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11/02/2013 | FRANCE | N°363844

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 11 février 2013, 363844


Vu l'ordonnance n° 1200252 du 31 octobre 2012, enregistrée le 12 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, avant de statuer sur la demande de l'association Ensemble pour la planète tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté n° 2012/52 du 5 mars 2012 du Président de l'Assemblée de la province Nord autorisant la société Géovic Nouvelle-Calédonie à procéder à des travaux de recherche sur les permis de recherches " Nautilus Thio Nord 01 ", " Nautilius Thio Nord 02 ", " Nautilius Thio

Nord 03 ", " Nautilius Thio Nord 04 ", " Nautilius Thio Nord 05 "...

Vu l'ordonnance n° 1200252 du 31 octobre 2012, enregistrée le 12 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, avant de statuer sur la demande de l'association Ensemble pour la planète tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté n° 2012/52 du 5 mars 2012 du Président de l'Assemblée de la province Nord autorisant la société Géovic Nouvelle-Calédonie à procéder à des travaux de recherche sur les permis de recherches " Nautilus Thio Nord 01 ", " Nautilius Thio Nord 02 ", " Nautilius Thio Nord 03 ", " Nautilius Thio Nord 04 ", " Nautilius Thio Nord 05 " et " Nautilius Kouaoua 01 ", a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de transmettre au Conseil d'Etat le moyen tiré de ce que l'article Lp. 142-10 du code minier de la Nouvelle-Calédonie porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle Calédonie ;

Vu la loi du pays n° 2009-6 du 16 avril 2009 relative au code minier de la Nouvelle-Calédonie ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Samuel Gillis, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller, Meier-Bourdeau, avocat du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, et de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du congrès de la Nouvelle-Calédonie,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Ancel, Couturier-Heller, Meier-Bourdeau, avocat du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, et à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du congrès de la Nouvelle-Calédonie ;

1. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 107 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " Les dispositions d'une loi du pays peuvent faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité, qui obéit aux règles définies par les articles 23-1 à 23-12 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. " ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article Lp. 142-10 du code minier de la Nouvelle-Calédonie, issu de la loi du pays n° 2009-6 : " L'ouverture de travaux de recherches et d'exploitation est subordonnée à une autorisation du président de l'assemblée de la province compétente fixant les prescriptions destinées à prévenir les dommages ou nuisances que l'activité minière est susceptible de provoquer. / L'autorisation de travaux de recherches est précédée d'une notice d'impact. Toutefois, lorsque la protection des intérêts mentionnés à l'article Lp. 142-5 le justifie, cette autorisation peut être précédée, à la demande du président de l'assemblée de la province compétente, de tout ou partie d'une étude d'impact. / L'autorisation de travaux d'exploitation est précédée d'une étude d'impact. / L'autorisation de travaux de recherches est accordée après avis de la commission minière communale. / L'autorisation de travaux d'exploitation est accordée après enquête publique et avis de la commission minière communale. Ces autorisations peuvent être complétées ou modifiées ultérieurement. "

4. Considérant que pour demander le renvoi au Conseil constitutionnel de la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article Lp. 142-10 du code minier de la Nouvelle-Calédonie, l'association Ensemble pour la planète soutient que ces dispositions méconnaissent le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement reconnu par l'article 7 de la Charte de l'environnement ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 107 de la loi organique du 19 mars 1999 qu'il appartient au Conseil d'Etat de se prononcer sur le caractère législatif ou réglementaire des dispositions d'une loi du pays de Nouvelle-Calédonie ; qu'il résulte de l'article 107 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie que les lois du pays ont force de loi dans le domaine défini à l'article 99 ; que les règles concernant les hydrocarbures, le nickel, le chrome et le cobalt relèvent des matières mentionnées à l'article 99 de la loi organique ; qu'il résulte de ce qui précède que l'article Lp. 142-10 du code minier de la Nouvelle-Calédonie, qui figure dans le livre I relatif à la réglementation relative au nickel, au chrome et au cobalt, est une disposition de nature législative ; qu'elle est en conséquence susceptible de faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité ;

6. Considérant, en second lieu, que l'article Lp. 142-10 du code minier de la Nouvelle-Calédonie est applicable au présent litige, qui porte sur l'arrêté du 5 mars 2012 par lequel, sur le fondement de ces dispositions, le président de l'assemblée de la province Nord a autorisé la société Géovic Nouvelle-Calédonie à procéder à des travaux de recherches sur des permis de recherches minières valables pour le nickel, le cobalt et le chrome ; que cette disposition n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'elle porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement, présente un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

7. Considérant que si, aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ", la présente décision se borne à statuer sur la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; qu'en conséquence, les conclusions présentées par l'association Ensemble pour la planète au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être portées que devant le juge saisi du litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été soulevée ; que par suite, elles sont irrecevables au stade de la décision statuant sur la seule demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité ;

D E C I D E :

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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l'article Lp. 142-10 du code minier de la Nouvelle-Calédonie est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : Les conclusions de l'association Ensemble pour la planète présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association Ensemble pour la planète, au Président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, au Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, à l'Assemblée de la province Nord, à la société Geovic Nouvelle-Calédonie, au ministre de l'économie et des finances et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 363844
Date de la décision : 11/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 11 fév. 2013, n° 363844
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Samuel Gillis
Rapporteur public ?: Mme Suzanne Von Coester
Avocat(s) : SCP ANCEL, COUTURIER-HELLER, MEIER-BOURDEAU ; SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:363844.20130211
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