La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/2014 | FRANCE | N°374145

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 05 mars 2014, 374145


Vu l'ordonnance n° 13BX02631 du 19 décembre 2013, enregistrée le 23 décembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux, avant qu'il soit statué sur l'appel de Mme A...B...tendant à l'annulation du jugement du 20 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 2 août 2011, par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer une carte de résident, ensemble le rejet, en date du 27 février

2012, de son recours gracieux, a décidé, par application des dis...

Vu l'ordonnance n° 13BX02631 du 19 décembre 2013, enregistrée le 23 décembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux, avant qu'il soit statué sur l'appel de Mme A...B...tendant à l'annulation du jugement du 20 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 2 août 2011, par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer une carte de résident, ensemble le rejet, en date du 27 février 2012, de son recours gracieux, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, du 2ème alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'il exige de tous demandeurs au bénéfice d'une carte de résident, y compris ceux qui perçoivent une allocation aux adultes handicapés, des ressources supérieures ou égales au salaire minimum de croissance ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 octobre 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présenté par Mme A...B..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; Mme B...soutient que le 2ème alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable au litige, méconnaît le principe d'égalité garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en fixant, pour l'obtention de la carte de résident, un seuil de ressources au moins égal au salaire minimum de croissance, sans distinguer selon la situation de santé ou de handicap des requérants ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu la directive 2003/109 du Conseil du 25 novembre 2013 ;

Vu le code de la sécurité sociale :

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 314-8 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Vassallo-Pasquet, Maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Xavier Domino, Rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil Constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil Constitutionnel, sauf changement de circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour mentionnées aux articles L. 313-6, L. 313-8 et L. 313-9, aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 313-10, aux articles L. 313-11, L. 313-11-1, L. 313-14 et L. 314-9, aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 9° de l'article L. 314-11 et aux articles L. 314-12 et L. 315-1 peut obtenir une carte de résident portant la mention "résident de longue durée-CE" s'il dispose d'une assurance maladie... . La décision d'accorder ou de refuser cette carte est prise en tenant compte des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et de ses moyens d'existence. Les moyens d'existence du demandeur sont appréciés au regard de ses ressources qui doivent être stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues aux articles L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles et L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance et sont appréciées au regard des conditions de logement. " ; qu'il résulte de ces dispositions, qui doivent être interprétées conformément aux objectifs de la directive du 25 novembre 2003, dont elles assurent la transposition et qui visent à permettre la délivrance d'un titre de séjour de longue durée, valable dans l'ensemble du territoire de l'Union, qu'est exclue dans le calcul des ressources la prise en compte non seulement des prestations énumérées, mais également des autres prestations d'aide sociale, notamment l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 et suivants du code de la sécurité sociale ;

3. Considérant que MmeB..., ressortissante congolaise, dont les ressources sont principalement constituées par une allocation aux adultes handicapés, soutient que les dispositions précitées de l'article L. 314-8, en ne prévoyant pas pour les étrangers bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, de dérogation à la condition que le montant de ressources soit au moins égal au salaire minimum de croissance, porte atteinte au principe d'égalité garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que toutefois, si, en règle générale, le principe d'égalité impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n'en résulte pas pour autant qu'il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes ; qu'en imposant aux étrangers demandeurs de la carte de résident de longue durée la condition de disposer d'un montant minimal de ressources autres que les ressources provenant de l'aide sociale, sans prévoir de dérogation au bénéfice des personnes handicapées, le législateur n'a pas, en tout état de cause, méconnu le principe d'égalité ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question de la conformité à la Constitution des dispositions contestées, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil Constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et à la cour administrative d'appel de Bordeaux.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 374145
Date de la décision : 05/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mar. 2014, n° 374145
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Bénédicte Vassallo-Pasquet
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : SCP MEIER-BOURDEAU, LECUYER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:374145.20140305
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award