Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2011 et 20 mars 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B...et Mme D... C..., épouseB..., demeurant... ; M. et Mme B...demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10NT00268 du 21 octobre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur appel contre le jugement n° 05-5288 du 3 décembre 2009 du tribunal administratif de Rennes rejetant leur demande tendant à ce que la commune de Roscoff soit condamnée à leur verser la somme de 80 000 euros en réparation des préjudices résultant du fonctionnement de terrains de tennis municipaux situés à proximité de leur domicile ainsi que la somme de 10 000 euros chacun au titre de leur préjudice personnel ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Roscoff le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 2006-1099 du 31 août 2006 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Blanc, Rousseau, avocat de M. et Mme B...et à Me Foussard, avocat de la commune de Roscoff ;
1. Considérant que M. et Mme B...ont recherché devant la juridiction administrative la responsabilité de la commune de Roscoff (Finistère) afin d'obtenir réparation des préjudices résultant pour eux de l'exploitation de quatre courts de tennis aménagés par cette commune à proximité de leur maison d'habitation ; que, par un jugement du 3 décembre 2009, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ; que M. et Mme B...se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 21 octobre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur appel contre ce jugement ;
2. Considérant que, pour juger que le préjudice invoqué par M. et Mme B...ne présentait pas un caractère grave et spécial, seul de nature à justifier leur indemnisation en l'absence de faute de la commune, la cour administrative d'appel de Nantes a relevé, d'une part, que l'émergence sonore constatée par l'expert sur la terrasse des requérants était légèrement inférieure au seuil prévu par les dispositions du code de la santé publique et, d'autre part, que si cette émergence dépassait légèrement le seuil en question au premier étage de leur maison, cette gêne sonore n'était constituée que lorsque la fenêtre du toit était ouverte ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les courts de tennis en cause, aménagés à moins de dix mètres de la propriété de M. et Mme B...à une date postérieure à l'emménagement de ces derniers, connaissent des périodes d'utilisation simultanée et continue pouvant atteindre treize heures par jour, provoquant des bruits et des nuisances permanents ou quasi-permanents, et parfois élevés, liés à la présence des joueurs et, certains jours, de public ; qu'au surplus, les périodes d'utilisation les plus intenses coïncident avec les périodes de beau temps durant lesquelles la jouissance normale de leur domicile par M. et Mme B... comporte l'usage de leur jardin et de leur terrasse ainsi que l'ouverture de leurs portes et fenêtres ; que l'aménagement d'un talus planté par la commune de Roscoff n'a pas été de nature à atténuer la gêne sonore directe et persistante à laquelle les intéressés sont exposés ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, dont il ressortait que la gêne subie par M. et Mme B...du fait du fonctionnement des courts excédait les inconvénients que doivent normalement supporter sans indemnisation, dans l'intérêt général, les personnes résidant à proximité d'un ouvrage public, la cour administrative d'appel de Nantes a inexactement qualifié les faits particuliers de l'espèce en jugeant que le dommage ne revêtait pas un caractère grave et spécial ; qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que M. et Mme B...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Roscoff la somme de 3 000 euros, à verser à M. et Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. et Mme B..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 21 octobre 2011 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : La commune de Roscoff versera à M. et Mme B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Roscoff au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., à Mme D... C..., épouse B...et à la commune de Roscoff.