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23/07/2014 | FRANCE | N°379602

France | France, Conseil d'État, 10ème ssjs, 23 juillet 2014, 379602


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision de 2013 par laquelle la directrice de la maison centrale de Saint-Maur l'a soumis, certaines nuits, à un régime de surveillance renforcée. Par une ordonnance n° 1400678 du 18 avril 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Limoges a fait droit à sa demande.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi so

mmaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 mai et 3 juillet 2014 au secrétari...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision de 2013 par laquelle la directrice de la maison centrale de Saint-Maur l'a soumis, certaines nuits, à un régime de surveillance renforcée. Par une ordonnance n° 1400678 du 18 avril 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Limoges a fait droit à sa demande.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 mai et 3 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la garde des sceaux, ministre de la justice, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1400678 du juge des référés du tribunal administratif de Limoges du 18 avril 2014 ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de M.A.la maison centrale de Saint-Maur, a été maintenu sur le répertoire des personnes particulièrement signalées (DPS) par une décision du 23 octobre 2013

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Spinosi, avocat de M. A.la maison centrale de Saint-Maur, a été maintenu sur le répertoire des personnes particulièrement signalées (DPS) par une décision du 23 octobre 2013

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Le juge des référés du tribunal administratif de Limoges, saisi par M. A... sur le fondement de ces dispositions, a ordonné la suspension de l'exécution de la décision prise en 2013 par la directrice de la maison centrale de Saint-Maur de soumettre ce dernier à un régime de surveillance nocturne. La garde des sceaux, ministre de la justice, se pourvoit en cassation contre cette ordonnance.

Sur le pourvoi :

3. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence ". Le premier alinéa de l'article L. 522-1 du même code dispose que le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. L'article L. 522-3 précise qu'il peut se prononcer sans audience, ni instruction lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou qu'il est manifeste qu'elle est irrecevable ou mal fondée. Aux termes de l'article R. 522-8 : " L'instruction est close à l'issue de l'audience, à moins que le juge des référés ne décide de différer la clôture de l'instruction à une date postérieure dont il avise les parties par tous moyens. Dans ce dernier cas, les productions complémentaires déposées après l'audience et avant la clôture de l'instruction peuvent être adressées directement aux autres parties, sous réserve, pour la partie qui y procède, d'apporter au juge la preuve de ses diligences. / L'instruction est rouverte en cas de renvoi à une autre audience ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'obligation est faite au juge des référés, d'une part, d'aviser les parties de la date à laquelle il décide de différer la clôture de l'instruction et, d'autre part, hors le cas où il est fait application de l'article L. 522-3, de communiquer aux parties avant la clôture de l'instruction, par tous moyens, les pièces et mémoires soumis au débat contradictoire, qui servent de fondement à sa décision et qui comportent des éléments de fait ou de droit dont il n'a pas été antérieurement fait état au cours de la procédure. Lorsqu'il décide de communiquer, après la clôture de l'instruction, un mémoire qui a été produit par les parties avant ou après celle-ci, le juge des référés doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction. Il lui appartient, en pareil cas, sauf à fixer une nouvelle audience, d'informer les parties de la date et, le cas échéant, de l'heure à laquelle l'instruction sera close. Il ne saurait, par suite, rendre son ordonnance tant que l'instruction est ainsi rouverte.

5. En outre, aux termes de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative : " Les parties ou leur mandataire sont réputés avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été ainsi adressé, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties ou leur mandataire sont alertés de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par eux ".

6. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l'absence d'accusé de réception délivré par l'application informatique " Télérecours ", que la garde des sceaux, ministre de la justice, laquelle n'était pas représentée à l'audience publique qui s'était tenue la veille, aurait été informée de la décision du 17 avril 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Limoges a décidé de différer au même jour à 17 heures la clôture de l'instruction.

7. D'autre part, s'il est constant que le nouveau mémoire produit par M. A..., enregistré au greffe du tribunal administratif de Limoges le 17 avril 2014 a été communiqué à la garde des sceaux, ministre de la justice, à 17 h 20 le même jour, ce qui a eu pour effet de rouvrir l'instruction, il ne ressort pas des pièces de la procédure que le juge des référés aurait fait connaître à la garde des sceaux, ministre de la justice, la nouvelle date de clôture de l'instruction.

8. Il résulte de ce qui précède que le juge des référés du tribunal administratif a irrégulièrement statué. Dès lors, la garde des sceaux, ministre de la justice, est fondée, pour ce motif, à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de suspension en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

Sur la demande de suspension :

10. La condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de cette décision sur sa situation ou, le cas échéant, celle des autres personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

11. Il ressort des pièces du dossier que M.A..., détenu à.la maison centrale de Saint-Maur, a été maintenu sur le répertoire des personnes particulièrement signalées (DPS) par une décision du 23 octobre 2013 Par une lettre du 13 janvier 2014, la directrice de cet établissement pénitentiaire a confirmé à M. A...que cette décision motivait son placement sous un régime de surveillance nocturne renforcée. En l'espèce, ce régime consiste, deux nuits par semaine, choisies de manière aléatoire, à un contrôle visuel depuis l'extérieur de la cellule, au travers d'un oeilleton, avec allumage de la lumière, vers 23 h 45, puis vers 2 h 30 du matin, afin de s'assurer de la présence du détenu et de l'état des équipements de sécurité de sa cellule.

12. Si M. A...produit des certificats médicaux qui attestent de l'existence d'hypertension ainsi que des arrêts de travail, aucune de ces pièces n'établit de corrélation entre la mesure qu'il conteste et qui est impliquée par son inscription sur le répertoire des personnes particulièrement signalées et les conséquences dont il se plaint. Par suite, la condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du code de justice administrative ne saurait être regardée comme remplie.

13. Il résulte de ce qui précède que la demande de suspension présentée par M. A... ne peut qu'être rejetée.

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance n° 1400678 du juge des référés du tribunal administratif de Limoges du 18 avril 2004 est annulée.

Article 2 : La demande de suspension de la décision de 2013 de la directrice de la maison centrale de Saint-Maur, présentée par M. A...devant le juge des référés du tribunal administratif de Limoges, est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la garde des sceaux, ministre de la justice et à M. B... A.la maison centrale de Saint-Maur, a été maintenu sur le répertoire des personnes particulièrement signalées (DPS) par une décision du 23 octobre 2013


Synthèse
Formation : 10ème ssjs
Numéro d'arrêt : 379602
Date de la décision : 23/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2014, n° 379602
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle Lemesle
Rapporteur public ?: Mme Delphine Hedary
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:379602.20140723
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