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29/04/2015 | FRANCE | N°366838

France | France, Conseil d'État, 5ème / 4ème ssr, 29 avril 2015, 366838


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mars et 14 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL Générations RNT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2013-100 du 15 janvier 2013 du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) l'autorisant à exploiter un service de radio de catégorie D par voie hertzienne terrestre en mode numérique dénommé Générations, en tant qu'elle ne l'autorise à émettre que sur un canal du multiplex 6 correspondant à

un allotissement local ;

2°) d'enjoindre au CSA de lui délivrer à Paris l'autoris...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mars et 14 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL Générations RNT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 2013-100 du 15 janvier 2013 du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) l'autorisant à exploiter un service de radio de catégorie D par voie hertzienne terrestre en mode numérique dénommé Générations, en tant qu'elle ne l'autorise à émettre que sur un canal du multiplex 6 correspondant à un allotissement local ;

2°) d'enjoindre au CSA de lui délivrer à Paris l'autorisation sollicitée pour un allotissement étendu ou, subsidiairement, pour un allotissement intermédiaire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie Gautier-Melleray, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de la SARL Générations RNT ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 26 mars 2008, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a procédé à un appel aux candidatures pour l'édition de services de radio multiplexés diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique à temps complet ou partagé ; qu'en raison de l'augmentation imprévue, postérieurement à l'appel aux candidatures, du volume de fréquences hertziennes disponibles, il a reporté provisoirement la délivrance des autorisations puis, par sa décision n° 2012-234 du 12 avril 2012, a rouvert l'appel aux candidatures sur une base modifiée ; que cet appel modifié, qui portait sur les zones de Paris, Nice et Marseille, invitait les éditeurs à choisir une ou plusieurs des zones concernées et à indiquer le ou les types d'allotissement (local, intermédiaire ou étendu) qu'ils souhaitaient se voir affecter, en mentionnant le cas échéant un ordre de préférence ; que la SARL Générations RNT s'est portée candidate aux trois types d'allotissements dans les zones de Nice et Paris et aux allotissements intermédiaire et local à Marseille ; que, par sa décision n° 2013-100 du 15 janvier 2013, le Conseil supérieur de l'audiovisuel lui a délivré dans les trois zones un canal d'un multiplex correspondant à un allotissement local ; que sa requête doit être regardée comme tendant à l'annulation de la décision relative à la zone de Paris, en tant qu'elle ne l'autorise à émettre que sur un allotissement local alors qu'elle avait sollicité à titre principal un allotissement étendu ou, à défaut, intermédiaire ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : " Les refus d'autorisation sont notifiés aux candidats et motivés " ; qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, dont l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 n'écarte pas l'application : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) " ; que si la décision accordant à la société requérante un canal correspondant à un allotissement local emporte implicitement le rejet de sa candidature en tant qu'elle portait sur un allotissement étendu ou intermédiaire, il ne ressort pas des pièces du dossier que la SARL Générations RNT ait sollicité la communication des motifs de ce rejet ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'il serait illégal faute d'être motivé ne saurait être accueilli ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

3. Considérant que l'article 29-1 de la loi du 30 septembre 1986, qui définit les conditions dans lesquelles est autorisée la diffusion de services de radio par voie hertzienne terrestre en mode numérique, dispose que : " (...) II. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel accorde les autorisations d'usage de la ressource radioélectrique aux éditeurs de services en appréciant l'intérêt de chaque projet au regard des impératifs prioritaires mentionnés à l'article 29 et des critères mentionnés aux 1° à 5° du même article. / Le Conseil supérieur de l'audiovisuel accorde le droit d'usage aux services de radio diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique en tenant également compte de la cohérence des propositions formulées par les candidats en matière de regroupement technique et commercial avec d'autres services. / Dans la limite de la disponibilité des ressources radioélectriques, il autorise en priorité les services de radio préalablement autorisés en mode analogique sur la base de l'article 29 qui sont reçus dans la même zone géographique. / Dans la mesure de la ressource radioélectrique disponible et au vu des propositions de regroupement formulées par les candidats, le Conseil supérieur de l'audiovisuel précise sur quelle fréquence s'exerce le droit d'usage accordé à chaque service en veillant à la cohérence technique et commerciale des regroupements ainsi constitués. / (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le Conseil supérieur de l'audiovisuel, estimant que le programme " Générations " présentait un plus grand intérêt pour le public que ceux proposés par d'autres candidats, au regard des impératifs prioritaires mentionnés à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 et des critères prévus aux 1° à 5° du même article, a autorisé la société requérante à le diffuser par voie hertzienne terrestre en mode numérique dans la zone de Paris ; que le conseil supérieur a indiqué devant le Conseil d'Etat avoir tenu compte, pour décider que le service serait diffusé sur le multiplex 6, correspondant à un allotissement local, de la nécessité, mentionnée par la loi, d'assurer la cohérence technique et commerciale des services proposés sur les différents multiplex ; que la seule circonstance, invoquée par la société, qu'elle exploite depuis une quinzaine d'années en Ile-de-France un service radiophonique diffusé par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence dont le répertoire musical serait très large et qui se serait imposé comme " la radio de référence en matière d'information urbaine " n'est pas de nature à faire regarder le choix effectué par le CSA comme entaché d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation ;

5. Considérant que le moyen tiré de ce que ce choix méconnaîtrait les dispositions du II de l'article 29-1 de la loi du 30 septembre 1986 accordant une priorité pour l'octroi d'autorisations en mode numérique aux services de radio préalablement autorisés en mode analogique dans la même zone géographique n'est pas assorti des précisions nécessaires pour que le juge de l'excès de pouvoir puisse en apprécier le bien fondé ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque, en tant qu'elle ne lui accorde qu'un allotissement local ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction et celles qui tendent à ce qu'une somme lui soit accordée en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SARL Générations RNT est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SARL Générations RNT et au Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Copie en sera adressée pour information à la ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 5ème / 4ème ssr
Numéro d'arrêt : 366838
Date de la décision : 29/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - QUESTIONS GÉNÉRALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - DÉCISION IMPLICITE DU CSA - OBLIGATION DE COMMUNIQUER LES MOTIFS À LA DEMANDE DU PÉTITIONNAIRE (ART - 5 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979) - EXISTENCE.

01-03-01-02-01 Décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Si l'article 32 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 prévoit que « Les refus d'autorisation sont notifiés aux candidats et motivés », cet article n'écarte pas l'application de l'article 5 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 aux décisions implicites du CSA.

RADIO ET TÉLÉVISION - CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AUDIOVISUEL - DÉCISION IMPLICITE DU CSA - OBLIGATION DE COMMUNIQUER LES MOTIFS À LA DEMANDE DU PÉTITIONNAIRE (ART - 5 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979) - EXISTENCE [RJ1].

56-01 Décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Si l'article 32 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 prévoit que « Les refus d'autorisation sont notifiés aux candidats et motivés », cet article n'écarte pas l'application de l'article 5 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 aux décisions implicites du CSA.... ,,Une décision accordant au pétitionnaire un canal correspondant à un allotissement local emporte implicitement le rejet de sa candidature en tant qu'elle portait sur un allotissement étendu ou intermédiaire. Le CSA doit donc communiquer les motifs de cette décision implicite à la demande du pétitionnaire [RJ2].

RADIO ET TÉLÉVISION - SERVICES PRIVÉS DE RADIO ET DE TÉLÉVISION - SERVICES DE RADIO - OCTROI DES AUTORISATIONS - DÉCISION IMPLICITE DU CSA - OBLIGATION DE COMMUNIQUER LES MOTIFS À LA DEMANDE DU PÉTITIONNAIRE (ART - 5 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979) - EXISTENCE [RJ1].

56-04-01-01 Décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Si l'article 32 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 prévoit que « Les refus d'autorisation sont notifiés aux candidats et motivés », cet article n'écarte pas l'application de l'article 5 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 aux décisions implicites du CSA.... ,,Une décision accordant au pétitionnaire un canal correspondant à un allotissement local emporte implicitement le rejet de sa candidature en tant qu'elle portait sur un allotissement étendu ou intermédiaire. Le CSA doit donc communiquer les motifs de cette décision implicite à la demande du pétitionnaire [RJ2].


Références :

[RJ1]

Ab. jur. CE, 12 juillet 1993, Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Thot Communication, n° 124835, p. 217., ,

[RJ2]

Comp., sur l'absence d'obligation de motiver une autorisation accordée pour une puissance inférieure à celle demandée, CE, 20 mars 1991, Association Foyer rural du Valois Multien, n° 92028, T. p. 1173.


Publications
Proposition de citation : CE, 29 avr. 2015, n° 366838
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie Gautier-Melleray
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:366838.20150429
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