Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 mai et 1er septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme B...A..., demeurant ... ; Mme A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA04475-09PA04506 du 15 mars 2010 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a, d'une part, annulé le jugement n° 0601959/3-3 du 9 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 2 décembre 2005 de l'inspecteur du travail de Paris et a refusé d'autoriser le transfert de son contrat de travail en tant que salariée protégée de la société Hôtel Ritz Limited à la société Elyo, d'autre part, rejeté ses conclusions de première instance ;
2°) de mettre à la charge de la société Hôtel Ritz Limited et de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hervé Guichon, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme A...et à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la société Hôtel Ritz Limited ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 436-1 du code du travail alors applicable : " Lorsqu'un membre du comité d'entreprise ou un représentant syndical au comité d'entreprise est compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, (...) le transfert de ce salarié doit être soumis à l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail qui s'assure que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire. (....) " ; qu'aux termes de l'article L. 236-11 du même code alors applicable : " Les dispositions des articles L. 436-1, (...) sont applicables aux salariés qui siègent ou ont siégé en qualité de représentants du personnel dans un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail " ; que la protection qui est due aux salariés mentionnés par ces dispositions s'étend aux salariés qui sont candidats aux fonctions de représentant du personnel au sein d'un comité d'entreprise ou d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ;
2. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'il est saisi, en application des dispositions précités, d'une demande d'autorisation de transfert du contrat de travail d'un salarié protégé, l'inspecteur du travail doit prendre en compte l'ensemble des mandats au titre desquels le salarié est, à la date de la demande, protégé ; qu'en revanche, la circonstance que, postérieurement à la demande d'autorisation de transfert, le salarié devienne bénéficiaire d'une protection à un nouveau titre est sans incidence sur l'appréciation qu'il incombe à l'inspecteur du travail de porter, eu égard à son office, qui est de s'assurer que le transfert demandé ne constitue pas une mesure discriminatoire ; qu'il n'en va autrement que s'il est établi que l'employeur avait connaissance, à la date de la demande de transfert, des faits à raison desquels le salarié allait bénéficier d'une nouvelle protection ; que, dans un telle hypothèse, la décision de l'inspecteur du travail n'est régulièrement prise que s'il tient compte de la nouvelle protection du salarié ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que la candidature de Mme A...à un mandat de représentation au CHSCT, dont elle a relevé qu'elle était postérieure à la demande d'autorisation de son employeur et dont il n'était pas soutenu devant elle qu'elle aurait été connue de l'employeur à la date de sa demande, était sans incidence sur la légalité de la décision de l'inspecteur du travail, la cour, qui a suffisamment motivé sa décision sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que, pour statuer régulièrement sur la demande de transfert dont il est saisi, l'inspecteur du travail est tenu de prendre en compte tous les mandats au titre desquels une telle autorisation doit être demandée ; qu'il appartient en principe à l'employeur, pour que l'inspecteur du travail soit mis à même de porter l'appréciation qui lui incombe, de porter à la connaissance de celui-ci les mandats détenus par le salarié ; que dans l'hypothèse où, au cours de l'instruction de la demande dont il est saisi, l'inspecteur du travail prend connaissance d'un mandat au titre duquel le salarié bénéficie d'une protection et dont l'employeur a omis de faire état, il est tenu de le prendre en compte pour porter son appréciation, en vérifiant notamment si l'omission de l'employeur ne révèle pas une discrimination ;
5. Considérant que la cour administrative d'appel de Paris a relevé que l'inspecteur du travail avait eu connaissance, par la communication des procès-verbaux du comité d'entreprise, du mandat de représentant syndical au comité d'entreprise de MmeA..., qui n'était pas mentionné dans la demande d'autorisation de l'employeur ; qu'il ressort des pièces du dossier qui lui était soumis qu'il n'était ni établi ni même allégué devant elle que les mentions ou les motifs de la décision de l'inspecteur du travail révélaient que celui-ci n'avait pas pris en compte l'ensemble des mandats détenus par MmeA... ; que, dès lors, en jugeant, par un arrêt suffisamment motivé sur ce point, que la décision de l'inspecteur du travail avait été régulièrement prise, la cour n'a commis aucune erreur de droit ;
6. Considérant, en troisième lieu, que la cour, qui n'était pas tenue de répondre à tous les arguments de la requérante, a jugé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qui lui était soumis que le transfert du contrat de Mme A...présentait un caractère discriminatoire à raison des mandats dont l'intéressée était investie ; que, contrairement à ce que soutient Mme A..., son arrêt est suffisamment motivé sur ce point ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que les irrégularités de la procédure suivie pour le transfert partiel d'entreprise ou d'établissement sont sans incidence sur la légalité de la décision autorisant le transfert d'un salarié protégé qui est compris dans ce transfert partiel ; que, dès lors, en jugeant que la circonstance que la cour d'appel de Paris avait annulé les délibérations du comité d'entreprise de la société Hôtel Ritz Limited, et plus particulièrement l'avis de ce comité sur le projet d'externalisation des activités au sein desquelles la requérante était employée, était sans influence sur le litige relatif au transfert du contrat de travail de Mme A..., la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Hôtel Ritz au titre de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme A...est rejeté.
Article 2 : Les conclusions de la société Hôtel Ritz Limited présentées au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et à la société Hôtel Ritz Limited.
Copie en sera transmise pour information au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.