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15/10/2014 | FRANCE | N°346097

France | France, Conseil d'État, 10ème ssjs, 15 octobre 2014, 346097


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

1° M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 8 juillet 2008 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Strasbourg confirmant la sanction de placement en cellule disciplinaire pour une durée de quarante-cinq jours qui lui avait été infligée. Par un jugement n° 0803184 du 25 juin 2009, le tribunal administratif de Strasbourg a réformé la sanction, la ramenant à trente jours d'encellulement disciplinaire.

Par un arrêt n° 09NC01261 du 18 fé

vrier 2010, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé, à la demande du garde ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

1° M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 8 juillet 2008 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Strasbourg confirmant la sanction de placement en cellule disciplinaire pour une durée de quarante-cinq jours qui lui avait été infligée. Par un jugement n° 0803184 du 25 juin 2009, le tribunal administratif de Strasbourg a réformé la sanction, la ramenant à trente jours d'encellulement disciplinaire.

Par un arrêt n° 09NC01261 du 18 février 2010, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé, à la demande du garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, le jugement du 25 juin 2009 du tribunal administratif de Strasbourg et a rejeté les conclusions de M.C....

2° M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 10 décembre 2007 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Strasbourg confirmant la sanction de déclassement de son emploi d'auxiliaire de bibliothèque qui lui avait été infligée. Par un jugement n° 0800620 du 25 juin 2009, le tribunal administratif de Strasbourg a mis un terme aux poursuites disciplinaires engagées à son encontre.

Par un arrêt n° 09NC01260 du 18 février 2010, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé, à la demande du garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, le jugement du 25 juin 2009 du tribunal administratif de Strasbourg et, s'estimant saisie d'un recours pour excès de pouvoir, a rejeté les conclusions de M.D....

Procédure devant le Conseil d'Etat

1° sous le n° 346097, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 26 janvier 2011, 26 avril 2011, 25 août 2011 et 19 décembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C...demande au Conseil d'Etat:

1°) d'annuler l'arrêt n° 09NC01261 du 18 février 2010 de la cour administrative d'appel de Nancy ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° sous le n° 346098, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 janvier et 27 avril 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09NC01260 du 18 février 2010 de la cour administrative d'appel de Nancy ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu :

- les autres pièces des dossiers ;

- la décision du 21 février 2014 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. C...;

- la décision n° 2014-393 QPC du 25 avril 2014 du Conseil constitutionnel statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. C...;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jacques Reiller, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de M. C...et à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de M. D...;

Considérant ce qui suit :

1. Les deux pourvois soulèvent une question semblable. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision.

2. En ce qui concerne M.C..., détenu à.... Après avoir annulé le jugement du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, dans le cadre des pouvoirs de pleine juridiction qu'il s'était reconnus, avait réformé cette décision, la cour administrative d'appel de Nancy a, par l'arrêt du 18 février 2010 contre lequel M. C...se pourvoit en cassation, rejeté la demande présentée par l'intéressé devant le tribunal administratif.

3. En ce qui concerne M.D..., détenu à.... Après avoir annulé le jugement du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a mis fin aux poursuites disciplinaires dans le cadre des pouvoirs de pleine juridiction qu'il s'était reconnus, la cour administrative d'appel de Nancy a, par l'arrêt du 18 février 2010 contre lequel M. D...se pourvoit en cassation, rejeté la demande présentée par l'intéressé devant le tribunal administratif.

4. Lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions des articles 61-1 et 62 de la Constitution, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause, soit de décider que le législateur aura à prévoir une application aux instances en cours des dispositions qu'il aura prises pour remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il appartient au juge, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution de ce litige, le cas échéant d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ou le législateur.

5. Par sa décision n° 2014-393 QPC du 25 avril 2014, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l'article 728 du code de procédure pénale dans leur rédaction antérieure à la loi du 24 novembre 2009, aux termes desquelles : " Un décret détermine l'organisation et le régime intérieur des établissements pénitentiaires ", au motif que le législateur ne pouvait, sans méconnaître l'étendue de sa compétence, renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de déterminer les conditions dans lesquelles sont garantis les droits dont les personnes détenues continuent de bénéficier dans les limites inhérentes à la détention. Il a, dans cette même décision, jugé que la déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 728 du code de procédure pénale, dans sa rédaction antérieure à la loi du 24 novembre 2009, prenait effet à compter de la date de la publication de sa décision et qu'elle était applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date. Il résulte nécessairement de cette décision du Conseil constitutionnel et des motifs qui en sont le support que les dispositions réglementaires alors en vigueur des articles D. 249-1 à D. 251-8 du code de procédure pénale, prises en application de l'article 728 du même code pour fixer le régime des sanctions disciplinaires au sein des établissements pénitentiaires, ont été privées de base légale, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions individuelles prises sur leur fondement.

6. Pour statuer, par les arrêts attaqués du 18 février 2010, sur les appels de MM. C...etD..., la cour administrative d'appel de Nancy s'est fondée sur ces dispositions alors en vigueur des articles D. 249-1 à D. 251-8 du code de procédure pénale. Afin de préserver l'effet utile de la décision précitée du Conseil constitutionnel, il incombe au juge de cassation d'annuler, sans qu'il soit besoin pour lui d'examiner les autres moyens des pourvois dont il est saisi, les arrêts attaqués en tant que, après avoir annulé les jugements dont elle était saisie pour avoir statué en plein contentieux sur des recours pour excès de pouvoir, la cour administrative d'appel de Nancy, a nécessairement fait application, pour admettre la légalité des sanctions contestées devant elle, de ces dispositions.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler les affaires au fond au titre de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

8. Il résulte de ce qui précède que les sanctions dont les requérants demandaient l'annulation sont privées de base légale ; il y a lieu de faire droit en conséquence à leur demande d'annulation pour excès de pouvoir des décisions qu'ils attaquent, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de leur requêtes.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 3 000 euros à verser à M. C...et la somme de 1 500 euros à verser à M.D....

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 de chacun des arrêts n°s 09NC01261 et 09NC01260 du 18 février 2010 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.

Article 2: Les décisions du 10 décembre 2007 et du 8 juillet 2008 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Strasbourg sont annulées.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 3 000 euros à M. C...et une somme de 1 500 euros à M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...C..., à M. B...D...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 10ème ssjs
Numéro d'arrêt : 346097
Date de la décision : 15/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 15 oct. 2014, n° 346097
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jacques Reiller
Rapporteur public ?: Mme Delphine Hedary
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:346097.20141015
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