Vu la procédure suivante :
La SA Conditionnement a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2001 dans le rôle de la commune de Chevigny-Saint-Sauveur. Par un jugement n° 1100576 du 28 février 2012, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 12LY01331 du 16 mai 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a déchargé la société des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2001.
Par un pourvoi enregistré le 12 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre délégué chargé du budget demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête d'appel de la SA Conditionnement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Laurent Olléon, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Tiffreau, Marlange, de la Burgade, avocat de la SA Conditionnement ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 février 2015, présentée pour la SA Conditionnement ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; que l'obligation faite par ces dispositions à l'administration de tenir à la disposition du contribuable qui les demande ou de lui communiquer, avant la mise en recouvrement des impositions, les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements ne peut porter que sur les documents effectivement détenus par les services fiscaux ; que dans l'hypothèse où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus non par l'administration fiscale, qui les a seulement consultés dans l'exercice de son droit de communication, mais par l'autorité judiciaire, il appartient à l'administration fiscale d'en informer l'intéressé afin de le mettre en mesure, s'il s'y croit fondé, d'en demander communication à cette autorité et, en tout état de cause, de porter à sa connaissance l'ensemble des renseignements fondant l'imposition que cette autorité lui avait permis de recueillir ;
2. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, dans le cadre d'une instance correctionnelle diligentée à l'encontre des associés gérants de la SA Conditionnement, le vice-président du tribunal de grande instance de Dijon, chargé de l'instruction, a autorisé l'administration fiscale à consulter les pièces du dossier pénal mais non à en prendre des copies ; que l'administration, pour établir les redressements litigieux au titre de l'exercice 2001, s'est exclusivement fondée sur le contenu des pièces de la procédure correctionnelle ainsi consultées, en particulier les procès-verbaux d'audition des différentes personnes entendues ; que la société, dûment informée de l'origine mais aussi de la teneur des renseignements obtenus dans l'exercice de son droit de communication par l'administration, a demandé à celle-ci, avant la mise en recouvrement des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution à cet impôt, de lui communiquer les documents correspondants ; que l'administration lui a répondu qu'elle ne pouvait lui donner satisfaction, faute de détenir ces pièces, et qu'il lui appartenait de présenter cette demande à l'autorité judiciaire ; que, toutefois, le magistrat chargé de l'instruction a opposé un refus à cette demande, formulée par l'avocat de la société, au motif que celui-ci n'était pas l'avocat d'une des parties au dossier pénal ;
3. Considérant qu'en jugeant que, dès lors que la SA Conditionnement n'avait pu obtenir communication d'une copie des pièces concernées, les impositions litigieuses avaient été établies selon une procédure irrégulière, en méconnaissance des droits de la défense, sans rechercher si l'administration avait porté à la connaissance de la société l'ensemble des renseignements fondant l'imposition que l'autorité judiciaire lui avait permis de recueillir dans l'exercice de son droit de communication, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, le ministre est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SA Conditionnement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 16 mai 2013 sont annulés.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : Les conclusions présentées par la SA Conditionnement au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à la SA Conditionnement.