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12/12/2012 | FRANCE | N°342175

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 12 décembre 2012, 342175


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 août et 4 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la communauté de communes Lodévois et Larzac, dont le siège est 9, place Alsace-Lorraine à Lodève (34700), représentée par sa présidente ; la communauté de communes demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08MA01735 du 4 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, sur requête de la SARL Ramond et Cie et de Mme A, a annulé le jugement n° 0500306 du 27 décembre 2007 du tribuna

l administratif de Montpellier ainsi que la délibération du 22 septembre 200...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 août et 4 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la communauté de communes Lodévois et Larzac, dont le siège est 9, place Alsace-Lorraine à Lodève (34700), représentée par sa présidente ; la communauté de communes demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08MA01735 du 4 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, sur requête de la SARL Ramond et Cie et de Mme A, a annulé le jugement n° 0500306 du 27 décembre 2007 du tribunal administratif de Montpellier ainsi que la délibération du 22 septembre 2004 par laquelle son conseil de communauté a approuvé le bilan de la concertation ainsi que le dossier de création de la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Entrée de ville " sur le territoire de la commune de Lodève (Hérault) et a décidé la création de cette zone ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la SARL Ramond et Cie et de Mme A ;

3°) de mettre solidairement à la charge de la SARL Ramond et Cie et de Mme A le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Rémi Decout-Paolini, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la communauté de communes Lodévois et Larzac,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la communauté de communes Lodévois et Larzac ;

1. Considérant que la communauté de communes du Lodévois a, par délibération du 22 septembre 2004, approuvé le bilan de la concertation ainsi que le dossier de création de la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Entrée de ville " sur le territoire de la commune de Lodève (Hérault) et décidé la création de cette zone ; que, par un jugement du 27 décembre 2007, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande présentée par la SARL Ramond et Cie et Mme A tendant à l'annulation de cette délibération ; que la communauté de communes Lodévois et Larzac, qui vient aux droits de la communauté de communes du Lodévois, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, en se fondant sur l'incompétence du conseil de la communauté de communes, a annulé ce jugement et la délibération litigieuse ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales, dont les dispositions sont applicables aux communautés de communes, dans sa version applicable au litige : " La création de l'établissement public de coopération intercommunale peut être décidée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés après accord des conseils municipaux des communes intéressées sur l'arrêté dressant la liste des communes. Cet accord doit être exprimé par deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou par la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 5214-16 du même code, dans sa version applicable au litige : " I. - La communauté de communes exerce de plein droit au lieu et place des communes membres, pour la conduite d'actions d'intérêt communautaire, des compétences relevant de chacun des deux groupes suivants : / 1° Aménagement de l'espace ; / 2° Actions de développement économique intéressant l'ensemble de la communauté (...) / III. - La définition des compétences transférées au sein de chacun des groupes est fixée par la majorité qualifiée requise pour la création de la communauté ; / IV. - L'intérêt communautaire des compétences exercées au sein des groupes mentionnés aux I et II est déterminé à la majorité qualifiée requise pour la création de la communauté de communes " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la définition de l'intérêt communautaire d'une compétence transférée à une communauté de communes intervient ou est modifiée après accord des seuls conseils municipaux des communes membres, dans les conditions prévues au II de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit en jugeant que la définition de cet intérêt communautaire était également subordonnée à l'adoption d'une délibération concordante de l'organe délibérant de la communauté de communes ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en application du I de l'article L. 5214-16 cité ci-dessus, une communauté de communes n'exerce des compétences en matière d'aménagement de l'espace, au nombre desquelles peut figurer la réalisation de ZAC, que pour les seules actions d'intérêt communautaire ; qu'aux termes de l'article L. 5211-17 du même code, dans sa version applicable au litige : " Les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale peuvent à tout moment transférer, en tout ou partie, à ce dernier, certaines de leurs compétences dont le transfert n'est pas prévu par la loi ou par la décision institutive ainsi que les biens, équipements ou services publics nécessaires à leur exercice. / (...) Le transfert de compétences est prononcé par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements intéressés. / Il entraîne de plein droit l'application à l'ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu'à l'ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, des dispositions des trois premiers alinéas de l'article L. 1321-1, des deux premiers alinéas de l'article L. 1321-2 et des articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5. / Toutefois, lorsque l'établissement public est compétent en matière de zones d'activité économique, les conditions financières et patrimoniales du transfert des biens immobiliers nécessaires à l'exercice de cette compétence sont décidées par délibérations concordantes de l'organe délibérant et des conseils municipaux des communes membres se prononçant dans les conditions de majorité qualifiée requise pour la création de l'établissement. Il en va de même lorsque l'établissement public est compétent en matière de zones d'aménagement concerté. / L'établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert de compétences, aux communes qui le composent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes (...) " ; que ces dispositions n'impliquent pas que les transferts de biens et de personnels relatifs aux créations de ZAC reconnues d'intérêt communautaire doivent intervenir par délibérations concordantes de l'organe délibérant de l'établissement et des conseils municipaux des communes membres avant la date de la reconnaissance de l'intérêt communautaire de l'opération en cause ;

4. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, si le préfet de l'Hérault a, par arrêté du 14 décembre 2001, transféré à la communauté de communes du Lodévois la compétence de principe en matière de création et de réalisation de ZAC, l'insertion du projet de ZAC " Entrée de ville " dans le champ de compétences de la communauté de communes ne résulte en revanche que de la nouvelle définition de l'intérêt communautaire adoptée par des délibérations concordantes prises entre le 3 avril et le 24 août 2004 par les conseils municipaux des communes membres de l'établissement ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Marseille a également commis une erreur de droit en jugeant que les conditions financières et patrimoniales du transfert des biens immobiliers nécessaires à l'exercice, par la communauté de communes, de ses compétences pour cette ZAC auraient dû être adoptées avant l'entrée en vigueur de l'arrêté du 14 décembre 2001 ;

5. Considérant qu'en déduisant des deux motifs précédemment censurés que la communauté de communes du Lodevois était incompétente pour approuver, en application de l'article R. 311-2 du code de l'urbanisme et à la place de la commune de Lodève, le dossier de création de la ZAC " Entrée de ville ", la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la communauté de communes Lodévois et Larzac est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

8. Considérant qu'il résulte des délibérations concordantes adoptées entre le 3 avril et le 24 août 2004 par l'ensemble des conseils municipaux des communes membres de la communauté de communes du Lodévois, seules compétentes, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, pour modifier la définition de l'intérêt communautaire pour la compétence transférée par l'arrêté préfectoral du 24 décembre 2001 à la communauté de communes en matière de création et de réalisation de ZAC, que revêt un intérêt communautaire " tout projet d'extension ou de création d'une zone mixte d'activités économiques, touristiques et d'habitat, dès lors qu'il remplit au moins une des conditions suivantes : / Au plan géographique, s'il est implanté sur une ou plusieurs communes de la Communauté ou s'il est situé sur un emplacement remarquable notamment au plan de l'accessibilité par rapport aux axes de communication ou encore s'il constitue du fait de sa position, une vitrine de la Communauté (...) " ;

9. Considérant qu'au regard de sa situation, à proximité du nouvel échangeur de l'autoroute A 75 reliant l'Auvergne au Languedoc-Roussillon, le projet de ZAC " Entrée de ville " présentait un intérêt communautaire ; que, par suite et alors même que les conditions financières et patrimoniales du transfert des biens immobiliers nécessaires à la création de la ZAC n'avaient pas été adoptées avant l'entrée en vigueur de l'arrêté du 14 décembre 2001 transférant des compétences, la communauté de communes du Lodévois était compétente, à la date du 22 septembre 2004, pour adopter la délibération relative au projet de ZAC " Entrée de ville ", en particulier en ce que cette délibération approuve le dossier de création de la zone ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme : " I. - Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : (...) b) Toute création, à son initiative, d'une zone d'aménagement concerté ; (...) " ;

11. Considérant que, par une délibération du 20 novembre 2000, le conseil municipal de Lodève, alors compétent pour la création de la ZAC en cause, avait prévu l'organisation d'une réunion publique, la mise à disposition du dossier de concertation pendant la durée de l'élaboration du projet en mairie et la consignation des observations recueillies sur un registre ; qu'il ressort des pièces du dossier que deux réunions publiques ont été organisées les 16 janvier 2001 et 4 février 2002, que les personnes présentes à ces réunions ont pu présenter leurs observations à la suite de la présentation qui leur a été faite du projet et des objectifs d'aménagement poursuivis et que neuf observations ont été reportées sur le registre de concertation tenu à la disposition du public ; qu'ainsi, la concertation s'est déroulée dans le respect des modalités préalablement définies ; que la circonstance alléguée que le dossier de la concertation, auquel la commune n'était pas tenue de joindre les études préliminaires du projet, a été mis à la disposition du public au bureau des services techniques de la mairie de Lodève n'entache pas la procédure d'irrégularité ; qu'il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de la concertation préalable à la création de la ZAC " Entrée de Ville " doit être écarté ;

12. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 311-3 du code de l'urbanisme n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

13. Considérant qu'il résulte de tout de ce qui précède que la SARL Ramond et Cie et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 27 décembre 2007, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 22 septembre 2004 de la communauté de communes du Lodévois ;

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Lodévois et Larzac qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SARL Ramond et Cie et Mme A demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SARL Ramond et Cie et de Mme A le versement d'une somme de 2 000 euros chacune à la communauté de communes Lodévois et Larzac, au titre des frais exposés par elle tant en appel qu'en cassation ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 4 juin 2010 est annulé.

Article 2 : La requête de la SARL Ramond et Cie et de Mme A est rejetée.

Article 3 : La SARL Ramond et Cie et Mme A verseront chacune à la communauté de communes Lodévois et Larzac une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la communauté de communes Lodévois et Larzac, à la SARL Ramond et Cie et à Mme Nicole A.

Copie sera adressée pour information à la ministre de l'égalité des territoires et du logement.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 342175
Date de la décision : 12/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 déc. 2012, n° 342175
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rémi Decout-Paolini
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:342175.20121212
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