La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2014 | FRANCE | N°369081

France | France, Conseil d'État, 5ème / 4ème ssr, 22 octobre 2014, 369081


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin et 3 septembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), dont le siège est 36 avenue du Général de Gaulle à Bagnolet Cedex (93175) ; l'ONIAM demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12NC01095 du 4 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son appel contre le jugement n° 1000675 du 10 avril 2012 du tribunal

administratif de Nancy en tant qu'il le condamne à verser à la Mutuell...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin et 3 septembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), dont le siège est 36 avenue du Général de Gaulle à Bagnolet Cedex (93175) ; l'ONIAM demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12NC01095 du 4 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son appel contre le jugement n° 1000675 du 10 avril 2012 du tribunal administratif de Nancy en tant qu'il le condamne à verser à la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), subrogée dans les droits de Mme A...et de la CPAM de la Haute-Saône, une somme de 26 144,15 euros à la suite de la contamination de Mme A... par le virus de l'hépatite C ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de la MAIF le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, notamment son article 102 ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, notamment son article 67 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Charles Touboul, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Roger, Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Etablissement français du sang et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la mutuelle assurance des instituteurs de france (MAIF) ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'ayant versé à Mme A...des indemnités réparant les préjudices ayant résulté pour elle de sa contamination par le virus de l'hépatite C, et ayant remboursé à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Haute-Saône les dépenses qu'elle avait exposées du fait de cette contamination, la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) a engagé, en sa qualité de subrogée dans les droits Mme A...et de la caisse, une action contre l'établissement français du sang (EFS) ; que, par un jugement du 10 avril 2012, le tribunal administratif de Nancy, après avoir constaté qu'en application du IV de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) se trouvait substitué à l'EFS, a condamné l'office à verser à la MAIF une somme de 26 144,15 euros ; que l'ONIAM se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son appel contre ce jugement ;

Sur l'obligation pour l'ONIAM substitué à l'EFS d'indemniser l'assureur subrogé dans les droits de la victime :

2. Considérant qu'aux termes premier alinéa du IV de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 : " A compter de la date d'entrée en vigueur du présent article, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales se substitue à l'Etablissement français du sang dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable " ; qu'il résulte de ces dispositions que, dans toute instance en cours à la date d'entrée en vigueur de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008, née d'une action en responsabilité dirigée contre l'EFS en sa qualité de fournisseur de produits sanguins auxquels est imputée la contamination de la victime, l'ONIAM, ainsi substitué à l'EFS, doit répondre, tant à l'égard de la victime que de toute personne subrogée dans ses droits, de l'ensemble des obligations qui incombaient initialement à l'EFS ;

3. Considérant qu'ayant versé à Mme A...et à la CPAM de Haute-Saône des indemnités réparant les dommages consécutifs à la contamination de Mme A...par le virus de l'hépatite C, la MAIF s'est trouvée subrogée dans les droits de l'intéressée et de la caisse à l'encontre de l'EFS et a engagé à ce titre devant la juridiction administrative une action dirigée contre cet établissement public, qui demeurait pendante à la date d'entrée en vigueur de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 ; que la substitution de l'ONIAM à l'EFS en cours d'instance, par l'effet des dispositions du IV de cet article, n'a pu avoir aucune incidence sur l'existence et l'étendue des droits de l'assureur subrogé ; qu'ainsi, après avoir estimé que le dommage était imputable aux produits sanguins transfusés, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en condamnant l'ONIAM à indemniser la MAIF ;

Sur la possibilité pour l'assureur subrogé de se prévaloir de la présomption d'origine transfusionnelle de la contamination de la victime :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : " En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur./ Cette disposition est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable " ; que la présomption instituée par ces dispositions est susceptible d'être invoquée tant par les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime de la contamination que par la victime elle-même ; que, par suite, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit en mettant en oeuvre la présomption légale pour condamner l'ONIAM à indemniser tant la CPAM de Haute-Saône que Mme A...;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ONIAM n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ; que, par suite, son pourvoi doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros à verser à la MAIF au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'ONIAM est rejeté.

Article 2 : L'ONIAM versera à la MAIF la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la Mutuelle assurance des instituteurs de France et à l'Etablissement français du sang.


Synthèse
Formation : 5ème / 4ème ssr
Numéro d'arrêt : 369081
Date de la décision : 22/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITÉ EN RAISON DES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTÉ - ÉTABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - CONTAMINATION PAR LE VIRUS DE L'HÉPATITE C - RÉGIME DE PRÉSOMPTION DE L'ORIGINE TRANSFUSIONNELLE (ART - 102 DE LA LOI DITE KOUCHNER N° 2002-303 DU 4 MARS 2002) - BÉNÉFICE - VICTIME OU PERSONNE SUBROGÉE DANS SES DROITS.

60-02-01-01 La présomption instituée par l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C, est susceptible d'être invoquée tant par les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime de la contamination que par la victime elle-même.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DÉBITEURS DE L'INDEMNITÉ - AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SÉCURITÉ SOCIALE - SUBROGATION - SUBROGATION DE L'ASSUREUR - 1) SUBSTITUTION DE L'ONIAM À L'EFS DANS LES LITIGES INDEMNITAIRES RELATIFS À DES CONTAMINATIONS CAUSÉES PAR DES PRODUITS SANGUINS - ETENDUE - CRÉANCES DE LA VICTIME ET DE TOUTE PERSONNE SUBROGÉE DANS SES DROITS - 2) CONTAMINATION PAR LE VIRUS DE L'HÉPATITE C - RÉGIME DE PRÉSOMPTION DE L'ORIGINE TRANSFUSIONNELLE (ART - 102 DE LA LOI DITE KOUCHNER N° 2002-303 DU 4 MARS 2002) - BÉNÉFICE - VICTIME OU PERSONNE SUBROGÉE DANS SES DROITS.

60-05-03-02 1) Il résulte du premier alinéa du IV de l'article 67 de la loi n° 2008-1330 17 décembre 2008, que dans toute instance en cours lors de l'entrée en vigueur de ces dispositions, née d'une action en responsabilité dirigée contre l'établissement français du sang (EFS) en sa qualité de fournisseur de produits sanguins auxquels est imputée une contamination, l'office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) est substitué à l'EFS et doit répondre, tant à l'égard de la victime que de toute personne subrogée dans ses droits, de l'ensemble des obligations qui incombaient initialement à l'EFS.... ,,2) La présomption instituée par l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C, est susceptible d'être invoquée tant par les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime de la contamination que par la victime elle-même.


Publications
Proposition de citation : CE, 22 oct. 2014, n° 369081
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Charles Touboul
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP ROGER, SEVAUX, MATHONNET ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:369081.20141022
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award