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24/04/2013 | FRANCE | N°354575

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 24 avril 2013, 354575


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 décembre 2011 et 2 mars 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant ...; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10PA04670 du 4 juillet 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, sur appel du préfet de police, d'une part, a annulé le jugement n° 0919814/3-1 du 29 juin 2010 du tribunal administratif de Paris annulant l'arrêté du 13 novembre 2009 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour

portant la mention "étudiant", l'a obligé à quitter le territoire franç...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 décembre 2011 et 2 mars 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant ...; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10PA04670 du 4 juillet 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, sur appel du préfet de police, d'une part, a annulé le jugement n° 0919814/3-1 du 29 juin 2010 du tribunal administratif de Paris annulant l'arrêté du 13 novembre 2009 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "étudiant", l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté présentée devant le tribunal administratif de Paris ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP Célice-Blancpain-Soltner, son avocat, de la somme de 3 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Eric Aubry, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M.A...,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le préfet de police, par arrêté du 13 novembre 2009, a refusé de délivrer, à M. B...A..., fils du consul de Tunisie alors en poste à Paris, un titre de séjour " étudiant ", a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que, par un jugement du 29 juin 2010, le tribunal administratif de Paris, en se fondant sur les stipulations de l'article 46 de la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires, a annulé cet arrêté ; que, par un arrêt du 4 juillet 2011, contre lequel M. A...se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris, considérant que l'intéressé ne pouvait se prévaloir des stipulations de cette convention faute d'avoir notifié sa présence en France au ministère des affaires étrangères en application de l'article 24 de la convention, a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris et rejeté la demande de première instance ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué... " ; que lorsque le tribunal administratif a fait droit à une demande en se fondant sur un moyen inopérant, notamment en faisant application d'une règle de droit inapplicable, et que, pour contester le jugement de ce tribunal, l'appelant n'a pas invoqué le caractère inopérant du moyen retenu par les premiers juges, il appartient au juge d'appel de relever d'office cette inopérance pour censurer le motif retenu par le tribunal ; qu'il ne peut toutefois le faire qu'après en avoir préalablement informé les parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

3. Considérant que la cour administrative d'appel de Paris ne pouvait ainsi relever d'office le caractère inopérant du moyen retenu par le tribunal administratif de Paris pour annuler l'arrêté du préfet de police sans en avoir préalablement informé les parties ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour a entaché son arrêt d'irrégularité ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. A...est fondé à en demander l'annulation ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

5. Considérant que la requête d'appel du préfet de police a été enregistrée, compte tenu des jours ouvrables, au greffe de la cour administrative d'appel de Paris dans le délai de recours d'un mois prévu par l'article R. 776-20 du code de justice administrative ; que, dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par M. A...et tirée de la tardiveté de cet appel ne peut qu'être écartée ;

6. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 46 de la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires : " Les fonctionnaires consulaires et les employés consulaires, ainsi que les membres de leur famille vivant à leur foyer, sont exempts de toutes les obligations prévues par les lois et règlements de l'Etat de résidence en matière d'immatriculation des étrangers et de permis de séjour " ; que ces stipulations ouvrent droit, pour les personnes qu'elles visent, à un régime dérogatoire en matière de séjour des étrangers en France, en leur permettant de bénéficier d'un titre spécial de séjour dès leur inscription sur les listes consulaires ; que le bénéfice de ce régime dérogatoire est, toutefois, subordonné au respect des formalités prévues par le I de l'article 24 de la convention de Vienne, aux termes duquel : " Sont notifiés au Ministère des affaires étrangères de l'Etat de résidence ou à l'autorité désignée par ce ministère:/ a) La nomination des membres d'un poste consulaire, leur arrivée après leur nomination au poste consulaire, leur départ définitif ou la cessation de leurs fonctions, ainsi que tous autres changements intéressant leur statut qui peuvent se produire au cours de leur service au poste consulaire ;/ b) L'arrivée et le départ définitif d'une personne de la famille d'un membre d'un poste consulaire vivant à son foyer et, s'il y a lieu, le fait qu'une personne devient ou cesse d'être membre de sa famille ; (...) " ; qu'il suit de là que, dès lors que M. A...n'avait pas notifié sa présence en France au ministère des affaires étrangères, en application de l'article 24 précité, il ne pouvait se prévaloir des stipulations de l'article 46 de la même convention ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la violation de l'article 46 de la convention de Vienne pour annuler la décision contestée ;

7. Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner l'autre moyen soulevé par M. A...devant le tribunal administratif de Paris ;

8. Considérant que si M A...fait valoir que le refus de titre de séjour qui lui est opposé porte une atteinte disproportionnée au respect de son droit à une vie privée et familiale normale et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen est inopérant à l'encontre d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour demandé en qualité d'étudiant ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 novembre 2009 ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Célice-Blancpain-Soltner, avocat de M. A...;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 4 juillet 2011 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 29 juin 2010 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 4 : Les conclusions de M. A...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5: La présente décision sera notifiée à M. B...A..., au ministre de l'intérieur et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 354575
Date de la décision : 24/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ACTES - ACCORDS INTERNATIONAUX - APPLICATION PAR LE JUGE FRANÇAIS - CONVENTION DE VIENNE DU 24 AVRIL 1963 SUR LES RELATIONS CONSULAIRES - RÉGIME DÉROGATOIRE EN MATIÈRE DE SÉJOUR OUVERT PAR LE 1 DE L'ARTICLE 46 - CONDITION - RESPECT DES FORMALITÉS DE NOTIFICATION AU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE L'ETAT DE RÉSIDENCE PRÉVUES PAR LE 1 DE L'ARTICLE 24 - EXISTENCE.

01-01-02-02 Le bénéfice du régime dérogatoire en matière de séjour des étrangers en France ouvert par le paragraphe 1 de l'article 46 de la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires, aux termes duquel : Les fonctionnaires consulaires et les employés consulaires, ainsi que les membres de leur famille vivant à leur foyer, sont exempts de toutes les obligations prévues par les lois et règlements de l'Etat de résidence en matière d'immatriculation des étrangers et de permis de séjour , qui permet aux personnes qu'il vise de bénéficier, dès leur inscription sur les listes consulaires, d'un titre de séjour spécial, est subordonné au respect des formalités prévues par le 1 de l'article 24 de cette convention. Par suite, les fonctionnaires et employés consulaires et les membres de leur famille ne peuvent se prévaloir des stipulations de l'article 46 s'ils n'ont pas notifié leur présence en France au ministère des affaires étrangères, en application de l'article 24 de cette convention.

ÉTRANGERS - SÉJOUR DES ÉTRANGERS - TEXTES APPLICABLES - CONVENTIONS INTERNATIONALES - CONVENTION DE VIENNE DU 24 AVRIL 1963 SUR LES RELATIONS CONSULAIRES - RÉGIME DÉROGATOIRE EN MATIÈRE DE SÉJOUR OUVERT PAR LE 1 DE L'ARTICLE 46 - CONDITION - RESPECT DES FORMALITÉS DE NOTIFICATION AU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE L'ETAT DE RÉSIDENCE PRÉVUES PAR LE 1 DE L'ARTICLE 24 - EXISTENCE.

335-01-01-02 Le bénéfice du régime dérogatoire en matière de séjour des étrangers en France ouvert par le paragraphe 1 de l'article 46 de la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires, aux termes duquel : Les fonctionnaires consulaires et les employés consulaires, ainsi que les membres de leur famille vivant à leur foyer, sont exempts de toutes les obligations prévues par les lois et règlements de l'Etat de résidence en matière d'immatriculation des étrangers et de permis de séjour , qui permet aux personnes qu'il vise de bénéficier, dès leur inscription sur les listes consulaires, d'un titre de séjour spécial, est subordonné au respect des formalités prévues par le 1 de l'article 24 de cette convention. Par suite, les fonctionnaires et employés consulaires et les membres de leur famille ne peuvent se prévaloir des stipulations de l'article 46 s'ils n'ont pas notifié leur présence en France au ministère des affaires étrangères, en application de l'article 24 de cette convention.

ÉTRANGERS - SÉJOUR DES ÉTRANGERS - AUTORISATION DE SÉJOUR - RÉGIME DÉROGATOIRE EN MATIÈRE DE SÉJOUR OUVERT PAR LE 1 DE L'ARTICLE 46 DE LA CONVENTION DE VIENNE DU 24 AVRIL 1963 SUR LES RELATIONS CONSULAIRES - CONDITION - RESPECT DES FORMALITÉS DE NOTIFICATION AU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE L'ETAT DE RÉSIDENCE PRÉVUES PAR LE 1 DE L'ARTICLE 24 DE CETTE CONVENTION - EXISTENCE.

335-01-02 Le bénéfice du régime dérogatoire en matière de séjour des étrangers en France ouvert par le paragraphe 1 de l'article 46 de la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires, aux termes duquel : Les fonctionnaires consulaires et les employés consulaires, ainsi que les membres de leur famille vivant à leur foyer, sont exempts de toutes les obligations prévues par les lois et règlements de l'Etat de résidence en matière d'immatriculation des étrangers et de permis de séjour , qui permet aux personnes qu'il vise de bénéficier, dès leur inscription sur les listes consulaires, d'un titre de séjour spécial, est subordonné au respect des formalités prévues par le 1 de l'article 24 de cette convention. Par suite, les fonctionnaires et employés consulaires et les membres de leur famille ne peuvent se prévaloir des stipulations de l'article 46 s'ils n'ont pas notifié leur présence en France au ministère des affaires étrangères, en application de l'article 24 de cette convention.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 avr. 2013, n° 354575
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Eric Aubry
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:354575.20130424
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