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18/12/2014 | FRANCE | N°356234

France | France, Conseil d'État, 9ème ssjs, 18 décembre 2014, 356234


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL RDC Productions a demandé au tribunal administratif de Rouen la décharge de l'amende fiscale qui lui a été infligée en application de l'article 1740 ter du code général des impôts à raison des opérations effectuées au cours des années 2002 et 2003. Par un jugement n° 0702060 du 13 juillet 2010, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10DA01175 du 29 novembre 2011, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par la SARL RDC Productions

contre ce jugement.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire, un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL RDC Productions a demandé au tribunal administratif de Rouen la décharge de l'amende fiscale qui lui a été infligée en application de l'article 1740 ter du code général des impôts à raison des opérations effectuées au cours des années 2002 et 2003. Par un jugement n° 0702060 du 13 juillet 2010, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 10DA01175 du 29 novembre 2011, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par la SARL RDC Productions contre ce jugement.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 30 janvier, 30 avril et 20 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL RDC Productions demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10DA01175 du 29 novembre 2011 de la cour administrative d'appel de Douai ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marie Deligne, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SARL RDC Productions ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 1740 ter du code général des impôts, alors applicable : " Lorsqu'il est établi qu'une personne, à l'occasion de l'exercice de ses activités professionnelles, a travesti ou dissimulé l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, ou sciemment accepté l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom, elle est redevable d'une amende fiscale égale à 50 % des sommes versées ou reçues au titre de ces opérations ". Il appartient à l'administration, lorsqu'elle a mis en recouvrement une amende fiscale sur le fondement de ces dispositions, qui figurent désormais au I de l'article 1731 du même code, d'apporter la preuve que les faits retenus à l'encontre du redevable entrent bien dans leurs prévisions.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL RDC Productions s'est vu infliger l'amende fiscale prévue à l'article 1740 ter du code général des impôts, pour les montants de 90 800 euros au titre de l'année 2002 et 42 619 euros au titre de l'année 2003, au motif qu'elle aurait intentionnellement comptabilisé des factures de complaisance établies par la société Sharemead Ltd, domiciliée..., domiciliée.dans l'île de Man, pour des livraisons de biens qui ont fait l'objet de bons de commande adressés par la société requérante à la société Bos BV, domiciliée aux Pays-Bas

3. Pour rejeter l'appel formé par la SARL RDC Productions contre le jugement du tribunal administratif de Rouen rejetant sa demande de décharge de l'amende litigieuse, la cour administrative d'appel de Douai s'est principalement fondée sur le fait que les bons de commandes adressés à la société Bos BV ne correspondaient pas aux factures établies par la société Sharemead. En retenant un tel motif, alors qu'il ressortait des pièces du dossier d'appel que l'administration ne remettait plus en cause le fait que les factures litigieuses correspondaient aux bons de commande reçus par la société Bos BV, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Il résulte de l'instruction qu'au cours des années 2002 et 2003, la SARL RDC Productions a adressé à son fournisseur habituel, la société Bos BV, des bons de commandes de matériels. Certaines factures correspondant à des matériels qui lui ont effectivement été livrés par la société Bos BV lui ont été adressées, non par cette dernière mais par la société Sharemead Ltd. Les bons de commandes produits au dossier correspondent, au regard des dates et des montants, aux factures établies par la société Sharemead Ltd. Si l'administration fait valoir que la société requérante ne pouvait pas ignorer que les factures litigieuses ne provenaient pas de son fournisseur réel, elle ne conteste pas que ces factures correspondaient aux bons de commande émis par la société requérante. La circonstance que ni les bons de commande émis par la SARL RDC Productions, ni les factures émises par la société Sharemead Ltd, ne faisaient état d'un accord de facturation entre cette dernière et Bos BV, ni n'indiquaient que ces deux dernières sociétés appartenaient à un même groupe, ne sont de nature à établir que la société requérante avait l'intention de dissimuler à l'administration l'identité de son fournisseur réel. Dans ces conditions, l'administration n'apporte pas la preuve que la société requérante a sciemment accepté l'utilisation d'un prête-nom.

6. Il résulte de ce qui précède que la SARL RDC Productions est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'elle attaque, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande de décharge de l'amende fiscale qui lui a été infligée en application de l'article 1740 ter du code général des impôts, à raison des opérations effectuées au cours des années 2002 et 2003.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État, au titre de l'ensemble de la procédure, la somme de 5 000 euros à verser à la SARL RDC Productions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 29 novembre 2011 de la cour administrative d'appel de Douai et le jugement du 13 juillet 2010 du tribunal administratif de Rouen sont annulés.

Article 2 : La SARL RDC Productions est déchargée de l'amende fiscale qui lui a été infligée en application de l'article 1740 ter du code général des impôts à raison des opérations effectuées au cours des années 2002 et 2003.

Article 3 : L'État versera une somme de 5 000 euros à la SARL RDC Productions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SARL RDC Productions et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème ssjs
Numéro d'arrêt : 356234
Date de la décision : 18/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 déc. 2014, n° 356234
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marie Deligne
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:356234.20141218
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