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05/03/2014 | FRANCE | N°362283

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 05 mars 2014, 362283


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 août et 28 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Europe immobilière, dont le siège est 49 rue Vaneau à Paris (75007) ; la société demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11PA00678-11PA03407 du 28 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté ses requêtes tendant, d'une part, à l'annulation des jugements n° 0905936 du 16 décembre 2010 et n° 1012292 du 23 juin 2011 par lesquels le tribunal administratif de Pa

ris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations de taxe annu...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 août et 28 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Europe immobilière, dont le siège est 49 rue Vaneau à Paris (75007) ; la société demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11PA00678-11PA03407 du 28 juin 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté ses requêtes tendant, d'une part, à l'annulation des jugements n° 0905936 du 16 décembre 2010 et n° 1012292 du 23 juin 2011 par lesquels le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 pour les locaux dont elle est propriétaire rue de Berri à Paris, d'autre part, à ce que soit prononcée la décharge sollicitée ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 89-936 du 29 décembre 1989 ;

Vu la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 ;

Vu la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 ;

Vu les décisions n° 89-270 DC du 29 décembre 1989 et n° 98-405 du 29 décembre 1998 du Conseil constitutionnel ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Maxime Boutron, auditeur ;

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société Europe Immobilière ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant que la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux perçue dans la région Ile-de-France a été créée par l'article 40 de la loi du 29 décembre 1989 de finances rectificative pour 1989 ; que si cette disposition a été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs de la décision n° 89-270 DC du 29 décembre 1989, elle ne l'a pas été dans son dispositif ; qu'en revanche, l'article 38 de la loi du 30 décembre 1998 de finances pour 1999, qui a modifié le champ d'application de la taxe et a inséré un nouvel article 231 ter dans le code général des impôts relatif à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage situés en Ile-de-France, a été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de la décision n° 98-405 DC du 29 décembre 1998 ; que la société Europe immobilière fait toutefois valoir que des changements dans les circonstances de droit et de fait intervenus depuis cette décision justifient un nouvel examen par le Conseil constitutionnel de ces dispositions au regard de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui protège le droit de propriété et des principes d'égalité devant l'impôt et les charges publiques garantis par ses articles 6 et 13 ;

3. Considérant, en premier lieu, que la société soutient que, d'une part, la majorité des locaux à usage de bureaux d'Ile-de-France doit être rénovée et ne répond plus aux exigences fonctionnelles, techniques et économiques et que, d'autre part, cette vétusté affecte la compétitivité internationale de la région ; que ces deux évolutions ne caractérisent pas un changement dans les circonstances de fait au regard de l'objectif poursuivi par le législateur à travers la création de la taxe, qui est de préserver la capacité d'intervention de l'Etat en Ile-de-France afin de corriger les déséquilibres de cette région en matière de logement social, de transports collectifs et d'infrastructures de transports ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le législateur ait prévu en 2005 des obligations de mises aux normes des locaux à usage de bureaux, notamment pour en rendre possible l'accès aux personnes à mobilité réduite, ne constitue pas un changement dans les circonstances de droit ;

5. Considérant, enfin, qu'il résulte des textes applicables à la date de la création de la taxe et aux années 2008 et 2009 que les taux de la taxe n'ont pas connu d'augmentation significative ; que les circonstances que l'article 31 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 assujettisse à la taxe des aires de stationnement, revalorise dans des proportions très importantes les taux et prévoit leur actualisation annuelle en fonction du dernier indice du coût de la construction publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques et qu'une taxe spéciale d'équipement au profit de la société du grand Paris a été créée par l'article 31, III de la même loi ne constituent pas, en tout état de cause, un changement des circonstances de droit dès lors que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur l'article 231 ter du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années 2008 et 2009 ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de changement dans les circonstances de droit ou de fait de nature à justifier que la conformité de cette disposition aux droits et libertés garantis par la Constitution soit à nouveau examinée par le Conseil constitutionnel, les dispositions combinées des articles 23-2 et 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 font obstacle à ce que la question prioritaire de constitutionnalité soit renvoyée au Conseil constitutionnel ;

Sur le pourvoi en cassation :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux " ;

8. Considérant que, pour demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, la société Europe immobilière soutient que la cour administrative d'appel de Paris a méconnu l'article 231 ter du code général des impôts en jugeant que les locaux dont elle est propriétaire devaient être soumis à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux bien qu'ils aient été rendus impropres à cet usage pendant la durée des travaux ;

9. Considérant que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Europe immobilière.

Article 2 : Le pourvoi de la société Europe immobilière n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Europe immobilière.

Copie en sera adressée, pour information, au Premier ministre et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 05 mar. 2014, n° 362283
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Maxime Boutron
Rapporteur public ?: Mme Nathalie Escaut
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 05/03/2014
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 362283
Numéro NOR : CETATEXT000028686280 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2014-03-05;362283 ?
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