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23/07/2014 | FRANCE | N°378678

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 23 juillet 2014, 378678


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 25 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, MM. A...-D... et B...C...demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n°2014-233 du 24 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Pas-de-Calais.

Ils soutiennent que le décret attaqué :

- est entaché d'irrégularité dès lors que la consultation du conseil départemental s'est faite dans des conditions irrégulière ;

- est illégal dès lors qu'il accroît les disparités démographi

ques et de superficie entre les cantons et, par suite, méconnaît l'égalité devant le suffrage ;...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 25 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, MM. A...-D... et B...C...demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n°2014-233 du 24 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Pas-de-Calais.

Ils soutiennent que le décret attaqué :

- est entaché d'irrégularité dès lors que la consultation du conseil départemental s'est faite dans des conditions irrégulière ;

- est illégal dès lors qu'il accroît les disparités démographiques et de superficie entre les cantons et, par suite, méconnaît l'égalité devant le suffrage ;

- est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il supprime le canton de Vimy et prive la commune de Vimy des dotations liées à son statut actuel de chef-lieu de canton.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code électoral ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 ;

- le décret n° 2012-1479 du 27 décembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Pourreau, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. A...-D... C...et de M. B...C...;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 191-1 du code électoral, résultant de la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral : " Le nombre de cantons dans lesquels seront élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité impaire supérieure si ce nombre n'est pas entier impair. / Le nombre de cantons dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à dix-sept. Il ne peut être inférieur à treize dans chaque département comptant entre 150 000 et 500 000 habitants ". Aux termes de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la même loi, applicable à la date du décret attaqué : " I. - Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil général qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. A l'expiration de ce délai, son avis est réputé rendu. / (...) III. - La modification des limites territoriales des cantons effectuée en application du I est conforme aux règles suivantes : / a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ; / b) Le territoire de chaque canton est continu ; / c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants ; / IV. - Il n'est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques ou par d'autres impératifs d'intérêt général. ".

2. Compte tenu de la réduction du nombre des cantons résultant de l'application de l'article L. 191-1 du code électoral, le décret attaqué a, sur le fondement de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, procédé à une nouvelle délimitation des cantons du département du Pas-de-Calais.

3. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa version actuellement en vigueur : " Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil général qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine ", et aux termes de l'article L. 3121-19 de ce même code : " Douze jours au moins avant la réunion du conseil général, le président adresse aux conseillers généraux un rapport, sous quelque forme que ce soit, sur chacun des affaires qui doivent leur être soumises (...) ". Or, il ressort des pièces du dossier que les membres du conseil départemental du Pas-de-Calais ont été saisis du projet de décret le 24 décembre 2013 en vue d'une séance du conseil général le 10 janvier 2014. Par suite, le moyen tiré de ce que les membres du conseil général n'auraient pas disposé du délai suffisant pour examiner le projet de décret doit être écarté.

4. En deuxième lieu, pour mettre en oeuvre les critères définis au III de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, le décret attaqué a procédé à la délimitation des trente-neuf nouveaux cantons du département du Pas-de-Calais en se fondant sur une population moyenne et en rapprochant la population de chaque canton de cette moyenne. Si, comme le soutiennent les requérants, certains cantons ont une population supérieure à la moyenne départementale, notamment le canton de Lens, qui a une population supérieure à la moyenne départementale de 19,02 %, et d'autres une population inférieure à cette moyenne, notamment le canton de Aire-sur-la-Lys, qui a une population inférieure de 19,67 % à la moyenne départementale, il ressort des pièces du dossier que ces écarts sont justifiés, dans le premier cas, par le choix de respecter l'unité territoriale de la commune de Lens et, dans le second cas, par celui d'éviter de créer un canton dont la superficie serait trop étendue. Dès lors, les règles qui ont justifié une telle délimitation sont dépourvues de caractère arbitraire et n'ont pas, en l'espèce, méconnu l'obligation, énoncée au a du III de l'article L. 3113-2, de définir le territoire de chaque canton sur des bases essentiellement démographiques.

5. En troisième lieu, ni les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, ni aucun autre texte non plus qu'aucun principe n'imposent au pouvoir réglementaire de prendre comme critères de délimitation de ces circonscriptions électorales les limites des anciens cantons, la proximité géographique des communes ou l'absence de disparité de superficie entre cantons.

6. En quatrième lieu, il n'est pas allégué que la délimitation des cantons du Pas-de-Calais n'aurait pas été opérée conformément aux règles posées au III de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales et que, notamment, le territoire de chaque canton n'aurait pas été défini sur des bases essentiellement démographiques. Ne peut être utilement invoquée la circonstance que le décret attaqué aboutit à répartir les communes de l'ancien canton de Vimy, qui rassemblait l'essentiel des communes situées sur la ligne de front de l'Artois pendant la Premier guerre mondiale, entre plusieurs cantons.

7. En cinquième lieu, le décret attaqué, s'il modifie les délimitations des cantons et désigne pour chacun d'eux un bureau centralisateur, n'a ni pour objet ni pour effet de procéder au transfert du siège des chefs-lieux de canton. Par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au motif que la commune de Vimy aurait perdu la qualité de chef-lieu de canton ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que MM. C...ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret attaqué.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de MM. C...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. A...-D... et B...C..., au Premier ministre et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 378678
Date de la décision : 23/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2014, n° 378678
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christophe Pourreau
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:378678.20140723
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