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11/06/2014 | FRANCE | N°364497

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 11 juin 2014, 364497


Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée par l'Organisation de défense et de gestion des produits fermiers et le GIE Qualité Cocorette, dont le siège est 4, rue du Four à Chaux à Sainte-Catherine-les-Arras (62223), représentés par leurs représentants légaux en exercice ; l'Organisation de défense et de gestion des produits fermiers et le GIE Qualité Cocorette demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 octobre 2012 du ministre de l'économie et des finances et du m

inistre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt portant homolo...

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée par l'Organisation de défense et de gestion des produits fermiers et le GIE Qualité Cocorette, dont le siège est 4, rue du Four à Chaux à Sainte-Catherine-les-Arras (62223), représentés par leurs représentants légaux en exercice ; l'Organisation de défense et de gestion des produits fermiers et le GIE Qualité Cocorette demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 octobre 2012 du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt portant homologation de la notice technique définissant les critères minimaux à respecter par les cahiers des charges et les exigences minimales de contrôle à remplir pour l'obtention d'un label rouge " Œufs de poules élevées en plein air, poules fermières élevées en plein air/liberté " ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 34 ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu l'arrêté du 26 février 2008 relatif aux modalités de la participation financière de l'Etat à la lutte contre les infections à Salmonella dans les troupeaux de reproduction de l'espèce Gallus gallus en filière chair ;

Vu l'arrêté du 30 juin 2008 portant organisation et attributions de la direction des pêches maritimes et de l'aquaculture ;

Vu l'arrêté du 14 octobre 2009 portant homologation de la notice technique définissant les critères minimaux à respecter par les cahiers des charges et les exigences minimales de contrôle à remplir pour l'obtention d'un label rouge " Œufs et poules fermières élevées en plein air/liberté ", poules présentées en frais, surgelé, entières ou découpe ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Romain Victor, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donné, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de l'Institut national de l'origine et de la qualité ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 640-2 du code rural et de la pêche maritime : " Les produits agricoles, forestiers ou alimentaires et les produits de la mer peuvent (...) bénéficier d'un ou plusieurs modes de valorisation appartenant aux catégories suivantes : / 1° Les signes d'identification de la qualité et de l'origine : / - le label rouge, attestant la qualité supérieure (...) " ; qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 641-1 du même code : " Le label rouge atteste que ces (...) produits possèdent des caractéristiques spécifiques établissant un niveau de qualité supérieure, résultant notamment de leurs conditions particulières de production ou de fabrication et conformes à un cahier des charges, qui les distinguent des denrées et produits similaires habituellement commercialisés " ; qu'aux termes de l'article L. 641-3 de ce code : " La demande tendant à l'homologation d'un label rouge est présentée par un groupement de producteurs ou de transformateurs auquel a été reconnue la qualité d'organisme de défense et de gestion au sens du présent titre ou qui la sollicite " ; qu'aux termes de l'article L. 642-17 du même code : " La défense et la gestion d'un produit bénéficiant d'un label rouge (...) est assurée par un organisme doté de la personnalité civile (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 642-22 : " (...) Pour chaque produit bénéficiant d'un signe d'identification de la qualité et de l'origine dont il assure la défense et la gestion, l'organisme : / - élabore le projet de cahier des charges, contribue à son application par les opérateurs et participe à la mise en oeuvre des plans de contrôle et d'inspection, notamment en réalisant les contrôles internes qu'ils prévoient auprès des opérateurs ; / - tient à jour la liste des opérateurs, qu'il transmet périodiquement à l'organisme de contrôle et à l'Institut national de l'origine et de la qualité (...) " ; qu'enfin, selon l'article R. 641-2 : " Le cahier des charges d'un label rouge définit un ensemble distinct de qualités et de caractéristiques spécifiques établissant un niveau de qualité supérieure, les principaux points à contrôler ainsi que leurs méthodes d'évaluation. / Les critères minimaux à respecter par les cahiers des charges des labels rouges ainsi que les exigences minimales de contrôle sont, le cas échéant, définis par une notice technique qui fait l'objet d'une consultation publique (...) et qui est approuvée par arrêté des ministres chargés de l'agriculture et de la consommation sur proposition du comité national compétent et du conseil chargé des agréments et contrôles de l'Institut national de l'origine et de la qualité " ;

2. Considérant que, par un arrêté du 10 octobre 2012, le ministre de l'économie et des finances et le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ont, sur le fondement des dispositions de l'article R. 641-2 du code rural et de la pêche maritime et sur proposition du comité national des indications géographiques protégées, labels rouges et spécialités traditionnelles garanties de l'Institut national de l'origine et de la qualité, homologué une nouvelle notice technique définissant les critères minimaux à respecter par les cahiers des charges et les exigences minimales de contrôle à remplir pour l'obtention d'un label rouge " Œufs de poules élevées en plein air " ; qu'ils ont prévu que la mise en conformité des cahiers des charges avec la nouvelle notice technique devrait intervenir au plus tard le 31 décembre 2013 ; qu'enfin, ils ont abrogé l'arrêté du 14 octobre 2009 portant homologation d'une précédente notice technique ayant le même objet ; que la notice technique homologuée par l'arrêté attaqué prévoit, au paragraphe C43 du chapitre 3.7, que les cahiers des charges devront préciser que les opérateurs habilités ont l'obligation d'adhérer à la charte sanitaire instituée par l'article 1er de l'arrêté du 26 février 2008 du ministre de l'agriculture et de la pêche et du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique relatif aux modalités de la participation financière de l'Etat à la lutte contre les infections à Salmonella dans les troupeaux de reproduction de l'espèce Gallus gallus en filière chair ; que ces dispositions ont été substituées à celles des paragraphes C45 à C54 du chapitre 3.7 de la notice technique homologuée par l'arrêté du 14 octobre 2009, lesquelles fixaient diverses conditions sanitaires d'élevage relatives à la protection de l'établissement, à son aménagement et à la conduite de l'élevage en ce qui concerne les animaux, la lutte contre les vecteurs contaminants et l'eau de boisson ;

Sur la légalité externe de l'arrêté attaqué :

3. Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué, en tant qu'il rend obligatoire l'adhésion à la charte sanitaire et la conclusion à cette fin d'une convention avec l'Etat, méconnaît les dispositions de l'article 34 de la Constitution qui réservent à la loi la détermination des principes fondamentaux des obligations civiles et commerciales et serait ainsi entaché d'incompétence manque en fait, dès lors que les ministres n'ont pas rendu obligatoire l'adhésion à la charte sanitaire pour tous les producteurs d'oeufs de poules, mais l'ont seulement exigée des producteurs souhaitant bénéficier du label rouge " Œufs de poules élevées en plein air " ;

4. Considérant que, par une décision du 23 août 2012 parue au Journal officiel de la République française le 26 août suivant, M. A...a reçu délégation pour signer au nom du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, à l'exclusion des décrets, tous actes, arrêtés et décisions dans la limite des attributions de la sous-direction de l'organisation économique, des industries agroalimentaires et de l'emploi de la direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires de ce ministère ; que l'article 4 de l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche du 30 juin 2008 portant organisation et attributions de la direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires prévoit qu'entre dans les attributions de cette sous-direction la gestion des signes officiels de l'origine et de la qualité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait été signé par une personne incompétente doit être écarté ;

Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :

5. Considérant, en premier lieu, d'une part, que si l'arrêté du 26 février 2008 a posé le principe du caractère facultatif de l'adhésion à la charte sanitaire qu'il institue, laquelle ouvre droit à la prise en charge financière par l'Etat de certaines dépenses exposées lors de l'infection d'un troupeau de poules par la salmonelle, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que les ministres prévoient, dans la notice technique litigieuse, que les cahiers des charges pour l'obtention d'un label rouge " Œufs de poules élevées en plein air " imposent l'adhésion des producteurs à cette charte ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreur de droit ;

6. Considérant, d'autre part, que si l'adhésion à la charte sanitaire nécessite, conformément aux dispositions du I de l'article 2 de l'arrêté du 26 février 2008, la conclusion d'une convention entre le propriétaire du troupeau et le préfet, cette exigence n'a ni pour objet ni pour effet de subordonner l'obtention d'un label rouge à la délivrance d'une autorisation administrative ; qu'elle n'a pas davantage pour objet ou pour effet de porter atteinte aux compétences des organismes de défense et de gestion et des organismes certificateurs en matière de contrôle du respect des cahiers des charges, ni de porter atteinte aux compétences de l'Institut national de l'origine et de la qualité et des organismes de défense et de gestion en matière d'élaboration et de révision des notices techniques prévues par l'article R. 641-2 du code rural et de la pêche maritime ;

7. Considérant, en second lieu, que les requérants n'établissent pas en quoi les exigences sanitaires fixées par la charte sanitaire instituée par l'arrêté du 26 février 2008, lesquelles ne diffèrent pas substantiellement des conditions sanitaires d'élevage mentionnées aux paragraphes C45 à C54 de la notice technique homologuée par l'arrêté du 14 octobre 2009, seraient insuffisantes pour garantir la sécurité sanitaire ou feraient obstacle à ce que les oeufs produits dans le respect de l'ensemble des prescriptions des cahiers des charges élaborés conformément à cette notice soient regardés comme possédant des caractéristiques spécifiques établissant un niveau de qualité supérieure et les distinguant des oeufs communément mis sur le marché ; qu'ainsi, ils ne sont pas fondés à soutenir qu'en rendant obligatoire l'adhésion des producteurs habilités à la charte sanitaire, les ministres auraient commis une erreur manifeste d'appréciation dans la définition des critères minimaux à remplir par les cahiers des charges pour l'obtention d'un label rouge en " Œufs de poules élevées en plein air " ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Organisation de défense et de gestion des produits fermiers et le GIE Qualité Cocorette ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté qu'ils attaquent ; que, par suite, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'Organisation de défense et de gestion des produits fermiers et du GIE Qualité Cocorette est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Organisation de défense et de gestion des produits fermiers, au GIE Qualité Cocorette, au ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement et à l'Institut national de l'origine et de la qualité.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 364497
Date de la décision : 11/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2014, n° 364497
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Romain Victor
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:364497.20140611
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