Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 janvier et 15 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Veolia Eau - Compagnie générale des Eaux, dont le siège est 52 rue d'Anjou à Paris Cedex 08 (75384) ; la société Veolia Eau - Compagnie générale des Eaux demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10MA00560 du 12 novembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, en premier lieu, à l'annulation du jugement n° 0600074 du 20 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant, à titre principal, à ce que la communauté d'agglomération de Nice-Côte d'Azur (CANCA) soit condamnée à lui verser, au titre de ses obligations contractuelles, la somme de 4 035 946,80 euros, avec intérêts de droit, et, à titre subsidiaire, à ce que la commune de Nice soit condamnée à lui verser la même somme en application de l'article 1376 du code civil, avec intérêts de droit, en deuxième lieu, à la condamnation de la communauté urbaine de Nice-Côte d'Azur (CUNCA), venue aux droits de la CANCA, à lui verser, au titre de ses obligations contractuelles, la somme de 4 035 946,80 euros, avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts ou, à titre subsidiaire, à la condamnation de la commune de Nice à lui verser la même somme en application de l'article 1376 du code civil, avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts ;
2°) de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Marseille ;
3°) de mettre à la charge de la Métropole Nice-Côte d'Azur ou de la commune de Nice la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Montrieux, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la société Veolia Eau - Compagnie générale des Eaux, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de la Métropole Nice-Côte d'Azur, et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la commune de Nice ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par avenant n° 21 du 24 avril 2002 au contrat de délégation de l'exploitation du service public de l'eau, la société Veolia et la communauté d'agglomération Nice-Côte d'Azur, à laquelle la compétence eau de la commune de Nice avait été transférée par arrêté préfectoral du 10 décembre 2001, ont décidé de mettre fin au compte d'investissement institué par ce contrat ; que la détermination du solde de ce compte d'investissement a fait naître un différend entre les parties portant sur l'inscription de sommes correspondant à des reversements de taxe à la valeur ajoutée ; que par l'arrêt contesté du 12 novembre 2012, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la requête de la société Veolia tendant à l'annulation du jugement du 20 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à ce que la communauté d'agglomération Nice-Côte d'Azur (CANCA) soit condamnée à lui verser la somme de 4 035 946,80 euros, avec intérêts de retard au taux légal et, à titre subsidiaire, à ce que cette condamnation soit prononcée à l'encontre de la commune de Nice ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas du III de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales : " L'établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert des compétences, aux communes qui le créent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. / Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu'à leur échéance, sauf accord contraire des parties (...) " ;
3. Considérant que si le premier alinéa du III de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales prévoit que le transfert de compétences à un établissement public de coopération intercommunale entraîne de plein droit l'application à l'ensemble des biens, équipements et services nécessaires à l'exercice de ces compétences ainsi qu'à l'ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, de certaines dispositions du même code, au nombre desquelles ne figure pas le troisième alinéa de l'article L. 1321-2, selon lequel la collectivité bénéficiaire de la mise à disposition de biens à la suite d'un transfert de compétences est substituée à la collectivité propriétaire de ces biens dans ses droits et obligations découlant des contrats, il résulte cependant des troisième et quatrième alinéas du même III que le transfert de compétences d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale entraîne la substitution de la personne publique bénéficiaire du transfert aux droits et obligations découlant des contrats conclus par la collectivité antérieurement compétente ; que, par suite, en jugeant, pour rejeter la demande de la requérante tendant à l'engagement de la responsabilité contractuelle de la métropole Nice-Côte d'Azur, que cette dernière n'était pas partie au contrat conclu initialement par la commune de Nice avec la société Véolia Eau - Compagnie générale des Eaux, sans tirer les conséquences de la substitution de la métropole Nice-Côte d'Azur à la commune de Nice et du transfert des obligations de la commune à cet établissement public de coopération intercommunale lui ayant succédé, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ;
4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort également des pièces du dossier soumis au juge du fond que, dans ses écritures d'appel, ainsi que le relèvent d'ailleurs les visas de l'arrêt attaqué, la société requérante a demandé, à titre subsidiaire, que la commune de Nice soit condamnée à lui verser les sommes demandées sur le fondement des articles 1376 et 1377 du code civil, en vertu desquels toute personne qui, se croyant débitrice a, par erreur, acquitté une dette, a le droit de réclamer au créancier le remboursement du montant de celle-ci ; que la cour a cependant répondu à ces conclusions en écartant la responsabilité de la commune de Nice sur le fondement de l'enrichissement sans cause, au motif que la commune de Nice n'avait bénéficié d'aucune dépense utile exposée par la société Veolia Eau - Compagnie générale des Eaux et que cette dernière n'avait souffert d'aucun appauvrissement ; qu'elle a ainsi assimilé la répétition de l'indu, prévue par les articles 1376 et 1377 du code civil, à une responsabilité dont le fondement et les conditions d'engagement sont distincts ; que la cour a, ce faisant, commis une autre erreur de droit ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé ;
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de société Veolia Eau - Compagnie générale des Eaux, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent à ce titre la Métropole Nice-Côte d'Azur et la commune de Nice ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la commune de Nice et de la Métropole Nice-Côte d'Azur la somme de 1 500 euros chacune au titre des frais exposées par la société Veolia Eau - Compagnie générale des Eaux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 12 novembre 2012 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : Les conclusions de la Métropole Nice-Côte d'Azur et de la commune de Nice présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La Métropole Nice-Côte d'Azur et la commune de Nice verseront chacune à la société Véolia Eau - Compagnie générale des Eaux la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Veolia Eau - Compagnie générale des Eaux, à la commune de Nice et à la Métropole Nice-Côte d'Azur.