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17/03/2014 | FRANCE | N°353089

France | France, Conseil d'État, 3ème / 8ème ssr, 17 mars 2014, 353089


Vu 1°, sous le n° 353089, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 octobre et 14 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Vèze, représentée par son maire ; la commune demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10LY02285 du 2 août 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement nos 1000719, 1000721, 1000723 et 1000725 du 16 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé, sur déféré du préfe

t du Cantal, les délibérations du 15 mars 2010 par lesquelles son conseil m...

Vu 1°, sous le n° 353089, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 octobre et 14 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Vèze, représentée par son maire ; la commune demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10LY02285 du 2 août 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement nos 1000719, 1000721, 1000723 et 1000725 du 16 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé, sur déféré du préfet du Cantal, les délibérations du 15 mars 2010 par lesquelles son conseil municipal a décidé le reversement aux ayants droit des sections de commune du Bourg de Vèze, de Moudet, d'Aubevio et de Chazeloup de l'excédent des revenus en espèces de ces sections ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 990 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°, sous le n° 355908, le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 17 janvier, 17 avril et 28 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. E... H..., demeurant ...; M. H... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10LY02285 du 2 août 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel que la commune de Vèze a formé contre le jugement nos 1000719, 1000721, 1000723 et 1000725 du 16 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé, sur déféré du préfet du Cantal, les délibérations du 15 mars 2010 par lesquelles le conseil municipal de cette commune a décidé le reversement aux ayants droit des sections de commune du Bourg de Vèze, de Moudet, d'Aubevio et de Chazeloup de l'excédent des revenus en espèces de ces sections ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code forestier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Romain Victor, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Vincent, Ohl, avocat de la commune de Vèze et à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M. E...H...et de la Fédération des ayants-droit de sections de commune du Cantal (FASC 15) ;

1. Considérant que les pourvois de la commune de Vèze et de M. H...sont dirigés contre le même arrêt ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur l'intervention de la Fédération des ayants-droit de sections de commune du Cantal :

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 632-1 du code de justice administrative : " L'intervention est formée par mémoire distinct " ; que la Fédération des ayants-droit de sections de commune du Cantal n'a pas présenté son intervention par un mémoire distinct du pourvoi de M. H...; que, par suite, il y a lieu de la déclarer irrecevable ;

Sur l'arrêt attaqué :

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par quatre délibérations du 15 mars 2010, le conseil municipal de Vèze a décidé de partager entre les ayants-droit des sections de commune du Bourg de Vèze, de Moudet, d'Aubevio et de Chazeloup le solde des revenus en espèces de ces sections ; que le préfet du Cantal a déféré ces délibérations au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, qui les a annulées par un jugement du 16 juillet 2010 ; que la commune de Vèze et M.H..., ayant-droit de la section de commune de Moudet, se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 2 août 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'ils ont interjeté de ce jugement ;

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2411-1 du code général des collectivités territoriales : " Constitue une section de commune toute partie d'une commune possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune. / La section de commune a la personnalité juridique " ; qu'aux termes de l'article

L. 2411-10 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les membres de la section ont, dans les conditions résultant soit des décisions des autorités municipales, soit des usages locaux, la jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature. / Les terres à vocation agricole ou pastorale propriétés de la section sont attribuées par bail rural ou par convention pluriannuelle de pâturage conclue dans les conditions prévues à l'article L. 481-1 du code rural ou par convention de mise à disposition d'une société d'aménagement foncier et d'établissement rural au profit des exploitants agricoles ayant un domicile réel et fixe, ainsi que le siège d'exploitation sur la section. L'autorité municipale peut attribuer, le cas échéant, le reliquat de ces biens au profit d'exploitants agricoles sur la section ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant pendant la période hivernale leurs animaux sur la section, ou à défaut au profit de personnes exploitant des biens sur le territoire de la section et résidant sur le territoire de la commune ; à titre subsidiaire, elle peut attribuer ce reliquat au profit de personnes exploitant seulement des biens sur le territoire de la section ou, à défaut, au profit des exploitants ayant un bâtiment d'exploitation sur le territoire de la commune. / (...) L'ensemble de ces dispositions, qui concerne les usages agricoles et pastoraux des biens de section, ne fait pas obstacle au maintien, pour les ayants droit non agriculteurs, des droits et usages traditionnels tels que l'affouage, la cueillette, la chasse notamment, dans le respect de la multifonctionnalité de l'espace rural. / Chaque fois que possible, il sera constitué une réserve foncière destinée à permettre ou faciliter de nouvelles installations agricoles. / Les revenus en espèces ne peuvent être employés que dans l'intérêt des membres de la section. Ils sont affectés prioritairement à la mise en valeur et à l'entretien des biens de la section ainsi qu'aux équipements reconnus nécessaires à cette fin par la commission syndicale " ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 145-1 du code forestier : " Pour chaque coupe des forêts des communes et sections de commune, le conseil municipal (...) peut décider d'affecter tout ou partie du produit de la coupe au partage en nature entre les bénéficiaires de l'affouage pour la satisfaction de leurs besoins ruraux ou domestiques, sous réserve de la possibilité, pour ces bénéficiaires, de ne vendre que les bois de chauffage qui leur ont été délivrés en nature (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 145-2 du même code : " S'il n'y a titre contraire, le partage de l'affouage, qu'il s'agisse des bois de chauffage ou des bois de construction, se fait de l'une des trois manières suivantes : / 1° Ou bien par feu, c'est-à-dire par chef de famille ou de ménage ayant domicile réel et fixe dans la commune avant la publication du rôle ; / 2° Ou bien moitié par chef de famille ou de ménage et moitié par tête d'habitant remplissant les mêmes conditions de domicile. / (...) ; / 3° Ou bien par tête d'habitant ayant domicile réel et fixe dans la commune avant publication du rôle (...) " ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 145-3 du même code, dans sa rédaction applicable à la date des délibérations litigieuses : " Le conseil municipal peut aussi décider la vente de tout ou partie de l'affouage au profit de la caisse communale ou des affouagistes (...) par les soins de l'Office national des forêts " ;

6. Considérant qu'il résulte des dispositions du code général des collectivités territoriales citées ci-dessus qu'une section de commune est une personne morale de droit public possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune ; que, si les membres de la section ont, dans les conditions résultant soit des décisions des autorités municipales, soit des usages locaux, la jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature, ils ne sont pas titulaires d'un droit de propriété sur ces biens ou ces droits ; que les revenus en espèces, qui doivent être affectés en priorité à la prise en charge des dépenses relatives à la mise en valeur et à l'entretien des biens de la section ainsi qu'aux équipements y afférents, doivent être employés dans l'intérêt exclusif de cette personne publique qui ne peut, en principe, les redistribuer entre ses ayants-droit ; qu'il résulte toutefois des dispositions de l'article L. 145-3 du code forestier relatives au droit d'affouage, qui s'appliquent, en vertu des dispositions de l'article L. 145-1 du même code, non seulement dans le cas où les bois soumis à l'affouage appartiennent à une commune, mais aussi quand ces bois sont la propriété d'une section de commune, que, dans ce dernier cas, le produit de la vente de tout ou partie de l'affouage doit être, soit versé à la caisse communale, pour être employé dans l'intérêt exclusif de la section, soit partagé entre les membres de celle-ci ; que, dès lors, en jugeant qu'aucune disposition législative ne donnait aux ayants droit d'une section de commune un droit à percevoir les revenus en espèces de cette section et qu'un tel droit ne pouvait être déduit de l'article L. 145-3 du code forestier, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois, la commune de Vèze et

M. H...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser respectivement à la commune de Vèze et à

M. H...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'intervention de la Fédération des ayants-droit de sections de commune du Cantal n'est pas admise.

Article 2 : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 2 août 2011 est annulé.

Article 3 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 4 : L'Etat versera respectivement à la commune de Vèze et à M. H... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Vèze, à M. E... H..., au ministre de l'intérieur, à Mme J...D..., à MM. B...D..., A...C..., I...F...et G...F...et à la Fédération des ayants-droit de sections de commune du Cantal.


Synthèse
Formation : 3ème / 8ème ssr
Numéro d'arrêt : 353089
Date de la décision : 17/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-02-02-03-01 COLLECTIVITÉS TERRITORIALES. COMMUNE. BIENS DE LA COMMUNE. INTÉRÊTS PROPRES À CERTAINES CATÉGORIES D'HABITANTS. SECTIONS DE COMMUNE. - DROITS DES MEMBRES DE LA SECTION - DROIT DE PROPRIÉTÉ SUR LES BIENS ET LES DROITS POSSÉDÉS PAR LA SECTION - ABSENCE - FACULTÉ DE LA SECTION DE COMMUNE DE REDISTRIBUER ENTRE SES AYANTS DROIT LES REVENUS EN ESPÈCES - ABSENCE - EXCEPTION - PRODUIT DE LA VENTE DE TOUT OU PARTIE DE L'AFFOUAGE.

135-02-02-03-01 Une section de commune est une personne morale de droit public possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune. Si les membres de la section ont, dans les conditions résultant soit des décisions des autorités municipales, soit des usages locaux, la jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature, ils ne sont pas titulaires d'un droit de propriété sur ces biens ou ces droits. Les revenus en espèces, qui doivent être affectés en priorité à la prise en charge des dépenses relatives à la mise en valeur et à l'entretien des biens de la section ainsi qu'aux équipements y afférents, doivent être employés dans l'intérêt exclusif de cette personne publique qui ne peut, en principe, les redistribuer entre ses ayants droit. Il résulte toutefois des dispositions de l'article L. 145-3 du code forestier relatives au droit d'affouage, qui s'appliquent, en vertu des dispositions de l'article L. 145-1 du même code, non seulement dans le cas où les bois soumis à l'affouage appartiennent à une commune, mais aussi quand ces bois sont la propriété d'une section de commune, que, dans ce dernier cas, le produit de la vente de tout ou partie de l'affouage doit être, soit versé à la caisse communale, pour être employé dans l'intérêt exclusif de la section, soit partagé entre les membres de celle-ci.


Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2014, n° 353089
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Romain Victor
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP VINCENT, OHL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:353089.20140317
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