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17/04/2013 | FRANCE | N°359423

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 17 avril 2013, 359423


Vu 1°, sous le n° 359 423, le pourvoi, enregistré le 15 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. B... A..., demeurant ...) ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 039-2011 du 16 mars 2012 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, statuant sur l'appel du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, a réformé la décision du 13 septembre 2008 de la chambre disciplinaire de première instance du conseil interrégional Provence-Alp

es-Côte-d'Azur-Corse de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et prono...

Vu 1°, sous le n° 359 423, le pourvoi, enregistré le 15 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. B... A..., demeurant ...) ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 039-2011 du 16 mars 2012 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, statuant sur l'appel du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, a réformé la décision du 13 septembre 2008 de la chambre disciplinaire de première instance du conseil interrégional Provence-Alpes-Côte-d'Azur-Corse de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et prononcé sa radiation du tableau de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel formé par le procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, d'annuler la décision du 16 septembre 2008 de la chambre disciplinaire de première instance et de rejeter la plainte formée devant elle le 20 mars 2008 par le procureur de la République ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que le versement du montant de la contribution à l'aide juridique prévue à l'article R. 761-1 du même code ;

Vu 2°, sous le n° 359 424, la requête, enregistrée le 15 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. B... A..., demeurant ...) ; M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner le sursis à exécution de la décision n° 039-2011 du 16 mars 2012 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, statuant sur l'appel du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, a réformé la décision du 13 septembre 2008 de la chambre disciplinaire de première instance du conseil interrégional Provence-Alpes-Côte-d'Azur-Corse de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et prononcé sa radiation du tableau de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que le versement du montant de la contribution à l'aide juridique prévue à l'article R. 761 du même code ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A...et de la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat du Conseil national de l'ordre des masseurs- kinésithérapeutes,

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A...et à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat du Conseil national de l'ordre des masseurs- kinésithérapeutes ;

1. Considérant que le pourvoi et la requête de M. A...tendent respectivement à l'annulation et au sursis à exécution de la décision du 16 mars 2012 de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...a obtenu le 9 novembre 2007 son inscription au tableau départemental du conseil de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes des Bouches-du-Rhône ; qu'il avait antérieurement fait l'objet de deux condamnations pénales prononcées par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 7 août 2007 ; que le procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a porté ces condamnations à la connaissance de la chambre disciplinaire de première instance du conseil interrégional de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Provence-Alpes-Côte-d'Azur-Corse le 20 mars 2008 ; que la chambre disciplinaire de première instance a prononcé le 16 septembre 2008 à l'encontre de M. A...une interdiction temporaire d'exercer d'une durée de trois ans, assortie du sursis ; que, sur appel du procureur de la République, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes a porté cette interdiction temporaire d'exercer à une durée de six ans, assortie d'un sursis de trois ans ; que, par un arrêt du 9 juin 2011, le Conseil d'Etat, statuant sur le pourvoi de M. A..., a annulé cette décision et renvoyé l'affaire à la chambre disciplinaire nationale ; que, par une décision du 16 mars 2012, celle-ci a radié M. A... du tableau départemental du conseil de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes des Bouches-du-Rhône ; que M. A...se pourvoit en cassation contre cette dernière décision ;

3. Considérant que la circonstance que des faits reprochés à un masseur-kinésithérapeute sont antérieurs à son inscription à un tableau de l'ordre ne fait pas obstacle à ce que les conseils de l'ordre, statuant en matière disciplinaire, puissent apprécier si ceux de ces faits qui n'étaient pas connus lors de l'inscription de l'intéressé sont, par leur nature, incompatibles avec son maintien dans l'ordre et prononcer, si tel est le cas, la radiation du tableau de l'ordre, alors même que l'inscription n'aurait pas été obtenue par fraude et que la radiation serait prononcée plus de quatre mois après l'inscription ; qu'en outre, lorsque les faits étaient connus lors de l'inscription, les juridictions disciplinaires peuvent néanmoins prononcer une radiation dans les mêmes conditions lorsque, postérieurement à l'inscription, l'autorité judiciaire avise l'ordre, comme le prévoit le second alinéa de l'article L. 4126-6 du code de la santé publique, d'une condamnation d'un masseur-kinésithérapeute par le juge pénal et que les faits pour lesquels l'intéressé est condamné sont, par leur nature, incompatibles avec son maintien dans l'ordre ; que les juridictions disciplinaires n'ont toutefois pas compétence, dans ces cas, pour prononcer une sanction autre que la radiation ;

4. Considérant, en premier lieu, que le III de l'article 108 de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique a rétabli dans le code de la santé publique les articles L. 4321-13 à L. 4321-19, précédemment abrogés par la loi du 4 mars 2002 ; que l'article L. 4321-14 prévoit que l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes " veille au maintien des principes de moralité et de probité indispensables à l'exercice de la masso-kinésithérapie et à l'observation, par tous ses membres, des droits, devoirs et obligations professionnels, ainsi que des règles édictées par le code de déontologie prévu à l'article L. 4321-21 " ; que l'article L. 4321-19 rend notamment applicable aux masseurs-kinésithérapeutes l'article L. 4124-6 qui définit une échelle de sanctions, dans laquelle figure la radiation du tableau de l'ordre ; que, compte tenu de ces dispositions législatives, la chambre disciplinaire pouvait, sans méconnaître le principe de légalité des délits ni celui de légalité des peines, sanctionner des faits contraires à la moralité commis par M. A... postérieurement à la publication de la loi du 9 août 2004 par une radiation du tableau de l'ordre ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, la circonstance que les conditions de fonctionnement des chambres disciplinaires n'ont été définies que par un décret du 25 mars 2007 et que le code de déontologie des masseurs-kinésithérapeutes n'a été édicté que par un décret du 3 novembre 2008 est sans incidence à cet égard ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la cour d'appel d'Aix-en-Provence a prononcé le 7 août 2007 contre M. A... une peine d'emprisonnement pour des faits de détention d'images pornographiques représentant des mineurs ou des personnes en ayant l'apparence commis entre 2003 et juin 2005 ; que la chambre disciplinaire nationale s'est fondée sur ceux de ces faits qui étaient postérieurs à la parution de la loi du 9 août 2004 pour prononcer la radiation de l'intéressé ; qu'en faisant état, sans les dénaturer, des faits qui lui étaient reprochés, elle a suffisamment motivé sa décision ; que c'est sans erreur de qualification juridique qu'elle a jugé que, alors même que M. A...se serait soumis à un suivi médical et psychologique, ces faits, contrevenant aux conditions de moralité prévues par l'article L. 4321-14 précité, n'étaient pas compatibles avec le maintien de l'intéressé au sein de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes ;

6. Considérant que la présente décision rejetant le recours présenté par M. A...contre la décision du 16 mars 2012 de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, il n'y a plus lieu de statuer sur sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette décision ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat ou de l'ordre national des masseurs-kinéstihérapeutes, qui ne sont pas, dans l'instance ouverte sous le n° 359 423 comme dans l'instance ouverte sous le n° 359424, les parties perdantes ; que le conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeute, qui n'a pas la qualité de partie à ces instances, ne peut prétendre à ce que les frais qu'il a exposés pour présenter des observations soient mis à la charge de M.A... ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi présenté par M. A...sous le n° 359423 est rejeté.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 359424.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans l'affaire n° 359424 sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans les affaires n° 359423 et n° 359424 sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., au Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Copie pour information en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 359423
Date de la décision : 17/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 avr. 2013, n° 359423
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP HEMERY, THOMAS-RAQUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:359423.20130417
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