt : 369257
Date de la décision : 11/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES. REVENUS DISTRIBUÉS. DIVERS. - ABATTEMENT DE 50% DES REVENUS DE CAPITAUX MOBILIERS DISTRIBUÉS PAR LES SOCIÉTÉS PASSIBLES DE L'IS (ART. 158 DU CGI) - CONDITION - DÉCISION RÉGULIÈRE DES ORGANES COMPÉTENTS - NOTION DE RÉGULARITÉ AU SENS DE CES DISPOSITIONS.

19-04-02-03-01-03 Le 2° du 3 de l'article 158 du code général des impôts (CGI), conditionne l'abattement de 50% consentis sur les revenus de capitaux mobiliers distribués par les sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés (IS) ou d'un impôt équivalent à une décision régulière des organes compétents. Pour l'application de ces dispositions, une décision de distribution de dividendes n'est irrégulière que si elle n'a pas été prise par l'organe compétent, si elle est le résultat d'une fraude ou si elle n'entre dans aucun des cas pour lesquels le code de commerce autorise la distribution de sommes prélevées sur les bénéfices.


Publications
Proposition de citation : CE, 11 mai. 2015, n° 369257
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Timothée Paris
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:369257.20150511
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