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15/01/2014 | FRANCE | N°371525

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 15 janvier 2014, 371525


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 août et 3 septembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. D...A..., demeurant à..., à Bois d'Arcy (78395) ; M. B...A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 4 juillet 2013 accordant son extradition aux autorités de la République du Cap-Vert ;

2°) d'enjoindre au directeur de la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy de le libérer sans délai ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros

à Maître Delamarre, son avocat, en application des articles L. 761-1 du code de justic...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 août et 3 septembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. D...A..., demeurant à..., à Bois d'Arcy (78395) ; M. B...A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 4 juillet 2013 accordant son extradition aux autorités de la République du Cap-Vert ;

2°) d'enjoindre au directeur de la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy de le libérer sans délai ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros à Maître Delamarre, son avocat, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Chadelat, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Delamarre, avocat de M. C...A...;

1. Considérant que, par le décret attaqué du 4 juillet 2013, le Premier ministre a accordé aux autorités de la République du Cap-Vert l'extradition de M. D...A..., aux fins d'exécution d'une condamnation à vingt ans d'emprisonnement prononcée le 23 février 2010 par le tribunal de Comarca de Praïa pour des faits de vol avec violence et de trafic de stupéfiants aggravé et devenue définitive à la suite de l'arrêt de la Cour suprême de justice du Cap-Vert du 18 janvier 2011 ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des mentions de l'ampliation du décret attaqué figurant au dossier et certifiée conforme par le secrétaire général du Gouvernement, que le décret a été signé par le Premier ministre et contresigné par la garde des sceaux, ministre de la justice ; que l'ampliation notifiée à M. B...A...n'avait pas à être revêtue de ces signatures ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que le décret attaqué comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il satisfait ainsi à l'exigence de motivation prévue par l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

4. Considérant, en troisième lieu, que le décret attaqué est rédigé en langue française et qu'il n'est pas contesté que la version en langue portugaise dont a été destinataire M. B... A...est la traduction exacte de celui-ci ;

Sur la légalité interne :

5. Considérant, en premier lieu que, si M. B...A...soutient que la demande d'extradition a été présentée par les autorités de la République du Cap-Vert pour l'exécution d'une condamnation relative à une infraction politique et à des fins politiques, dans un contexte de dénonciation de corruption de fonctionnaires de police, il ne ressort des pièces du dossier ni que les faits qui lui sont reprochés, qualifiés en droit français de vol aggravé et de détention de stupéfiants, constituent une infraction politique par nature, ni que les autorités de la République du Cap-Vert aient formé leur demande dans un but autre que la poursuite d'une infraction de droit commun ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que, si M. B...A...fait valoir que le décret attaqué ne permet pas de vérifier si les faits qui lui sont reprochés satisfont l'exigence de la double incrimination par la législation de l'Etat requérant et celle de l'Etat requis, en matière d'extradition, faute d'avoir visé les textes français applicables, il ressort des termes mêmes du décret que le contrôle de l'exigence de la double incrimination a été opéré par son auteur ;

7. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que M. B...A...a déposé une demande de statut de réfugié, au demeurant postérieurement au décret attaqué, ne fait pas obstacle à ce que le gouvernement français procède à son extradition ; qu'il appartient au Conseil d'Etat statuant sur la légalité du décret d'extradition et saisi d'une demande de contestation sur ce point, d'apprécier, au vu des éléments qui lui sont soumis et en faisant, le cas échéant, usage de ses pouvoirs d'instruction, si le requérant peut se prévaloir de la qualité de réfugié pour s'opposer à l'exécution du décret ; qu'en l'espèce, les risques de représailles personnelles que M. B...A...allègue, non étayés par les pièces du dossier, en cas de retour dans son pays d'origine, ne permettent pas de lui reconnaître une telle qualité ;

8. Considérant, enfin, que, si M. B...A...soutient que l'exécution du décret d'extradition l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'apporte pas d'éléments de nature à établir la réalité de tels risques pour ce qui le concerne personnellement ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...A...n'est pas fondé à demander l'annulation du décret du 4 juillet 2013 accordant son extradition aux autorités de la République du Cap-Vert et que ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. D...A...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 371525
Date de la décision : 15/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 jan. 2014, n° 371525
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Chadelat
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : DELAMARRE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:371525.20140115
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