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19/12/2012 | FRANCE | N°345168

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 19 décembre 2012, 345168


Vu le pourvoi, enregistré le 20 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 10BX00459 du 26 octobre 2010 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il confirme l'annulation par le jugement n° 0802365 du 16 décembre 2009 du tribunal administratif de Poitiers, d'une part, du retrait de six points du permis de conduire de M. A consécutif à l'infraction commise le 19 juillet 2007 et, d

'autre part, de la décision 48S constatant la perte de valid...

Vu le pourvoi, enregistré le 20 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 10BX00459 du 26 octobre 2010 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il confirme l'annulation par le jugement n° 0802365 du 16 décembre 2009 du tribunal administratif de Poitiers, d'une part, du retrait de six points du permis de conduire de M. A consécutif à l'infraction commise le 19 juillet 2007 et, d'autre part, de la décision 48S constatant la perte de validité de ce permis ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anissia Morel, Auditeur,

- les observations de la SCP Gaschignard, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gaschignard, avocat de M. A ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 28 août 2008, le ministre de l'intérieur a constaté qu'à la suite de quatre décisions de retrait de points, consécutives à des infractions commises les 22 février 2004, 29 septembre 2005, 19 juillet 2007 et 21 avril 2007, le permis de conduire de M. A avait perdu sa validité ; que par un jugement du 16 décembre 2009 le tribunal administratif de Poitiers a annulé, à la demande de l'intéressé, les retraits de points consécutifs aux infractions des 22 février 2004 et 19 juillet 2007 et, par voie de conséquence, la décision du 28 août 2008 ; que par un arrêt du 26 octobre 2010, la cour administrative d'appel de Bordeaux a censuré le jugement en tant qu'il annulait le retrait de points consécutif à l'infraction du 22 février 2004, confirmé l'annulation du retrait consécutif à l'infraction du 19 juillet 2007 et rejeté le surplus des conclusions d'appel du ministre de l'intérieur ainsi que l'appel de M. A ; que le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il ne lui donne pas entièrement satisfaction ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : " Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. / (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive (...) " ;

3. Considérant que la délivrance, au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et, éventuellement, d'en contester la réalité devant le juge pénal ; qu'elle revêt le caractère d'une formalité substantielle et conditionne la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé ;

4. Considérant, toutefois, que lorsque la réalité de l'infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester, l'omission de cette formalité est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation ; que ces conditions sont remplies y compris dans le cas où la condamnation intervient selon la procédure simplifiée régie, s'agissant des délits, par les articles 495 et suivants du code de procédure pénale et, s'agissant des contraventions de police, par les articles 524 et suivants du même code, qui permettent au juge de statuer par une ordonnance motivée sans débat préalable mais qui réservent la possibilité, pour le prévenu, de former opposition à l'ordonnance pénale ainsi prononcée et d'obtenir que l'affaire soit portée à l'audience du tribunal correctionnel ;

5. Considérant qu'en jugeant que le défaut de délivrance de l'information était de nature à entacher d'illégalité le retrait de points consécutif à l'infraction, présentant le caractère d'un délit, relevée à l'encontre de M. A le 19 juillet 2007, alors qu'il ressortait des pièces du dossier que la réalité de cette infraction avait été établie par une condamnation pénale devenue définitive, prononcée selon la procédure simplifiée régie par les articles 495 et suivants du code de procédure pénale, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il confirme l'annulation du retrait de points consécutif à l'infraction commise le 19 juillet 2007 et celle de la décision du 28 août 2008 constatant la perte de validité du permis ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

8. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, la circonstance, à la supposer établie, que M. A n'aurait pas bénéficié de l'information prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route lors de la constatation de l'infraction commise le 19 juillet 2007 est sans incidence sur la légalité du retrait de points consécutif à cette infraction dont la réalité a été établie par une condamnation pénale devenue définitive ; que le ministre de l'intérieur est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif, accueillant l'unique moyen invoqué par M. A à l'encontre de la décision de procéder à ce retrait, en a prononcé l'annulation ;

9. Considérant que la demande de M. A tendant à l'annulation du retrait de points consécutif à l'infraction du 22 février 2004 ayant été rejetée par l'arrêt du 26 octobre 2010 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, devenu définitif à cet égard, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé, par voie de conséquence de l'annulation de ce retrait et de celui qui a fait suite à l'infraction du 19 juillet 2007, la décision du 28 août 2008 constatant la perte de validité du permis ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement du 16 décembre 2009 en tant qu'il fait droit aux demandes de M. A dirigées contre le retrait de points consécutif à l'infraction commise le 19 juillet 2007 et contre la décision du 28 août 2008 et de rejeter ces demandes ;

11. Considérant que, l'Etat n'étant pas, dans la présente affaire, la partie perdante, les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne sauraient être accueillies ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 26 octobre 2010 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé en tant qu'il confirme l'annulation de la décision de retrait de points consécutive à l'infraction commise le 19 juillet 2007 et celle de la décision du 28 août 2008 constatant la perte de validité du permis de M. A.

Article 2 : Le jugement du 16 décembre 2009 du tribunal administratif de Poitiers est annulé en tant qu'il annule la décision de retrait de points consécutive à l'infraction commise le 19 juillet 2007 et la décision du 28 août 2008 constatant la perte de validité du permis de conduire de M. A.

Article 3 : Les demandes de M. A tendant à l'annulation de la décision de retrait de points consécutive à l'infraction commise le 19 juillet 2007 et de la décision du 28 août 2008 constatant la perte de validité de son permis de conduire, ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. Rémy A.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 345168
Date de la décision : 19/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 déc. 2012, n° 345168
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anissia Morel
Rapporteur public ?: Mme Fabienne Lambolez
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:345168.20121219
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