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28/06/2013 | FRANCE | N°359108

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 28 juin 2013, 359108


Vu le pourvoi, enregistré le 3 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique, dont le siège est à l'abbaye Sainte Scholastique à Dourgne (81110), représentée par sa mère abbesse ; la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11BX01701 du 6 mars 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, faisant droit à la requête de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), a, d'un

e part, annulé le jugement n° 0705134 du 6 mai 2011 par lequel le tribunal a...

Vu le pourvoi, enregistré le 3 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique, dont le siège est à l'abbaye Sainte Scholastique à Dourgne (81110), représentée par sa mère abbesse ; la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11BX01701 du 6 mars 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, faisant droit à la requête de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), a, d'une part, annulé le jugement n° 0705134 du 6 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 17 septembre 2007 du délégué régional adjoint Midi-Pyrénées de l'agence rejetant sa demande de subvention pour la réalisation d'une installation solaire thermique de production d'eau chaude sanitaire, d'autre part, rejeté sa demande de première instance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de l'ADEME ;

3°) de mettre à la charge de l'ADEME la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ;

Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Martinel, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Ortscheidt, avocat de la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique et à Me Ricard, avocat de l'agence de l'environnement et de la maitrise de l'énergie (ADEME) ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique a demandé à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) de lui octroyer une subvention pour l'étude et la réalisation d'une installation solaire thermique destinée à la production d'eau chaude sanitaire ; que, par une décision du 17 septembre 2007, le délégué régional adjoint Midi-Pyrénées de l'agence a rejeté cette demande ; que, par un jugement du 6 mai 2011, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette décision ; que la communauté se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 mars 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, faisant droit à l'appel de l'ADEME, a annulé ce jugement et rejeté sa demande de première instance ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat : " La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public " ; que l'article 2 de cette loi dispose : " La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l'Etat, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l'exercice des cultes " ; qu'enfin, aux termes du dernier alinéa de l'article 19 de cette même loi, les associations formées pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice d'un culte en vertu du titre IV de cette loi " ne pourront, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l'Etat, des départements et des communes. Ne sont pas considérées comme subventions les sommes allouées pour réparations aux édifices affectés au culte public, qu'ils soient ou non classés monuments historiques " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de la loi du 9 décembre 1905 que l'ADEME, établissement public de l'Etat, ne peut, dans le cadre de ses missions, accorder aucune subvention, à l'exception des concours pour des travaux de réparation d'édifices cultuels, aux associations cultuelles au sens du titre IV de cette loi ; qu'il lui est également interdit d'apporter une aide quelconque à une manifestation qui participe de l'exercice d'un culte ; qu'elle ne peut accorder une subvention à une association qui, sans constituer une association cultuelle au sens du titre IV de la même loi, a des activités cultuelles, qu'en vue de la réalisation d'un projet, d'une manifestation ou d'une activité qui ne présente pas un caractère cultuel et n'est pas destiné au culte et à la condition, en premier lieu, que le soutien de ce projet, cette manifestation ou cette activité s'inscrive dans le cadre des missions d'intérêt général qui lui ont été confiées par le législateur et, en second lieu, que soit garanti, notamment par voie contractuelle, que la subvention est exclusivement affectée au financement de ce projet, de cette manifestation ou de cette activité et n'est pas utilisée pour financer les activités cultuelles de l'association ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 131-3 du code de l'environnement : " I. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie est un établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial. / II. Cet établissement public exerce des actions, notamment d'orientation et d'animation de la recherche, de prestation de services, d'information et d'incitation dans chacun des domaines suivants : / 1° La prévention et la lutte contre la pollution de l'air ; / (...) / 4° La réalisation d'économies d'énergie et de matières premières et le développement des énergies renouvelables, notamment d'origine végétale (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'au titre de ces missions, l'ADEME menait, conjointement avec certaines régions, dont la région Midi-Pyrénées, et dans le cadre des contrats de programme Etat-régions, de programmes actions de subvention à des systèmes de chauffage utilisant des énergies renouvelables ; que dès lors, en jugeant que le projet ayant fait l'objet de la demande de subvention, qui visait à l'étude et l'installation d'un tel système de chauffage, ne s'inscrivait pas dans le cadre des missions d'intérêt général confiées par le législateur à l'ADEME, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de qualification juridique des faits ; que son arrêt doit être annulé, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ADEME la somme de 3 000 euros à verser à la communauté requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 6 mars 2012 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : L'ADEME versera la somme de 3 000 euros à la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la communauté des bénédictines de l'abbaye Sainte Scholastique et à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 359108
Date de la décision : 28/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2013, n° 359108
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Agnès Martinel
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : RICARD ; SCP ORTSCHEIDT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:359108.20130628
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