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28/12/2012 | FRANCE | N°348472

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 28 décembre 2012, 348472


Vu le pourvoi, enregistré le 14 avril 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présenté pour M. Hocine A, demeurant au ...; au village Kimia Dellys à Boumerdes, Algérie ; M. A demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 01DA00301 du 30 juin 2010 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0901648 du 25 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mai 2009 du préfet de la Seine-Marit

ime rejetant son recours gracieux dirigé contre la décision du 2 mars 200...

Vu le pourvoi, enregistré le 14 avril 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présenté pour M. Hocine A, demeurant au ...; au village Kimia Dellys à Boumerdes, Algérie ; M. A demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 01DA00301 du 30 juin 2010 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0901648 du 25 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mai 2009 du préfet de la Seine-Maritime rejetant son recours gracieux dirigé contre la décision du 2 mars 2009 ayant rejeté sa demande de carte de résident algérien valable dix ans et portant la mention " retraité " ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à la SCP Laugier-Caston, avocat de M. A, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Laugier, Caston, avocat de M. Hocine A,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Laugier, Caston, avocat de M. Hocine A ;

1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; " ; que l'article R. 612-1 du même code précise que : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / Toutefois, la juridiction d'appel ou de cassation peut rejeter de telles conclusions sans demande de régularisation préalable pour les cas d'irrecevabilité tirés de la méconnaissance d'une obligation mentionnée dans la notification de la décision attaquée conformément à l'article R. 751-5. / La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7 " ; que l'article R. 811-7 du même code dispose que : " Les appels ainsi que les mémoires déposés devant la cour administrative d'appel doivent être présentés, à peine d'irrecevabilité, par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2. / Lorsque la notification de la décision soumise à la cour administrative d'appel ne comporte pas la mention prévue au troisième alinéa de l'article R. 751-5, le requérant est invité par la cour à régulariser sa requête dans les conditions fixées aux articles R. 612-1 et R. 612-2 (...) " ;

2. Considérant, d'autre part, que la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique prévoit, en son article 2, que les personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice peuvent bénéficier d'une aide juridictionnelle et, en son article 25, que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat choisi par lui ou, à défaut, désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats ; qu'il résulte des articles 76 et 77 du décret du 19 décembre 1991 que si la personne qui demande l'aide juridictionnelle ne produit pas de document attestant l'acceptation d'un avocat choisi par elle, l'avocat peut être désigné sur-le-champ par le représentant de la profession qui siège au bureau d'aide juridictionnelle, à condition qu'il ait reçu délégation du bâtonnier à cet effet ;

3. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les cours administratives d'appel peuvent rejeter les requêtes entachées de défaut de ministère d'avocat, sans demande de régularisation préalable, si le requérant a été averti dans la notification du jugement attaqué que l'obligation du ministère d'avocat s'imposait à lui en l'espèce ; que toutefois, si ce requérant a obtenu la désignation d'un avocat au titre de l'aide juridictionnelle et si cet avocat n'a pas produit de mémoire, le juge d'appel ne peut, afin d'assurer au requérant le bénéfice effectif du droit qu'il tire de la loi du 10 juillet 1991, rejeter la requête sans avoir préalablement mis l'avocat désigné en demeure d'accomplir, dans un délai qu'il détermine, les diligences qui lui incombent et porté cette carence à la connaissance du requérant, afin de le mettre en mesure, le cas échéant, de choisir un autre représentant ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces de la procédure d'appel que M. A, qui avait été régulièrement informé par la lettre de notification du jugement attaqué de l'obligation de recourir au ministère d'avocat pour faire appel de ce jugement, a introduit sa requête sans le ministère d'un avocat avant de demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai a fait droit à sa demande et désigné un avocat pour le représenter ; que cet avocat n'a pas produit de mémoire après sa désignation au titre de l'aide juridictionnelle ; qu'en se bornant, avant d'opposer à M. A sur le fondement de l'article R. 222-1 précité une irrecevabilité tirée du défaut de ministère d'avocat, à mettre en demeure l'avocat désigné d'accomplir les diligences qui lui incombaient sans porter sa carence à la connaissance du requérant, le président de la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que, dès lors, son ordonnance doit être annulée ;

5. Considérant que M. A a obtenu devant le Conseil d'État le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à la SCP Laugier-Caston, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du président de la cour administrative d'appel de Douai du 30 juin 2010 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai.

Article 3 : L'État versera à la SCP Laugier-Caston, avocat de M. A, une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Hocine A et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 348472
Date de la décision : 28/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2012, n° 348472
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: Mme Suzanne Von Coester
Avocat(s) : SCP LAUGIER, CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:348472.20121228
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