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23/07/2014 | FRANCE | N°360376

France | France, Conseil d'État, 1ère / 6ème ssr, 23 juillet 2014, 360376


Vu 1°, sous le n° 360376, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrées les 20 juin et 20 septembre 2012, présentés pour la société clinique Saint-Antoine, dont le siège est quartier du Toga à Bastia (20200), la SCP Bouet-Gillibert en qualité de commissaire au plan et Me A...en sa qualité de mandataire judiciaire ; les requérants demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10MA03131 du 14 mai 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0900797 du 17 jui

n 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses conclus...

Vu 1°, sous le n° 360376, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrées les 20 juin et 20 septembre 2012, présentés pour la société clinique Saint-Antoine, dont le siège est quartier du Toga à Bastia (20200), la SCP Bouet-Gillibert en qualité de commissaire au plan et Me A...en sa qualité de mandataire judiciaire ; les requérants demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10MA03131 du 14 mai 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0900797 du 17 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses conclusions tendant, à titre principal, à la condamnation de l'agence régionale de l'hospitalisation de Corse à lui verser la somme de 1 431 982,84 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la suppression du coefficient de haute technicité et de l'autorisation de chirurgie en soins particulièrement coûteux pour les années 2006 à 2008, augmentée des intérêts de droit à compter du 23 mars 2009, et, à titre subsidiaire, à la désignation d'un expert afin d'évaluer son préjudice et, dans l'attente, à ce que lui soit versée une provision de 700 000 euros et, d'autre part, à ce qu'il soit fait droit à ses conclusions de première instance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'agence régionale de santé de Corse la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°, sous le n° 360377, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juin et 20 septembre 2012, présentés pour les mêmes requérants, qui demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09MA01554 du 14 mai 2012 par lequel la même cour a, d'une part, annulé l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Bastia n° 0500560-0500561-0801156 du 12 mars 2009 en tant qu'il condamnait l'agence régionale de l'hospitalisation de Corse à lui verser une somme excédant 206 402 euros et l'article 3 du même jugement, d'autre part, rejeté celles de ses conclusions présentées devant le tribunal restant en litige et les conclusions de son appel incident tendant au versement d'une somme de 396 656 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2005 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de l'agence régionale de l'hospitalisation de Corse et de faire droit à son appel incident ;

3°) de mettre à la charge de l'agence régionale de santé de Corse la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Julia Beurton, auditeur,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la société Clinique Saint-antoine et à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de l'agence régionale de santé de Corse ;

1. Considérant qu'en vertu des dispositions du dernier alinéa du IV de l'article 33 de la loi du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004, dans sa rédaction applicable au litige, les tarifs des prestations d'hospitalisation mentionnées au 1° de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale applicables aux établissements de santé privés tels que la clinique Saint-Antoine " sont fixés dans le cadre d'un avenant tarifaire à leur contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens en appliquant le coefficient de transition et, le cas échéant, le coefficient de haute technicité propres à l'établissement aux tarifs nationaux des prestations affectés, le cas échéant, d'un coefficient géographique " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une délibération du 22 février 2005, la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de Corse a approuvé les avenants aux contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens des établissements de santé privés de Corse, en attribuant à la clinique Saint-Antoine un coefficient de haute technicité ; que le 16 mars 2005, le directeur de l'agence a notifié à la clinique les éléments tarifaires définitifs applicables au 1er mars 2005 pour le financement de son établissement, sans reprendre ce coefficient ; que, par une nouvelle délibération du 2 août 2005, la commission exécutive de l'agence a de nouveau approuvé les avenants aux contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens, sans reprendre le coefficient initialement retenu ; que, par deux jugements des 12 mars 2009 et 17 juin 2010, le tribunal administratif de Bastia a, respectivement, condamné l'agence à verser à la clinique Saint-Antoine la somme de 710 456 euros en réparation du préjudice né du retrait illégal du coefficient de haute technicité pour l'année 2005 et rejeté les conclusions de la clinique tendant à la condamnation de l'agence à l'indemniser des préjudices qu'elle estimait avoir subis au titre des années 2006 à 2008 ; que, par deux arrêts du 14 mai 2012, la cour administrative d'appel de Marseille a, respectivement, annulé le jugement du 12 mars 2009 en tant qu'il condamnait l'agence à verser à la clinique une somme excédant 206 402 euros et confirmé le jugement du 17 juin 2010 par substitution de motifs, en jugeant que les décisions litigieuses ayant été prises au nom de l'Etat, seule la responsabilité de ce dernier aurait pu être recherchée ; que, par deux pourvois qu'il y a lieu de joindre, la clinique Saint-Antoine demande l'annulation de ces arrêts ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6115-1 du code de la santé publique, applicable à la date des décisions de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de Corse et de son directeur mentionnées ci-dessus : " Dans chaque région et dans la collectivité territoriale de Corse, une agence régionale de l'hospitalisation a pour mission de définir et de mettre en oeuvre la politique régionale d'offre de soins hospitaliers, d'analyser et de coordonner l'activité des établissements de santé publics et privés, de contrôler leur fonctionnement et de déterminer leurs ressources (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 6115-2 du même code : " L'agence régionale de l'hospitalisation est une personne morale de droit public dotée de l'autonomie administrative et financière, constituée sous la forme d'un groupement d'intérêt public entre l'Etat et des organismes d'assurance maladie, dont au moins la caisse régionale d'assurance maladie, ainsi que l'union régionale de caisses d'assurance maladie. (...) / Elle est administrée par une commission exécutive et dirigée par un directeur " ; qu'aux termes de l'article L. 6115-3 du même code : " Le directeur exerce, au nom de l'Etat, les compétences mentionnées à l'article L. 6115-1, à l'exception de celles exercées par la commission exécutive en application de l'article L. 6115-4 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 6115-4 : " La commission exécutive de l'agence délibère sur : / (...) 2° Les orientations qui président à l'allocation des ressources aux établissements de santé ; / 3° Les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens mentionnés à l'article L. 6114-1 ainsi que les engagements contractuels spécifiques prévus à l'article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 6115-5 : " Les délibérations mentionnées à l'article L. 6115-4 sont exécutoires dès leur réception par le représentant de l'Etat dans la région, auquel elles sont transmises dans un délai de quinze jours. Le représentant de l'Etat défère les délibérations mentionnées aux 2° et 3° de l'article L. 6115-4 qu'il estime contraires à la légalité, devant le juge administratif, dans les deux mois suivant leur réception " ; qu'enfin l'article L. 6115-7 prévoit que : " (...) Le directeur de l'agence (...) préside la commission exécutive. Il assure le fonctionnement de l'agence dans le cadre des orientations définies par la commission exécutive dont il prépare et exécute les délibérations " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si le directeur de l'agence exerce au nom de l'Etat l'ensemble des compétences attribuées à l'agence qui ne sont pas confiées à la commission exécutive, sont en revanche pris au nom de l'agence les décisions de la commission exécutive qui relèvent de sa compétence en application de l'article L. 6115-4 du code de la santé publique, de même que les actes du directeur intervenant pour l'exécution des délibérations de cette dernière, en vertu de l'article L. 6115-7 du code de la santé publique ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit en jugeant que les délibérations prises par la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de Corse sur le fondement de l'article L. 6115-4 du code de la santé publique l'avaient été au nom de l'Etat et en en déduisant que seule la responsabilité de l'Etat pouvait être engagée du fait de leur illégalité ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les arrêts attaqués de la cour administrative d'appel de Marseille doivent être annulés, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'agence régionale de santé de Corse au titre de ces dispositions ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge une somme de 4 000 euros à verser à la société clinique Saint-Antoine au même titre ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les arrêts de la cour administrative d'appel de Marseille du 14 mai 2012 sont annulés.

Article 2 : Les affaires n° 09MA01554 et n° 10MA03131 sont renvoyées à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : L'agence régionale de santé de Corse versera à la clinique Saint-Antoine une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l'agence régionale de santé de Corse présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société clinique Saint-Antoine, premier requérant dénommé, à l'agence régionale de santé de Corse et à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Les autres requérants seront informés de la présente décision par la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.


Synthèse
Formation : 1ère / 6ème ssr
Numéro d'arrêt : 360376
Date de la décision : 23/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

61-09-01 SANTÉ PUBLIQUE. ADMINISTRATION DE LA SANTÉ. AGENCES RÉGIONALES D'HOSPITALISATION. - DÉCISIONS PRISES AU NOM DE L'AGENCE, ET NON DE L'ETAT - INCLUSION - DÉCISIONS RELEVANT DE LA COMPÉTENCE DE LA COMMISSION EXÉCUTIVE EN APPLICATION DE L'ARTICLE L. 6115-4 DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE - ACTES PRIS PAR LE DIRECTEUR POUR L'EXÉCUTION DES DÉLIBÉRATIONS DE CETTE COMMISSION EN VERTU DE L'ARTICLE L. 6115-7 DU MÊME CODE [RJ1].

61-09-01 Il résulte des articles L. 6115-1 à L. 6115-5 du code de la santé publique que, si le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation exerce au nom de l'Etat l'ensemble des compétences attribuées à l'agence qui ne sont pas confiées à la commission exécutive, sont en revanche pris au nom de l'agence les décisions de la commission exécutive qui relèvent de sa compétence en application de l'article L. 6115-4 du code de la santé publique, au nombre desquelles figurent les délibérations relatives aux contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens ou à leurs avenants, de même que les actes du directeur intervenant pour l'exécution des délibérations de cette commission, en vertu de l'article L. 6115-7 du même code.


Références :

[RJ1]

Ab. jur. CE, 21 décembre 2007, Clinique Saint-Roch, n°299608, T. pp. 636-1086-1088-1090, en ce qu'il y était jugé que les délibérations en cause des ARH étaient prises au nom de l'Etat.


Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2014, n° 360376
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Julia Beurton
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI ; SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:360376.20140723
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