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12/02/2014 | FRANCE | N°365968

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 12 février 2014, 365968


Vu la requête, enregistrée le 12 février 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société civile professionnelle (SCP) Gagnebien et Galibert, dont le siège est 22, boulevard Carnot à Lisieux (14100), la SCP Bodard et Brohier, dont le siège est 14, avenue Sainte-Thérèse à Lisieux (14100), la SCP Daniel et Guedj, dont le siège est 3, rue d'Harmonville à Saint-Pierre-sur-Dives (14170), Me G...D..., demeurant..., la SCP Maymaud et Poret, dont le siège est place Foch à Trouville-sur-Mer (14360), Me H...E..., demeurant ... et la SCP Pierre Lemée et F

rançois Lemée, dont le siège est 14, rue Hamelin à Pont-l'Evêque (...

Vu la requête, enregistrée le 12 février 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société civile professionnelle (SCP) Gagnebien et Galibert, dont le siège est 22, boulevard Carnot à Lisieux (14100), la SCP Bodard et Brohier, dont le siège est 14, avenue Sainte-Thérèse à Lisieux (14100), la SCP Daniel et Guedj, dont le siège est 3, rue d'Harmonville à Saint-Pierre-sur-Dives (14170), Me G...D..., demeurant..., la SCP Maymaud et Poret, dont le siège est place Foch à Trouville-sur-Mer (14360), Me H...E..., demeurant ... et la SCP Pierre Lemée et François Lemée, dont le siège est 14, rue Hamelin à Pont-l'Evêque (14130) ;

la SCP Gagnebien et Galibert et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 décembre 2012 portant dissolution de deux sociétés civiles professionnelles, suppression d'un office de notaire et nomination d'une société civile professionnelle à la résidence de Lisieux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 janvier 2014, présentée par la SCP Gagnebien et Galibert et autres ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 février 2014, présentée pour la SCP C... et associés ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu le code de commerce ;

Vu l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 ;

Vu le décret n° 67-868 du 2 octobre 1967 ;

Vu le décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Roussel, Auditeur,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de la SCPC..., B..., A...-K..., C..., Bunetel, Outrequin, I...et de Mme A...-K... ;

1. Considérant que, par l'arrêté attaqué, le garde des sceaux, ministre de la justice a, d'une part, constaté et accepté le retrait de MM. B...et F...etJ..., notaires associés, de la société civile professionnelle (SCP)B..., F...et Outrequin, dissous cette SCP et supprimé l'office notarial à la résidence de Lisieux dont elle était titulaire ; que, d'autre part, elle a constaté et accepté le retrait de MM.C..., A...-K..., C...etI..., notaires associés, de la SCPC..., A...-K..., C...etI..., titulaire d'un office notarial à la résidence de Lisieux et dissout cette SCP ; qu'enfin, elle a nommé la SCPC..., B..., A...-K..., C..., Bunetel, Outrequin, I...et A...-K..., notaires associés, notaire à la résidence de Lisieux en remplacement de la SCPC..., A...-K..., C...et I...et a désigné cette SCP attributaire à titre définitif des minutes de l'office supprimé ; que la SCP Gagnebien et Galibert et autres demandent l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2-7 du décret du 26 novembre 1971 relatif, notamment, aux créations, transferts et suppressions d'offices de notaire : " La création, le transfert ou la suppression d'un office (...) font l'objet d'un arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice " ; qu'en application de l'article 2-5 du même décret, cet arrêté ne peut être pris qu'après avis de la commission, instituée auprès du garde des sceaux par ce décret, qui est chargée de donner un avis sur tout projet de création, de transfert ou de suppression d'un office de notaires, après consultation des chambres départementales, des conseils régionaux de notaires et du procureur général ; qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qui est soutenu, la commission de localisation des offices de notaires a été consultée le 26 mars 2012 sur le projet d'arrêté contesté ; que la chambre des notaires du Calvados et le conseil régional des notaires du ressort de la cour d'appel de Caen ont également émis un avis sur le projet, respectivement le 4 mai 2011 et le 23 mai 2011 ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de consultation de la commission de localisation des offices de notaires, de la chambre départementale des notaires et du conseil régional des notaires ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 10-4 du décret du 2 octobre 1967 pris pour l'application à la profession de notaire de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, la nomination d'une nouvelle SCP constituée par voie de fusion dans un office de notaire et la nomination de chacun des associés sont prononcées par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, après avis du procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle est fixé le siège de l'office dont elle sera titulaire, qui saisit préalablement la chambre départementale d'une demande d'avis motivé ; que contrairement à ce qui est soutenu, il ressort des pièces du dossier que la chambre départementale des notaires du Calvados a été saisie pour avis du projet de nomination de Mme A... -K... en qualité de notaire associé de la SCP constituée par voie de fusion des deux SCP existantes ; que, par suite, le moyen tiré du non respect de la procédure prévue par l'article 10-4 du décret du 2 octobre 1967 ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 2 du décret du 26 novembre 1971 que, dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par ce décret et notamment lorsqu'il est appelé à se prononcer sur une demande de création, de transfert ou de suppression d'un office de notaire, le garde des sceaux, ministre de la justice, doit se fonder, dans l'intérêt du service public, sur " les besoins du public " et sur " la situation géographique, démographique et économique " du lieu d'implantation des offices ;

5. Considérant que l'arrêté attaqué a pour effet de créer une structure composée de huit notaires, alors que les autres études établies sur le territoire de l'agglomération de Lisieux n'en comptent chacune que deux à quatre ; que les requérants font valoir que les perspectives de développement économique et démographique de l'agglomération de Lisieux sont limitées et que la fusion ne répondrait pas, de ce fait, au besoin du public ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué, qui ne nomme qu'un seul nouveau notaire, Mme A...-K..., et ne modifie donc pas substantiellement le nombre de notaires établis sur le territoire de l'agglomération serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des besoins du public ; que l'arrêt attaqué n'est, pas davantage, entaché d'erreur de droit dans l'appréciation de ces besoins ;

6. Considérant que s'il est allégué que l'arrêté attaqué placerait la SCP née de la fusion dans la situation d'abuser automatiquement d'une position dominante, dès lors qu'elle représente environ un quart des notaires installés dans l'agglomération de Lisieux, un tel moyen, qui ne délimite d'ailleurs pas avec une précision suffisante les marchés pertinents sur lesquels un tel comportement anticoncurrentiel serait observable, ne peut qu'être écarté dès lors que l'arrêté attaqué ne saurait être regardé comme ayant par lui-même pour objet ou pour effet de placer la SCP née de la fusion en situation d'abuser automatiquement d'une position dominante ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les règles de concurrence qui résultent des articles 102 et 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article L. 420-2 du code de commerce ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCP Gagnebien et Galibert et autres n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté qu'ils attaquent ; que leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de chacun des sept requérants la somme de 450 euros à verser à la SCPC..., B..., A...-K..., C..., Bunetel, Outrequin, I...et A...-K... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la SCP Gagnebien et Galibert et autres est rejetée.

Article 2 : La SCP Gagnebien et Galibert, la SCP Bodard et Brohier, la SCP Daniel et Guedj, Me G...D..., la SCP Maymaud et Poret, Me H...E...et la SCP Pierre Lemée et François Lemée verseront chacun la somme de 450 euros à la SCP AndréC..., OliverB..., Stéphane A...-K..., RaynaldC..., Thibaut Bunetel, Valérie Outrequin, E...I...et Emmanuelle A...-K... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCP Gagnebien et Galibert, à la SCP Bodard et Brohier, à la SCP Daniel et Guedj, à Me G...D..., à la SCP Maymaud et Poret, à Me H...E..., à la SCP Pierre Lemée et François Lemée, à la garde des sceaux, ministre de la justice et à la SCP AndréC..., OliverB..., Stéphane A...-K..., RaynaldC..., Thibaut Bunetel, Valérie Outrequin, E...I...et Emmanuelle A...-K....


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 365968
Date de la décision : 12/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 fév. 2014, n° 365968
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Roussel
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP BORE, SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:365968.20140212
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