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03/07/2013 | FRANCE | N°367372

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 03 juillet 2013, 367372


Vu le pourvoi, enregistré le 2 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1300363 du 15 mars 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a, sur la demande de Mme B...C...veuveA..., d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 21 janvier 2013 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé son admission au séjour au

titre de l'asile et, d'autre part, enjoint au préfet de la Moselle d...

Vu le pourvoi, enregistré le 2 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1300363 du 15 mars 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a, sur la demande de Mme B...C...veuveA..., d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 21 janvier 2013 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé son admission au séjour au titre de l'asile et, d'autre part, enjoint au préfet de la Moselle de lui délivrer, dans un délai de quinze jours, un récépissé de sa demande de titre de séjour jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ou, au plus tard, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le recours en annulation ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de Mme A...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Stéphane Bouchard, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de Mme A...;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que MmeA..., de nationalité kosovare, a sollicité son admission au séjour en France au titre de l'asile auprès du préfet de la Moselle le 17 octobre 2012 ; que, par une ordonnance du 15 mars 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a suspendu l'exécution de la décision du 21 janvier 2013 par laquelle le préfet a refusé son admission au séjour ; que le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : / 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 (...) ; / (...) Les dispositions du présent article ne font pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne qui se trouverait néanmoins dans l'un des cas mentionnés aux 1° à 4°. " ; qu'aux termes de l'article 2 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers : " Aux fins du présent règlement, on entend par: / (...) i) " membres de la famille ", dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine, les membres suivants de la famille du demandeur présents sur le territoire des Etats membres: / (...) ii) les enfants mineurs des couples (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 du même règlement : " Si le demandeur d'asile a, dans un Etat membre, un membre de sa famille dont la demande n'a pas encore fait l'objet d'une première décision au fond, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande d'asile, à condition que les intéressés le souhaitent. " ; qu'aux termes de l'article 13 du même règlement : " Lorsque l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans le présent règlement, le premier Etat membre auprès duquel la demande a été présentée est responsable de l'examen. " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le fils et la belle-fille de MmeA..., tous deux majeurs et de nationalité kosovare, ont demandé, en même temps que cette dernière, leur admission au séjour en France au titre de l'asile auprès du préfet de la Moselle, laquelle a été refusée par deux décisions du 21 janvier 2013, au motif que ce couple avait déjà déposé une demande d'asile en Italie en 2008 et que ce pays, qui avait accepté sa reprise en charge, était donc responsable de sa nouvelle demande ; que le préfet, au vu de ces demandes d'asile déjà déposées en Italie par son fils et sa belle-fille, a refusé, le même jour, l'admission au séjour de Mme A...au motif que l'Italie était responsable de sa demande d'asile par application de l'article 8 du règlement précité ; que, toutefois, un enfant majeur et son conjoint ne peuvent être regardés comme des membres de la famille d'un demandeur, telle que définie au i) de l'article 2 du règlement précité ; que, par suite, en jugeant qu'était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité du refus d'autorisation de séjour au titre de l'asile opposé à Mme A...le moyen tiré de ce que cette décision a été prise en méconnaissance de l'article 8 du règlement précité, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit ;

5. Considérant, en second lieu, que si le juge des référés a également estimé que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 15 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 constituait un autre motif susceptible, selon lui, de conduire à la suspension de la décision attaquée, ce motif a un caractère surabondant ; que, par suite, les moyens soulevés par le ministre contre ce motif dans son pourvoi sont inopérants ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

7. Considérant que Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP de Chaisemartin-Courjon, avocat de MmeA..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à la SCP de Chaisemartin-Courjon ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SCP de Chaisemartin-Courjon, avocat de MmeA..., une somme de 2 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à Mme B...C...veuveA....


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 367372
Date de la décision : 03/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2013, n° 367372
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Stéphane Bouchard
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier
Avocat(s) : SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:367372.20130703
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