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04/02/2015 | FRANCE | N°355645

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 04 février 2015, 355645


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 janvier et 5 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme Rallye, dont le siège est 83, rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris (75008), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société Rallye demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA04873 du 10 novembre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0400167 du 27 mai 2009 du tri

bunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande en décharge de la cotisat...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 janvier et 5 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme Rallye, dont le siège est 83, rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris (75008), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société Rallye demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA04873 du 10 novembre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0400167 du 27 mai 2009 du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de son exercice clos en 1993, d'autre part, à ce que la décharge sollicitée soit prononcée ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 91-1323 du 30 décembre 1991 ;

Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Béreyziat, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Tiffreau, Marlange, de la Burgade, avocat de la société anonyme Rallye ;

1. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 210 A et 210 B du code général des impôts, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2000, l'apport partiel d'actif d'une branche complète d'activité ou d'éléments assimilés bénéficiait du régime de faveur institué par le premier de ces articles lorsque la société apporteuse prenait l'engagement, dans l'acte d'apport, d'une part, de conserver pendant cinq ans les titres remis en contrepartie de cet apport, d'autre part, de calculer ultérieurement les plus-values de cession afférentes à ces mêmes titres par référence à la valeur que les biens apportés avaient, du point de vue fiscal, dans ses propres écritures ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société anonyme Rallye, qui avait pour activité la prise et la gestion de participations dans d'autres sociétés, a reçu, au cours de l'année 1983, 600 000 titres de la société Genty, qu'elle a inscrits à son bilan pour un montant de 367 020 000 francs, en contrepartie d'un apport partiel d'actif consenti à la seconde société, portant sur une branche complète d'activité et placé sous le régime de faveur prévu par les dispositions combinées des articles 210 A et 210 B du code général des impôts ; qu'entre les années 1984 et 1991, la société Rallye a procédé à de nouvelles acquisitions de titres de la société Genty, portant ainsi sa participation de 600 000 à 794 489 titres au 31 décembre 1991 ; que, le 4 novembre 1992, la société Rallye a cédé à la société Casino l'intégralité de la participation qu'elle détenait dans la société Genty et imputé, à ce titre, une moins-value de 111 830 686 francs sur le résultat de son exercice clos en 1993 ; qu'à l'issue d'une vérification ultérieure de la comptabilité de la société Rallye, l'administration fiscale a remis en cause le montant de cette moins-value et appliqué à cette dernière les modalités particulières de calcul prévues à l'article 210 B du code général des impôts ; que le supplément d'imposition litigieux procède de ce redressement ;

3. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour contester le calcul ainsi retenu par le vérificateur, la société Rallye a notamment soutenu, devant le juge de l'impôt, qu'elle avait procédé, le 9 janvier 1985, soit moins de cinq années après la réalisation de l'apport partiel d'actif en cause, à la cession de 980 des titres qu'elle détenait alors dans la société Genty et, de ce fait, mis fin à l'application du régime de faveur dont elle bénéficiait jusqu'alors ainsi, par suite, qu'à l'obligation dans laquelle elle se trouvait de calculer les plus-values ultérieures de cession afférentes à ces titres par référence à la valeur à laquelle les biens apportés étaient, du point de vue fiscal, inscrits dans ses propres écritures ; que, pour écarter ce moyen, la cour s'est fondée sur les dispositions du 6 de l'article 39 duodecies du code général des impôts, dans leur version issue des dispositions du II de l'article 25 de la loi du 30 décembre 1991 de finances rectificative pour 1991, aux termes desquelles : " Pour l'application du présent article, les cessions de titres compris dans le portefeuille sont réputées porter par priorité sur les titres de même nature acquis ou souscrits à la date la plus ancienne. / Pour l'application des dispositions de l'alinéa précédent, les titres reçus en rémunération d'un apport partiel d'actif soumis au régime prévu à l'article 210 B et ceux qui sont acquis ou souscrits indépendamment de l'opération d'apport constituent deux catégories distinctes de titres jusqu'à la fin du délai de cinq ans prévu à l'article 210 B. Les cessions de titres intervenues dans ce délai sont réputées porter en priorité sur les titres acquis ou souscrits indépendamment de l'opération d'apport (...) " ; que la cour en a déduit que la cession de titres qui serait intervenue le 9 janvier 1985 devait être réputée avoir porté exclusivement sur les titres, plus nombreux, acquis indépendamment de l'opération d'apport ; qu'elle a, par suite, jugé que, contrairement à ce que soutenait la société contribuable, cette cession n'avait pas mis fin à l'application du régime de faveur bénéficiant à cette opération ;

4. Mais considérant que le IX de l'article 25 de la loi de finances mentionnée ci-dessus prévoyait que : " Les dispositions du présent article s'appliquent aux opérations qui affectent les résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1992 (...) " ; que la nouvelle règle que le II de ces dispositions instituaient ne pouvait rétroactivement saisir des situations juridiquement constituées ; que, par ailleurs, le fait générateur de l'imposition de la plus-value résultant d'une cession de titres est constitué à la date à laquelle cette cession intervient ; qu'aux termes du deuxième alinéa du 6 de l'article 39 duodecies du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur le 9 janvier 1985 : " Pour l'application du présent article, les cessions de titres compris dans le portefeuille sont réputées porter par priorité sur les titres de même nature acquis ou souscrits à la date la plus ancienne " ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cession des titres de la société Genty qui serait intervenue le 9 janvier 1985 devait être réputée avoir porté sur les titres reçus moins de cinq ans plus tôt par la société Rallye en contrepartie de son apport partiel d'actif, la situation de la société cédante au regard de l'article 39 duodecies du code général des impôts étant juridiquement constituée à cette même date ; qu'il suit de là que cette cession, à la supposer intervenue, a définitivement mis fin au régime de faveur dont bénéficiait la société apporteuse, conformément aux dispositions de l'article 210 B du code général des impôts ; qu'étaient dépourvues d'incidence, sur ce point, tant l'adoption de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1991 que l'imputation sur l'exercice clos en 1993 de la moins-value correspondant à la cession par la société apporteuse, en novembre 1992, du reste des titres obtenus en contrepartie de l'apport ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la société Rallye est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 10 novembre 2011 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme Rallye et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 355645
Date de la décision : 04/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 04 fév. 2015, n° 355645
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Béreyziat
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP TIFFREAU, MARLANGE, DE LA BURGADE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:355645.20150204
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