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09/04/2014 | FRANCE | N°362263

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 09 avril 2014, 362263


Vu le mémoire, enregistré le 30 janvier 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présenté pour la SNC Eiffage Travaux publics Rhône-Alpes Auvergne, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; la société demande au Conseil d'État, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêt n° 10VE02204 du 19 juin 2012 de la cour administrative d'appel de Versailles qui a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs à l'effort de construct

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Vu le mémoire, enregistré le 30 janvier 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présenté pour la SNC Eiffage Travaux publics Rhône-Alpes Auvergne, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; la société demande au Conseil d'État, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'article 3 de l'arrêt n° 10VE02204 du 19 juin 2012 de la cour administrative d'appel de Versailles qui a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs à l'effort de construction auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2005, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles 225 et 235 bis du code général des impôts et de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 31 mars 2014, présentée pour la SNC Eiffage Travaux publics Rhône-Alpes Auvergne ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 34 et 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 87-588 du 30 juillet 1987 ;

Vu la décision n° 2010-84 QPC du Conseil constitutionnel du 13 janvier 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la SNC Eiffage Travaux publics Rhône-Alpes Auvergne ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'État (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant que la SNC Eiffage Travaux publics Rhône-Alpes Auvergne est, en application de l'article L. 3141-30 du code du travail, tenue de s'affilier à une caisse de congés payés qui, en contrepartie de cotisations versées par des employeurs, se substitue à eux pour le versement des indemnités de congés payés dues aux salariés qu'ils emploient ; qu'elle soutient que les articles 225 et 235 bis du code général des impôts et L. 242-1 du code de la sécurité sociale, en tant qu'ils s'appliquent aux employeurs tenus à cette obligation, portent atteinte au principe d'égalité devant la loi résultant de l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, au droit de propriété protégé par ses articles 2 et 17, au principe du consentement à l'impôt prévu par son article 14 et à la garantie des droits résultant de son article 16, combinés avec l'article 34 de la Constitution déterminant la compétence du législateur, ainsi qu'à l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 225 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige et devenu l'article 1599 ter B du même code, la taxe d'apprentissage " est assise sur les rémunérations, selon les bases et les modalités prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale (...) " ; qu'en vertu du 1 de l'article 235 bis du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " les employeurs qui, au 31 décembre de l'année suivant celle du paiement des rémunérations, n'ont pas procédé, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État aux investissements prévus à l'article L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation sont, dans la mesure où ils n'ont pas procédé à ces investissements, assujettis à une cotisation de 2 % calculée sur le montant des rémunérations versées par eux au cours de l'année écoulée, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale (...) " ; que l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, qui fixe l'assiette des cotisations de sécurité sociale, n'est applicable au présent litige, qui ne porte pas sur la détermination des cotisations sociales auxquelles est assujettie la société requérante, qu'en tant qu'il est renvoyé à ses dispositions par les articles 225 et 235 bis du code général des impôts ;

4. Considérant que le Conseil constitutionnel, par une décision n° 2010-84 QPC du 13 janvier 2011 a, dans ses motifs et son dispositif, déclaré le 1 de l'article 235 bis du code général des impôts conforme à la Constitution ; que la décision n° 350093 du 20 novembre 2013 du Conseil d'État statuant au contentieux, faisant application de ces dispositions, ne constitue pas un changement des circonstances de nature à justifier que la question de la conformité à la Constitution de ces dispositions soit de nouveau soumise au Conseil constitutionnel ;

5. Considérant que, pour la définition de l'assiette de la taxe d'apprentissage, l'article 225 du code général des impôts, en renvoyant à la définition de l'assiette des cotisations sociales telle qu'elle résulte de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, soumet expressément à cette taxe les indemnités de congés payés ; qu'ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux par sa décision mentionnée ci-dessus, le montant des indemnités de congés payés à prendre en compte, pour l'application de ces dispositions législatives, correspond à celui que l'employeur aurait versé à ses salariés en l'absence d'affiliation obligatoire à une caisse de congé résultant des dispositions du code du travail et des stipulations des conventions collectives ou accords applicables aux professions concernées ou, à défaut de pouvoir établir cette somme, à un montant évalué, compte tenu de ces dispositions et stipulations, à 11,5 % des rémunérations brutes versées au cours de l'année d'imposition ; que le moyen tiré de ce que la loi aurait défini avec une précision insuffisante l'assiette de cette taxe et aurait ainsi méconnu l'article 34 de la Constitution ne saurait donc être regardé comme sérieux ; que la disposition législative litigieuse ne saurait non plus être regardée comme portant atteinte au principe d'égalité devant la loi, dès lors que les employeurs tenue de s'affilier à une caisse de congés payés ne sont pas dans la même situation que les employeurs qui ne sont pas tenus à une telle affiliation ; qu'enfin, l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi n'est pas au nombre des droits et libertés que la Constitution garantit, au sens de l'article 61-1 de la Constitution ; que par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les articles 225 et 235 bis du code général des impôts et L. 242-1 du code de la sécurité sociale portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la SNC Eiffage Travaux publics Rhône-Alpes Auvergne.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SNC Eiffage Travaux publics Rhône-Alpes Auvergne et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 362263
Date de la décision : 09/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 avr. 2014, n° 362263
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Matt
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 08/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:362263.20140409
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