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26/04/2013 | FRANCE | N°357239

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 26 avril 2013, 357239


Vu la requête, enregistrée le 29 février 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Bièvres, représentée par son maire ; la commune de Bièvres demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-1994 du 27 décembre 2011 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d'outre-mer de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, en tant qu'il fixe sa population totale, pour l'application des

lois et règlements à compter du 1er janvier 2012, à un chiffre de 4 932...

Vu la requête, enregistrée le 29 février 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Bièvres, représentée par son maire ; la commune de Bièvres demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-1994 du 27 décembre 2011 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d'outre-mer de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, en tant qu'il fixe sa population totale, pour l'application des lois et règlements à compter du 1er janvier 2012, à un chiffre de 4 932 habitants, qu'elle estime inférieur à la réalité ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de rectifier le chiffre de la population de la commune de Bièvres en comptabilisant les habitants de la base aérienne 107, dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 avril 2013, présentée par la commune de Bièvres ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Pourreau, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

1. Considérant, en premier lieu, que, dès lors qu'un ministre est signataire d'un décret, l'absence de contreseing d'un ministre auprès de ce ministre ne peut affecter la régularité de ce décret ; que le décret attaqué a été signé par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière faute de comporter le contreseing du ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales doit être écarté ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 2151-1 du code général des collectivités territoriales : " I. - Les personnes prises en compte dans les catégories de population définies ci-dessous sont les personnes résidant dans les logements d'une commune, celles résidant dans les communautés telles que définies aux V et VI du présent article, les personnes sans abri et les personnes résidant habituellement dans des habitations mobiles. / II. - Les catégories de population sont : / 1. La population municipale ; / 2. La population comptée à part ; / 3. La population totale, qui est la somme des deux précédentes. / III. - La population municipale d'une commune, mentionnée au 1 du II du présent article, comprend : / 1. Les personnes ayant leur résidence habituelle sur le territoire de la commune. La résidence habituelle, au sens du présent décret, d'une personne ayant plusieurs résidences en France métropolitaine, dans les départements d'outre-mer ou à Saint-Pierre-et-Miquelon est : / a) Pour une personne mineure résidant ailleurs du fait de ses études, la résidence de sa famille ; / (...) c) Pour une personne majeure résidant dans une communauté appartenant à la catégorie 4 définie au VI du présent article, la communauté ; / (...) V. - Une communauté est un ensemble de locaux d'habitation relevant d'une même autorité gestionnaire et dont les habitants partagent à titre habituel un mode de vie commun. La population de la communauté comprend les personnes qui résident dans la communauté, à l'exception de celles résidant dans des logements de fonction. / VI. - Les catégories de communautés sont : / (...) 4. Les établissements hébergeant des élèves ou des étudiants, y compris les établissements militaires d'enseignement ; (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions aux personnes séjournant dans des casernes, quartiers, bases ou camps militaires situés sur le territoire de plusieurs communes, il appartient à l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) de répartir la population recensée entre ces communes en tenant compte de la situation des locaux d'habitation de l'établissement et de l'utilisation par ces personnes des principaux services publics dont la charge incombe à la commune ; que, dans le cas où ces personnes utiliseraient principalement des services publics à la charge d'une ou de plusieurs communes autres que celles sur le territoire desquelles les locaux d'habitation sont situés, la répartition de la population correspondant à la situation des locaux d'habitation devrait être pondérée en conséquence ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la base aérienne 107 est située sur le territoire des communes de Bièvres, Vélizy-Villacoublay et Jouy-en-Josas ; que le chiffre de 121 personnes résidant sur la base aérienne et rattachées à la population de la commune de Bièvres qui a été retenu par l'INSEE correspond au nombre de personnes résidant dans des locaux d'habitation de la base aérienne situés sur le territoire de la commune de Bièvres ; qu'à la date du décret attaqué, d'une part la distribution d'eau et la collecte des déchets faisaient l'objet de contrats conclus directement entre la base et des prestataires externes, d'autre part la voie d'accès principal à la base était une voie communale située sur le territoire de la commune de Vélizy-Villacoublay, même si un accès secondaire existait sur le territoire de la commune de Bièvres ; qu'enfin, seule une partie des eaux usées de la base traitées par le collecteur appartenant au syndicat intercommunal pour l'assainissement de la vallée de la Bièvre était collectée par un réseau d'assainissement dont la commune de Bièvres supportait la charge financière ; qu'ainsi, les personnes résidant sur la base aérienne n'utilisaient pas principalement des services publics à la charge de la commune de Bièvres ; que, par suite, la répartition des personnes résidant à la base aérienne entre les communes sur le territoire desquelles elle est située n'est pas entachée d'erreur de droit ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'il est recouru au critère de la situation des locaux d'habitation pour répartir entre les diverses communes sur le territoire desquelles est située une communauté les personnes qui y ont leur résidence ; que n'ont leur résidence dans une communauté que des personnes qui y passent leur période quotidienne de repos ; que, dès lors, dans le cas où les bâtiments de restauration sont distincts des bâtiments d'hébergement, la répartition des personnes doit s'effectuer sur la base de la situation des seuls bâtiments d'hébergement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué, en tant qu'il fixe le chiffre de la population de la commune de Bièvres, serait entaché d'une erreur de droit au motif que n'a pas été prise en compte, pour la répartition des personnes résidant sur la base aérienne, la situation des bâtiments de restauration doit être écarté ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Bièvres n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret attaqué ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au Premier ministre d'édicter un nouveau décret ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la commune de Bièvres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Bièvres, au ministre de l'économie et des finances, au ministre de l'intérieur, au ministre des outre-mer et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 357239
Date de la décision : 26/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 avr. 2013, n° 357239
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christophe Pourreau
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:357239.20130426
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