Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société LPG Systems a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1999, 2000 et 2001 à raison des exercices clos au cours des mêmes années et des pénalités y afférentes. Par un jugement n° 0703597 du 28 juin 2012, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 12LY02006 du 29 août 2013, la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir rejeté d'autres chefs de conclusions et décidé de procéder à une expertise pour le surplus, a déchargé la société LPG Systems des droits et pénalités au titre de l'impôt sur les sociétés correspondant aux sommes résultant de l'application d'un accord transactionnel conclu dans le cadre d'un différend survenu aux Etats-Unis d'Amérique.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 octobre 2013 et 23 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre délégué chargé du budget demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 de l'arrêt n° 12LY02006 du 29 août 2013 de la cour administrative d'appel de Lyon ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Romain Godet, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la société LPG Systems ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 57 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France. (...) " ; qu'aux termes de l'article 109 du même code : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (....) " ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Toutefois, ces bénéfices sont augmentés de ceux qui sont légalement exonérés dudit impôt, y compris les produits déductibles du bénéfice net en vertu du I de l'article 216, ainsi que des bénéfices que la société a réalisés dans des entreprises exploitées hors de France et diminués des sommes payées au titre de l'impôt sur les sociétés. " ;
2. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en application d'un accord transactionnel conclu le 13 janvier 2000 entre les sociétés LPG USA, LPG Systems, Luxar Corporation et ESC Medical, et ayant pour objet de mettre fin à un différend survenu aux Etats-Unis d'Amérique, la société LPG USA, filiale américaine de la société LPG Systems, a bénéficié du versement d'une indemnité et de l'attribution de stock-options sur les titres de la société ESC Medical ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1999, 2000 et 2001, l'administration a réintégré au résultat fiscal de la société LPG Systems, en application de l'article 57 du code général des impôts, les sommes résultant du versement de cette indemnité ainsi que des gains issus de l'attribution et de l'exercice de ces stock-options, qu'elle a regardées comme un avantage abandonné par la société LPG Systems à la société LPG USA ; que, par les articles 1er et 2 de l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Lyon a réduit de 1 970 117 euros au titre de l'année 2000 et de 2 323 180 euros au titre de l'année 2001 les bases d'imposition de la société à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles et l'a déchargée des droits et pénalités correspondant à cette réduction, au motif que ces sommes ne pouvaient être regardées comme des avantages abandonnés par la société LPG Systems ou ne pouvaient être imposées au titre de l'année 2001 ;
3. Considérant que, sous réserve de dénaturation, il n'appartient pas au Conseil d'Etat, juge de cassation, de contrôler l'interprétation faite par les juges du fond de la commune intention des parties à un contrat de transaction ;
4. Considérant, en premier lieu, que dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation, la cour a estimé, eu égard au montant du préjudice subi par la société LPG USA à raison des agissements des sociétés ESC Medical et Luxar Corporation, tel qu'il ressortait des éléments présentés par les parties, que seul le versement d'une somme de 3,5 millions de dollars en application de l'accord transactionnel du 13 janvier 2000 pouvait être regardé comme la contrepartie de ce préjudice et que, par suite, l'attribution, en plus de cette somme, de stock-options sur les titres de la société ESC Medical n'avait pas pour objet d'indemniser ce préjudice ; qu'ainsi, elle a pu, sans entacher son arrêt de dénaturation, juger que l'attribution de ces stock-options à la société LPG USA constituait un avantage qui n'était justifié dans la transaction par aucune contrepartie alors que la société LPG Systems, pourtant partie à la transaction, n'avait bénéficié d'aucun versement de la part des sociétés ESC Medical et Luxar Corporation ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'après avoir relevé que les stipulations de l'accord transactionnel prévoyaient, comme contrepartie aux obligations souscrites par les sociétés Luxar Corporation et ESC Medical, l'attribution de stock-options sur les titres de cette dernière, la cour a pu, dans le cadre d'une appréciation souveraine exempte de dénaturation, juger que la contrepartie prévue par l'accord transactionnel et abandonnée par la société LPG Systems à la société LPG USA consistait dans la seule valeur de l'option d'achat ou de souscription de ces titres, à la date de son attribution ; que dès lors que n'était pas en cause la taxation des gains résultant de la levée de l'option et de la vente des titres de ESC Medical chez la société LPG USA, et qu'il n'était pas contesté devant elle que cette attribution était intervenue au cours de l'année 2000, elle a pu juger, sans erreur de droit, que cet avantage ne pouvait pas être imposé au titre de l'année 2001 chez la société LPG Systems ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé ;
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société LPG Systems présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de ces dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du ministre délégué chargé du budget est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la société LPG Systems une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics ainsi qu'à la société LPG Systems.