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12/12/2012 | FRANCE | N°334516

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 12 décembre 2012, 334516


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 décembre 2009 et 1er mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. Technologies, dont le siège est 84-88 boulevard de la mission Marchand à Courbevoie (92411) ; la S.A. Technologies demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07PA02955 du 13 octobre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0117959/1-2 du tribunal administratif de Paris du 5 juin 2007 en tant qu'il a rejet

é le surplus de sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 décembre 2009 et 1er mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. Technologies, dont le siège est 84-88 boulevard de la mission Marchand à Courbevoie (92411) ; la S.A. Technologies demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07PA02955 du 13 octobre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0117959/1-2 du tribunal administratif de Paris du 5 juin 2007 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle sur cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995, 1996 et 1997 et, d'autre part, à la décharge de ces impositions ainsi que des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle sur cet impôt résultant de la modification de l'imputation des crédits d'impôt correspondants au titre des mêmes exercices ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Séverine Larere, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la S.A. Technologies,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la S.A. Technologies ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la S.A. Technologies, qui exerce une activité de conception et de vente de logiciels et de prestations informatiques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 1995, 1996 et 1997, à la suite de laquelle des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle sur cet impôt ont été mises à sa charge ; qu'après le rejet de sa réclamation dirigée contre ces impositions, elle a porté le litige devant le tribunal administratif de Paris qui, par jugement du 5 juin 2007, a partiellement fait droit à sa demande de décharge et a rejeté le surplus de ses conclusions ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 13 octobre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête dirigée contre l'article 5 de ce jugement ;

Sur le bien-fondé des motifs de l'arrêt relatifs au régime fiscal de l'indemnité perçue à la suite de la résiliation du contrat conclu le 31 mai 1990 avec la société OSI :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA Technologies contestait notamment devant la cour la réintégration, dans la base imposable au taux plein de l'impôt sur les sociétés, au titre de l'exercice clos en 1995, d'une somme de 6 401 768 francs, correspondant à une indemnité perçue à la suite de la résiliation anticipée du contrat de distribution exclusive de logiciels, conclu le 31 mai 1990, avec la société de droit américain OSI ; qu'elle soutenait que cette indemnité compensait la perte d'un élément d'actif et devait, en conséquence, être soumise au régime des plus-values à long terme, passible du taux réduit de l'impôt sur les sociétés ; que, pour refuser la qualification d'élément de l'actif immobilisé aux droits attachés à ce contrat et écarter, par suite, le moyen de la société, la cour s'est notamment fondée sur la circonstance que le contrat de distribution exclusive ne portait que sur une durée de cinq ans et ne prévoyait le versement d'aucune indemnité à son échéance ou en cas de rupture anticipée ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait des termes mêmes du contrat, notamment de son paragraphe 3, qu'en cas de résiliation anticipée par les parties, une indemnité de résiliation de 50 % des redevances payées au concédant au cours des douze derniers mois était due au concessionnaire, sauf manquement à ses obligations contractuelles, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, la S.A. Technologies est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur l'indemnité de rupture de contrat perçue en 1995 ;

Sur le bien-fondé des motifs de l'arrêt relatifs au régime fiscal du produit de la cession du logiciel "Turbo Option " :

3. Considérant que la cour a jugé que le produit résultant de la cession, en 1996, d'un logiciel créé par la SA Technologies en 1993 et dénommé " Turbo Option " ne pouvait bénéficier du régime des plus-values sur cession d'éléments d'actif fixé à l'article 39 duodecies du code général des impôts, au motif qu'aucun document ne permettait d'établir que ce logiciel constituait un élément de l'actif de l'entreprise ; qu'en relevant, d'une part, que ce logiciel n'avait jamais été inscrit à l'actif immobilisé de l'entreprise et, d'autre part, que la S.A Technologies ne pouvait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 236-1 du code général des impôts, en vertu duquel les dépenses exposées pour les opérations de conception de logiciels peuvent être déduites immédiatement ou immobilisées, parce que ces dispositions étaient sans incidence sur le caractère d'immobilisation des logiciels, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune contradiction de motifs ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.A. Technologies est seulement fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il rejette les conclusions de sa requête relatives aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle sur cet impôt résultant de la remise en cause par l'administration du régime fiscal applicable à l'indemnité qui lui a été versée en 1995 du fait de la résiliation du contrat conclu le 31 mai 1990 avec la société OSI ;

5. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond dans la mesure de l'annulation prononcée ;

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que le contrat de distribution exclusive de logiciels conclu, le 31 mai 1990, entre la S.A. Technologies et la société de droit américain OSI avait été conclu pour une durée de 5 ans et qu'il prévoyait que sa reconduction ne pourrait intervenir, au terme de cette période, que sous réserve d'un accord entre les parties sur les conditions de cette reconduction au plus tard le 1er janvier 1993 ; qu'il prévoyait, à son paragraphe 3, diverses hypothèses de résiliation anticipée, et notamment la fin automatique du contrat au terme de toute année au cours de laquelle le concessionnaire aurait été dans l'incapacité de réaliser au moins soixante-six pour cent de son objectif de vente ; que, par ailleurs, ce contrat interdisait au concessionnaire de " vendre, céder, transférer, transmettre, déléguer ou grever sa nomination à titre de concessionnaire exclusif "; qu'eu égard aux éléments de précarité du contrat et à l'ampleur des limites apportées aux droits de la S.A. Technologies par ses clauses, les droits attachés au contrat ne pouvaient être regardés comme constitutifs d'une immobilisation ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'indemnité versée à la S.A. Technologies aurait eu pour objet de compenser la perte d'un autre élément d'actif que les droits de distribution exclusive de logiciels, constitué, comme le soutient la société, par l'existence d'une clientèle propre ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que l'indemnité versée à la S.A. Technologies, en 1995, du fait de la résiliation du contrat de distribution exclusive, ne compensait pas la perte d'un élément de l'actif immobilisé et devait, dès lors, être imposée au taux de droit commun de l'impôt sur les sociétés ; qu'il en résulte que la S.A. Technologies n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 5 juin 2007, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande sur ce point ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 13 octobre 2009 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la requête de la S.A. Technologies relatives aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle sur cet impôt résultant de la remise en cause par l'administration du régime fiscal applicable à l'indemnité versée à la société en 1995 du fait de la résiliation du contrat conclu le 31 mai 1990 avec la société OSI.

Article 2 : Les conclusions de la requête de la S.A. Technologies devant la cour administrative d'appel relatives à ces cotisations supplémentaires et le surplus des conclusions de son pourvoi sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la S.A. Technologies et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 334516
Date de la décision : 12/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 déc. 2012, n° 334516
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Séverine Larere
Rapporteur public ?: Mme Claire Legras
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:334516.20121212
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